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Un humble prêtre

Publié le 30 juin 2009 par Fbruno
Un humble prêtre

« À Ars, il n'y a rien à voir. Il y a juste un homme à rencontrer ». C'est en ces termes qu'un chapelain accueille un groupe de pèlerins venus dans ce petit village des Dombes, à trente km au nord de Lyon. Un village devenu célèbre dans le monde entier grâce à Jean-Marie Vianney, plus connu sous le nom de Curé d'Ars. Un humble prêtre devenu le saint patron de tous les curés de l'univers. Rien ne laissait supposer un tel destin depuis que le supérieur du séminaire s'était excusé, en 1815, auprès de l'évêque de Grenoble venu l'ordonner prêtre, de l' « avoir dérangé pour si peu ». Aujourd'hui, des milliers de prêtres et de pèlerins du monde entier viennent se confier à lui et, avec lui, rencontrer le Seigneur.

Arrivé à Ars en 1818, (un village où « il n'y a rien à faire », le rassure le doyen), il y meurt 41 ans plus tard, le 4 août 1859. À l'époque, le village ne comptait que 399 habitants. Peu à peu, le bon curé réveille la foi de ses paroissiens avec ses catéchèses pleines d'images et de bon sens. Il le fait plus encore par sa manière de vivre et de prier. Se sachant démuni devant la mission à accomplir, il donne carte blanche à la grâce de Dieu. De ses propres mains, il restaure et embellit son église avant de construire un orphelinat, « La Providence », et de se consacrer au soin des pauvres. Assailli par de nombreuses épreuves et des combats singuliers avec le « grappin », il garde sa vie durant son cœur enraciné dans l'amour de Dieu et des gens. « Sa préoccupation était que chacun puisse goûter la joie de connaître Dieu et de l'aimer, de savoir qu'Il nous aime », résume le Père Jean-Philippe Nault, recteur du sanctuaire. Rapidement, la réputation de confesseur du curé d'Ars attire de nombreux pèlerins venus chercher auprès de lui la paix du cœur. À partir de 1830, des milliers de personnes viennent se confesser à lui, le retenant jusqu'à 17 heures d'affilée dans son triple confessionnal, un pour les hommes, un pour les femmes, un pour les « gros pécheurs » soucieux de discrétion. Comme jadis, les pèlerins sont nombreux à venir en cette année 2009 où l'Église célèbre le 150e anniversaire de la mort du plus célèbre de ses curés. Pour la circonstance, le conseil général prévoit même quelques lignes supplémentaires de bus depuis Villefranche-sur-Saône. L'année jubilaire a été inaugurée le 8 décembre dernier et s'achèvera le 1er novembre 2009. Ce Jubilé aux pays des Dombes englobe ainsi les grandes fêtes dédiées au saint Curé ainsi que les grands temps liturgiques proposés par l'Église. Le sommet sera les fêtes du saint Curé, le 4 août 2009.

Une année entière n'est pas de trop pour faire mémoire de la vie extraordinaire de cet homme, prêtre de fond en comble, et rendre grâce pour tout ce que le Seigneur a donné à son Église à travers lui et continue de lui donner par son intercession. Durant cette année exceptionnelle, chaque pèlerin est invité à venir demander et recueillir la grâce jubilaire et le don de l'indulgence. Le Recteur rassure ceux qui pensent (à tort) que l'indulgence est périmée depuis longtemps. « Par la grâce de l'indul gence, le Seigneur efface et guérit aussi les conséquences de notre péché en nous et dans le monde. C'est un appel à une conversion toujours plus grande en vue de la sainteté à l'école de Saint Jean-Marie Vianney ». Patron de tous les curés de l'univers depuis 1929, c'est enfin une invitation à prier pour nos pasteurs ainsi que pour les vocations sacerdotales.

La démarche jubilaire n'est pas difficile. Les pères du sanctuaire ont tout prévu. Au nom de l'Église, ils invitent les pèlerins à se réjouir du don que Dieu leur fait en leur proposant une démarche qui va les aider à ouvrir largement leur cœur aux grâces de ce Jubilé, c'est-à-dire au Seigneur en personne, source de toute sainteté. Chaque visiteur est invité à passer la porte sainte en pèlerin, signe que sa vie passe par le Christ, lui la Porte des brebis. Nombreux sont ceux qui, depuis le 8 décembre dernier, date de l'ouverture du jubilé, ont déjà franchi cette porte de bronze. Située à gauche de l'église, elle fut ouverte par le curé d'Ars afin de donner un accès supplémentaire à son église. « C'est précisément le sens de l'ouverture d'une Porte Sainte  : ouvrir plus largement la porte des grâces qui nous permettent de nous convertir, de passer avec le Christ de la mort à la Vie, avec un grand V. Vous serez peut-être le prochain à la franchir », nous invite le Père Antoine Hardy, l'actuel curé d'Ars. Deuxième étape, recevoir le sacrement de réconciliation, ce qui est la moindre des choses dans ce lieu où le saint Curé confessait des heures et des heures. Bien évidemment participer ensuite à l'eucharistie célébrée dans la basilique où l'un des autres lieux du sanctuaire. Après cela, prendre un temps de prière aux intentions du Saint-Père, réciter le Credo et se tourner vers Notre Dame. Enfin, se déterminer à un acte concret de charité pour vivre et témoigner de l'amour de Dieu, que ce soit une visite aux malades, un geste de réconciliation ou encore une offrande.

La date du 8 décembre n'a pas été choisie au hasard. Le saint Curé avait consacré sa paroisse à l'Immaculée Conception bien avant la proclamation du dogme. Immédiatement, sa paroisse avait connu un essor et un rayonnement spirituel étonnant autour de l'adoration eucharistique et de l'expérience de la miséricorde de Dieu. Selon le Père Jean-Philippe Nault, « ce jubilé est l'occasion pour chacun de prendre conscience que Dieu continue encore aujourd'hui à donner ses grâces et à répandre sa miséricorde ». C'est l'Église, par l'autorité du Saint-Père, qui a décrété l'ouverture de cette année jubilaire depuis qu'en décembre dernier, le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d'État auprès de Benoît XVI, a adressé un message à Mgr Guy Bagnard, évêque de Belley-Ars  : « Sa Sainteté le pape Benoît XVI s'associe à la joie du clergé et des fidèles de votre diocèse qui auront à cœur tout au long de cette année de faire redécouvrir la figure éminente du saint Curé ».

Cette grâce du Jubilé s'adresse à tous, personnes seules ou en groupes, adultes, enfants, jeunes, familles, paroisses, mouvements… Un enseignement sur le sens du Jubilé ou sur la vie du curé d'Ars est proposé à ceux qui le désirent, sans oublier la découverte des lieux où a vécu et prié le saint homme, en particulier son église et son presbytère. La chapelle qui conserve la relique de son cœur est le lieu où chaque pèlerin peut confier les prêtres de sa connaissance. Sans oublier la chapelle de la Providence où a lieu désormais l'adoration perpétuelle, grand projet que le prisonnier du confessionnal n'eut pas le temps de mener à bien. Pour mieux connaître le chemin du ciel, rendez-vous au monument de la rencontre. C'est à cet endroit précis que le jeune abbé Vianney rencontra le petit Antoine Givre qui lui montra le chemin qui conduisait au village. En réponse, l'abbé lui dit  : « Tu m'as montré le chemin d'Ars, je te montrerai le chemin du ciel ». C'était le 13 février 1818.

Ces festivités ont été l'occasion de renouveler le mobilier liturgique du chœur de la basilique. Œuvre de Mario Rudelli, artiste milanais reconnu, l'ensemble a été consacré le lundi 8 décembre dernier. Autre réalisation accomplie  : un CD sur le curé d'Ars rassemblant tous les chants existants à son sujet ou réalisés à partir de ses paroles. Tous ceux qui portent le prénom de Jean-Marie ou de Vianney sont invités à vivre leur démarche jubilaire le même jour que le jubilé des familles, à savoir le jeudi de l'Ascension 21 mai. Une messe sera célébrée à leur intention et un grand registre sera ouvert pour les rassembler.

À l'occasion de cet anniversaire, le Pape a voulu une année sacerdotale universelle  : « Pour favoriser cette tension des prêtres vers la perfection spirituelle dont dépend surtout l'efficacité de leur ministère, j'ai décidé de mettre en place une année sacerdotale spéciale du 19 juin 2009, solennité du Sacré-Cœur de Jésus et journée pour la sanctification des prêtres, au 19 juin 2010 ». Cette année « rappellera le 150e anniversaire de la mort du saint Curé d'Ars, Jean-Marie Vianney, vrai exemple de pasteur au service du troupeau du Christ… La dimension ecclésiale, hiérarchique et doctrinale et de communion du prêtre… est absolument indispensable à toute mission authentique et en garantit l'efficacité spirituelle » a souligné le communiqué du Saint-Siège. « Fidélité du Christ, fidélité du prêtre » est le thème de cette année sacerdotale qui s'ouvrira par des vêpres en la Basilique Saint-Pierre où seront exposées les reliques du Curé d'Ars amenées par Mgr Guy Bagnard, évêque de Belley-Ars. Elle s'achèvera le 19 juin 2010 par une rencontre sacerdotale mondiale, Place St-Pierre. Au cours de cette année, Benoît XVI proclamera Jean-Marie Vianney « patron de tous les prêtres du monde ». Suivra la publication d'un directoire pour les confesseurs et directeurs spirituels, avec un recueil des écrits du Pape sur la vie et la mission sacerdotale aujourd'hui. En accord avec les évêques diocésains et les supérieurs religieux, la Congrégation pour le clergé coordonnera les initiatives spirituelles et pastorales qui montreront l'importance de la mission sacerdotale dans l'Église et dans la société, comme la nécessité d'accroître la formation permanente du clergé et des séminaristes. Plus tard dans l'année, Ars, ville sacerdotale, accueillera une retraite internationale pour les prêtres prêchée par le cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne en Autriche. Son organisation se fera sous la présidence de l'évêque du diocèse. « Vous qui êtes prêtres, a-t-il déclaré, vous êtes invités à participer à ce moment de reprise spirituelle. Il nous permettra d'être tous renouvelés dans notre ministère et de goûter la joie d'une rencontre fraternelle entre prêtres venant du monde entier ».

R.P. Dom Ludovic LÉCURU

article paru dans France Catholique n°3163 du 1er mai 2009


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