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Un homme affable VI.8

Publié le 13 juillet 2009 par Sophielucide

Étant donné le degré d’intimité qui liait les deux garçons, je n’hésitai plus à l’interroger au sujet de ce nouveau pseudo utilisé sur le site,  « ThrueWillWin » : était-ce une blague de potache ou bien une nouvelle stratégie quelconque ? Paul sourit un instant avant de reconnaître qu’effectivement  cette trouvaille avait été inventée la veille. Elle visait à vérifier l’hypothèse selon laquelle un nouvel  arrivant suscite immanquablement la diffusion de rumeurs en tous genres suite à la curiosité qu’il crée. «  C’est humain, après tout. Fabien était certain que vous interviendriez sur le site. Il m’a parlé de votre supposition, certes loufoque mais crédible finalement; je me suis intéressé à votre coupable idéale, Monique Massier, veuve de la victime. Et j’ai comparé les adresses IP des différents ordinateurs connectés sur le site. En fait, c’est de cela dont je voulais vous parler, c’est la raison pour laquelle j’attendais votre appel, que Fabien a simplement cherché à anticiper….

Si, comme vous le pensez, Monique Massier a bien reçu et lu la lettre écrite par Mona, il y a vingt-deux ans, pourquoi attendre autant de temps avant de réagir ? On peut supposer qu’à l’époque, elle ait simplement voulu taire à son mari une progéniture que lui-même lui défendait d’avoir. Elle devait penser qu’elle aurait finalement l’enfant qu’elle désirait, que le temps jouerait en sa faveur. Quoi qu’il en soit, elle n’a rien entamé comme démarche et l’existence de cet enfant est restée secrète. Alors, l’élément déclencheur est récent, c’est le maillon que je cherche, ce qui a précipité les évènements, vingt-deux ans plus tard.
-    Vous pensez, comme Fabien, qu’elle n’a eu la connaissance de cette lettre que récemment ? Que l’hypothèse d’une vengeance pensée de longue date ne tient pas ?
-    En effet, cela ne me semble pas vraiment crédible. Vingt-deux ans, c’est long, surtout à côté d’un homme que l’on déteste..
-    Je ne crois pas du tout que madame Massier n’aimait pas son mari, bien au contraire
-    Peut-être avez-vous raison, mais avouez qu’un tel secret dans un couple crée une faille impossible à combler avec les années, surtout s’il s’accompagne d’un interdit contre nature
-    Refuser un enfant à quelqu’un qu’on aime…Je comprends mais Charles avait développé une théorie là-dessus. Il pensait que s’entêter à peupler une planète malade relevait de l’irresponsabilité la plus crasse
-    Tout ça, c’est de la théorie ; dans la vraie vie, on cède à ses envies bassement matérielles. Procréer fait partie de ces besoins, nous sommes programmés pour cela après tout…
-    Bon, admettons que vous ayez raison sur ce point ; c’est quoi alors cette histoire d’ordinateur ?
-    J’y viens. Je suppose que Fabien vous a fait écouter le témoignage de Clotilde Nevers, réalisé en prison. Une des premières, où elle évoque son passé.
-    Oui, j’ai entendu ça…
-    Elle parle d’une thérapie basée sur l’écrit lorsqu’elle a été internée dans cette clinique, vous vous souvenez ?
-    Parfaitement, sur le conseil de son psy
-    Voilà, on y est
-    Je ne vous suis plus, là. On est où ?
-    A la clinique. Là où sont branchés des ordinateurs sur le site internet, celui-là même où se connectent deux membres, plus Clotilde…
-    Vous sous-entendez que le psy est à l’origine de toute cette histoire ? C’est dingue !
-    Non, ce n’est pas ce que je veux dire. Je suis flic, je cherche des faits, pas des suppositions qui ne tiennent que sur des présomptions.  Depuis le début de cette affaire, je trouve que les hasards font une part trop belle à cette rocambolesque histoire. Et moi, je ne crois ni au hasard, ni à aucune des nouvelles théories à la mode, synchronicité et tout le bazar… Alors je m’en tiens au tangible : j’ai deux adresses qui concernent apparemment deux patients de la même clinique où Clotilde a séjourné. Cela me suffit pour justifier ma visite à ce bon docteur Akhamlich. On y va ? »

Il s’était levé en prononçant sa question que je reçus comme une sentence qui me laissait scotchée à mon siège. Si j’avais eu Fabien sous la main, je me serai sans doute jetée à son cou pour cette idée de génie d’avoir mis Paul sur ma route. Finalement, il se montrait plus que coopératif et ce constat me rendit simplement euphorique. Je suivis Paul qui me conduisit en voiture jusqu’à la proche banlieue chic qui abritait un petit manoir caché dans un bois. Au bout d’une demi-heure de route, nous passâmes le panneau : « Bienvenue à la  clinique des Roses »


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