Magazine Journal intime

Petite nécro

Publié le 28 juillet 2009 par Lephauste

Tout d'abord on ne se rend pas bien compte, on coure, on tricote des deux. Quelques soit le temps, la nature des intempéries, des rafales de grèles aux rafales d'armes automatiques, on galope au milieu de la rue en essayant d'en ramasser le moins possible, et ceci afin d'arriver à l'heure au rendez vous, pas trop minable, pas trop troué. Juste ce qu'il faut pour rester acceptable aux yeux de celle qui de toutes les façons trouve aimable d'arriver en retard. Vous vous souvenez des leçons données par un marque de lingerie ? Leçon numéro 13 : Il vient de se prendre une balle ? Laisser le prévenir les urgences tout seul ! Mais là on est pas arrivé, encore, on coure comme je disais. Les années passent par la fénêtres, les mouchoirs sèchent, pliés en deux sur le garde-corps, les lumières s'allument puis s'éteignent puis s'allument. Les années frôlent les murs, on s'égratignent mais rien de grave, on coure toujours, on est dans la course, ouais ! Et ça fait un bien fou parfois de se réveiller au matin et de se dire : Tiens, je suis encore là ! Rompu, gazé, recousu de partout. Et elle passe, il est trop tôt, le rendez vous n'est même pas convenu, non, elle passe au bras d'un autre, une enfant lui tient la main. Ça tombe bien parce que vous aussi vous tenez la main d'un enfant et à votre bras, non, ça n'est pas elle. Allez, encore un tour du pâté de maison.

Les lumières s'allument, il pleut à souhaits des morceaux scintillants d'une chose tombée à l'instant du ventre ouvert d'un avion. C'est rien on coure plus vite, en imitant la mouche. Encore un tour, les années vous font aux épaules des ailes de papier maché. Pas des ailes pour voler, des ailes où, année après année, vous avez écrit des choses incompréhensibles, de la poésie vous disent certains, mais vous, vous savez bien que les poètes aujourd'hui ça travaille du slogan dans un ministère. Car le poète lui aussi chie, pisse, se mouche dans ses doigts et  pour se faire, comme tout un chacun, il doit croûter le poète et donc si possible se trouver un bon patron. Un mec à la cool et qui vous tutoie, de préférence. Quand il ne vous tutoie plus le patron, c'est qu'il vient de vous signifier votre renvoi. BURP ! Vous dit-il alors, avec élégance et distinction. Non, vous ce que vous avez écrit sur vos ailes détrempées c'est : Je cherche la sortie. Et encore, à la mine de plomb.

Tiens, mais là, c'est elle ... Elle est seule ? Vous la dépassez une fois, en évitant les flaques de mercure pour pas que ses jolis mollets soient mouchetés d'étoiles lourdes. Et hop ! Elle vous dit. Alors on coure plus vite. Là, vous courez plus vite. Au passage vous cassez une branche de mimosa prise au piège des barbelés électriques du camp de rétention. Et vous tournez le coin de la rue, qu'elle disparaisse pas ! A toutes jambes, allez bien haut le genou ! Haut le genou ? Vous baissez les yeux, et c'est là que ça cloche. Vous courez c'est certain, votre souffle lui aussi est court, mais sur rien, tout à coup, vous vous en rendez compte, vous courez sur rien, tout est vide; Pourtant vous la croisez une troisième fois, la branche de mimosa vous fouette le visage, elle vous regarde au travers, elle est seule encore et dans ses yeux vous lisez ceci : La sortie ? C'est par là.

Là, autant vous le dire, les amis ça sert à ça, is not pas ? A vous infliger la douleur de quelques vérités stéréotypées, héritées d'un magazine féminin, sponsorisé par une marque d"after-shave pour patron tutoyant. Là vous êtes un petit peu mort et, conseil d'ami, vous devriez arrêter de courir sur place, vous vous ridiculisez. Finissons-en.


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