Magazine Journal intime

au sujet des bagages mous

Publié le 19 juillet 2009 par Tdeb

 

au sujet des bagages mous

DES  BAGAGES  MOUS...

Belle prestance, les cheveux argentés, fournis, à l’artiste, un peu longs  mais rangés bien proprement vers l’arrière, la silhouette décidée, dans un alpaga sombre et croisé, c’était une haute personnalité internationale venue d’un pays ami (ils le sont tous à les entendre jusqu’à ce que l’on soit en guerre avec eux).

Il avait conjugué l’amitié jusqu’à l’acceptation du couvert et du gîte chez un grand de notre république possesseur d’un pied-à-terre (de pas mal de pieds de terre) dans le fin fond de notre province ensoleillée.

Le visiteur portait la phrase haute et bien timbrée à l’accent seulement résiduel (montrant que l’on peut savoir parler autrement que français et pour autant parler français).

Il avait la dent claire, bien ravalée, dans un sourire aussi automatique que pour d’autres l’est  clignement de paupière ; l’homme était pourtant dans son pays un monstre sacré, « tueur » infatigable d’adversaires politiques.

Il jaillissait maintenant de la cocarde à quatre roues de son commensal au pied de l’escalier à double révolution (Ici d’ailleurs, on s’en doute, l’escalier était le seul révolutionnaire).

La valetaille s’affairait autour de ses bagages, attache case, serviettes de cuir fauve distendues par la raideur des dossiers, valises signées en pleine peau…

Soudain, de cet impedimenta, ils extraient la chose : une sorte de sac de sport, très long, cylindrique, mais désespérément mou (en fait, pas de sport du tout, ou de contorsionniste).

Ses deux anses, trop centrales, une fois agrippées luttaient bêtement contre la gravité du bissac bizarre donnant au tout un air de banane cuite saisie par le milieu.

Dali, la voyant, se serait exclamé : « ceci est l’antiphrase psychédélique et molle de la transmutation politique !»

Plus prosaïquement et par une confidence du chauffeur de cet euro master, nous apprîmes que le bagage issu du surréalisme des mieux inspirés était… le traversin de plume du boss. (Pas du gosse)

Pauvre chéri, le « tueur » ne supportait paraît-il aucun autre polochon et n’acceptait plus de recenser en nuits blanches ses déplacement obligés. Il avait donc fait exécuter sur mesure et en maroquinerie d’art cet étui dissimulant son péché de mollesse et sa familiarité avec les acariens (acariens et acariennes, la faute à qui donc ?)

Madame, à ce qu’on nous a dit, les lui offrait et en gardait un deuxième, de la même plume… (Et elle s’y connaissait en plume !)… « Mais cela ne nous regarde pas », avons-nous  précisé tout de suite au grand remisier, étant discrets par devoir et par nature.

La morale de cette affaire ? Vous choisirez :

Soit, pessimistes, vous vous rappellerez que Néron fit exécuter un esclave pour avoir oublié un pétale de rose entre le deuxième et le troisième matelas de sa litière et avoir ainsi troublé la nuit de son maître.

Soit, optimistes, vous retiendrez seulement qu’en cas de friction prolongée entre le dur et le mou, c’est toujours le dur qui perd de la matière (les vélocipédistes le savent bien : la tête de la dynamo en acier s’use plus que le latex du pneu).

Allez, salut, je quitte la plume !

 

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