Ainsi, lorsque
nous avons enfin pris la résolution de porter le joug de Jésus-Christ, et de
confier à un père spirituel le soin et la conduite de notre âme, nous devons,
s’il nous reste tant soit peu de jugement et de sagesse, bien voir et bien
peser quelles sont les lumières et la prudence de celui à qui nous allons
confier une affaire d’une aussi haute importance; et, si j’ose m’exprimer
ainsi, il nous faut tout employer pour connaître le directeur que nous
choisissons, afin que nous n’ayons pas le malheur de tomber entre les mains
d’un mauvais matelot, au lieu d’un pilote expérimenté; d’un homme ignorant et
malade lui-même, au lieu d’un médecin sage et prudent; d’une personne remplie
de vices, au lieu d’une personne d’une vertu consommée, et d’un esclave de ses
passions, au lieu de quelqu’un qui en serait parfaitement délivré : et
qu’ainsi, en voulant éviter Scylla, nous ne tombions dans Charybde, et que nous
ne fassions un déplorable naufrage. Au reste, une fois que nous serons entrés
dans la carrière de la piété et de l’obéissance, nous devons absolument nous
interdire tout jugement sur le vertueux directeur que nous aurons choisi, et ne
censurer en aucune façon sa conduite, ni ses actions, quand même nous
remarquerions en lui certaines imperfections et certaines chutes : hélas, nul
homme sur la terre n’en est exempt ! En agissant autrement, nous ne retirerions
aucun fruit de notre obéissance.
saint Jean
Climaque : L'Échelle sainte
«De la bienheureuse
et toujours louable obéissance»