Magazine Journal intime

Le Cid, version flamenca

Publié le 24 juin 2009 par Stella

lecid.1245841248.jpg Le jour de mon anniversaire, j’ai décidé d’inviter mes deux jeunes ados (mon fils et sa copine) au théâtre. Au menu : Le Cid, version flamenca, pour lequel j’avais reçu des invitations presse. J’étais donc assurée d’avoir des bonnes places et j’imaginais qu’il s’agissait d’une adaptation pour une compagnie de danse… Rien de trop effrayant pour des jeunes peu habitués aux salles de spectacle vivant, et encore moins à une tragédie en vers.

Double erreur et double succès ! C’était in extenso le texte de Corneille, en alexandrins rimés et il n’y avait qu’un couple de danseurs, accompagnés d’un guitariste, un percussionniste et un chanteur de flamenco dans la plus pure tradition espagnole. D’autre part, contre toute attente, mes deux jeunes ont “adoré”.

Je dois dire que c’était un bon spectacle, drôle et surprenant et les comédiens étaient à peu près tous à la hauteur de la situation. Les meilleurs étaient les deux plus âgés, Don Diègue et le Comte. Tout de cuir vêtus comme des bikers américains, l’un semblait bien retiré des bagarres, tandis que l’autre paraissait juste sorti une rixe ultra-violente. Une version contemporaine parfaitement adaptée aux personnages authentiques et la dispute initiale, qui donne l’argument de toute la pièce, était donc parfaitement crédible, ce qui entraînait immédiatement le spectateur, quoique un peu surpris, au coeur de l’intrigue.

Rodrigue avait du coeur, c’est sûr, même si son côté bellâtre au visage sombre ne correspondait pas vraiment à l’idée que je me faisais d’un Cid écartelé entre l’honneur de sa famille et son amour pour Chimène. Malgré tout, il se tirait honorablement d’un rôle difficile, qu’il devait coupler avec quelques pas de danse ou, du moins, de ce fameux tap-tap du pied qui réclame une taille svelte, une fesse ferme et un mollet de marathonien. La moins bonne était incontestablement Chimène. Imbue d’elle-même à en être énervante, nous avons dû subir son complet déshabillage, derrière un voile blanc, pour le plaisir - le sien surtout - de nous faire admirer une plastique qui, je dois le reconnaître, était plus que parfaite. Mais qu’importe : elle jouait mal, ce qui est grave. Seules ses entrées en scène revêtait quelque présence, tant elle appréciait de se mirer dans les yeux du public. On sentait l’envie refoulée d’être mannequin dans un défilé Christian Lacroix. De la méchanceté de Chimène il ne restait que quelques criailleries, éructées d’une voix de fausset. Elle débitait l’essentiel de son texte comme une bonne élève récitante, marquant l’hémistiche et insistant sur la rime. Insupportable. Je pensais au monologue de Camille dans Horace…

leroi.1245848367.jpg

Reste le roi, dont la magistrale interprétation reste à saluer. Loin, très loin de la version traditionnelle du rôle, mais dans le respect total du texte initial, cet époustouflant acteur nous a livré un roi de Castille entre “grande folle” et “drag queen”, drôle à mourir, vif et sautillant, rien à voir avec le papy moralisateur dont j’avais souvenir. A lui seul, il mérite le déplacement. Servi par une astuce de mise en scène qui le fait descendre des cintres, il dame le pion à tous les autres comédiens par son incontestable talent. Mis en valeur par un Don Arias maure plus vrai que nature, c’est lui qui me pousse à recommander à tous mes lecteurs de courir voir cet excellent spectacle. Vous me donnerez votre avis…


Retour à La Une de Logo Paperblog