Je
l'ai souvent expliqué, je n'ai aucun talent pour juger les gens au premier abord. Je suis incapable de différencier le bon grain de l'ivraie et tombe la plupart du temps des nues après avoir
côtoyé quelqu'un plusieurs temps. Ramené à la gente masculine, les dégâts sont désastreux. Il parait que l'on choisit en partie notre compagnon de vie en fonction des gènes qu'il possède et qui
sont compatibles avec les nôtres. Il y a donc un je-ne-sais-quoi en chacun de nous qui doit nous prévenir lorsque nous tombons sur une autre moitié potentielle.
Moi lorsque je te vois, j'ai les compteurs qui s'affolent. De grands panneaux lumineux s'allument en moi et
hurlent leur alarme à plein poumons. Tu m'as longtemps hanté, à plusieurs reprises et je pensais avoir réussi à t'effacer mais il m'a fallu au moins quinze bonnes secondes pour retomber plus bas que terre, pour replonger cocaïnomane de ton sourire, pour sentir les flammes de la
souffrance revenir lécher mes orteils.
Je te vois et je me dis que c'est toi. Que tu es le bon, que tu es le seul, que tu es l'unique. Et je sais aussi
que je me trompe. Je ne sais pas pourquoi mon corps me ment, pourquoi mon esprit se fourvoie, pourquoi mon coeur s'acharne mois après mois à courir derrière une inexistance d'espoir. Comment mon
intuition peut-elle autant m'induire en erreur ? Mon sixième sens a-t-il définitivement rendu l'âme ?
Je me hais pour tout ça, pour ce sentiment idiot et sans futur, pour en être des années, des mois après, encore
là, au même point, pour retomber encore et toujours dans les mêmes schémas et les mêmes spirales.
J'ai le sentiment que tu rampes sous ma peau, que ton nom s'inscrit sur mes murs, que j'expire ton parfum à chaque
bouffées et mes tripes se serrent lentement et douloureusement à chaque souvenir de toi.
J'ai envie d'arracher mon centre nerveux, de cautériser les chairs autour, d'inalher des essences pour t'oublier
et te rayer de ma mémoire.
Il ne me reste plus qu'à tout recommencer, à tout remettre en mouvement.
Ta réapparition correspond à un moment plutôt perturbé, à des remises en question déjà difficiles, à une
reconnexion lente et cahotique.
J'étais inquiète, je suis perdue. J'étais anxieuse, je suis bouleversée. J'étais hésitante, je suis
figée.
J'aimerais n'avoir jamais croisé ton regard, ton chemin, ta vie.
J'aimerais ne pas avoir à refaire à nouveau le parcours du manque, de l'oubli et peut-être de la
libération.