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Un homme affable II.4.

Publié le 24 juin 2009 par Sophielucide

La journée avait  été consacrée à la personnalité de la victime qui  perdait petit à petit son statut en dévoilant une funeste aura.  La défense rappela à la cour son enfance choyée passée quasiment en tête à tête avec sa mère, qui avait comparu le premier jour.  La vieille dame affaiblie par ce deuil éprouvant avait eu le plus grand mal à conserver son sang froid. Entre deux pleurs, elle n’avait pas hésité à insulter l’accusée, la traitant de petite trainée, d’allumeuse et de criminelle pour laquelle on ferait aussi bien de rétablir la peine capitale. Elle avait ensuite résumé la jeunesse de son unique enfant dont elle n’avait jamais, au grand jamais,  eu à se plaindre jusqu’ici.

Fabien proposa aux magistrats d’entendre à nouveau ce témoin qui ne s’était pas exprimé au sujet de sa première bru. En somme, rappela-t-il, la plupart des témoins ayant prêté serment avait occulté ce fait inconnu jusqu’ici. La cour en prit note et décida de reporter le  procès à une date ultérieure, laissant aux parties adverses le temps de préparer un dossier digne d’être porté devant les jurés. Le Président arrêta la date au mois suivant.

Cette décision ne plut pas à la défense, bien évidemment. Les deux derniers jours, riches en rebondissements avaient joué en sa faveur. Dans un mois, tout serait à refaire, on aurait oublié l’émotion régissant le procès, les jurés auraient assimilés un certain nombre de ces faits, le suspens serait retombé. Quel gâchis !

Fabien accompagna l’accusée jusqu’à la petite cellule où elle était retenue à chaque suspension d’audience. Il crut lire dans son regard une nouvelle détermination, un changement d’attitude certain.
Dans la salle aux murs nus, meublée seulement d’une table et deux chaises, Clotilde lui demanda une cigarette. Elle prit plusieurs longues bouffées qui visiblement opérèrent  un bénéfice certain sur la nervosité exacerbée de la jeune femme. Elle sécha du revers de la main  les larmes qui coulaient sous le coup du relâchement ; elle ne tremblait plus maintenant et fixant son avocat, elle lâcha : « je vais tout vous dire »

Ce qui l’avait empêché de parler, c’était cette femme, Monique Massier, à qui elle avait fait tant de mal. C’est ce qu’elle avait cru jusqu’ici; maintenant qu’elle apprenait avec stupeur que cette femme n’était autre que  Louve Solitaire, celle qui s’était montrée si cinglante à son égard  sur ce site qui avait causé sa perte, maintenant qu’elle savait que cette même Monique connaissait tout des relations épistolaires entretenues avec son mari, maintenant qu’elle prenait à peine la mesure de cette mascarade macabre,  dont elle avait été le jouet, alors maintenant, oui, elle se sentait prête à parler.

Elle remercia Fabien d’avoir entrepris cette enquête. Elle expira un petit rire nerveux : «  Comment avez-vous fait ? Qui vous a mis sur cette voie ? C’est une histoire de fou ! Tout ça est complètement fou ! »


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