Go west (3)

Bye-bye Las Vegas et ses tentations, ses féeries factices, son hymne récurrent à la chance et au dollar tout puissant.
En route pour Brice Canyon où nous attendait une compétition locale de rodéo et où les cow-boys du coin devaient monter à cru des taureaux et des chevaux quasi sauvages. Tenir plus de trente secondes sur ces bestioles relevait de l’exploit le plus authentique car il n’y avait rien à gagner pour les vainqueurs, si ce n’est la reconnaissance et le respect des autres concurrents assis là autour de l’arène improvisée dans un paysage rouge brique de folies minérales.
Alors que le soleil commençait sa descente vers l’horizon, je laissais mes deux gamins partir faire un tour d’hélicoptère au dessus de ce canyon mythique qui prenait des couleurs irréelles. Prétextant le coût élevé de cette demie heure de vol, je restait sagement sur le plancher des vaches car j’avais encore en tête la trouille bleue d’un survol de Glen canyon quelques années plus tôt.
L’avantage des locations de voitures à Vegas c’est que celles-ci peuvent être remise dans un autre Etat sans pénalité, ce qui n’est pas le cas dans tous les US. Pour traverser les montagnes arides et brûlantes nous avions délaisser notre habituelle Lincoln Town-car pour une splendide Cadillac bleue pâle dont la plage arrière supportait nos trois chapeaux Stetson.
Soudain, au milieu de nulle part, alors que l’on roulait dans un vaste espace plat, un panneau indiquait que nous entrions en territoire Navajo. Monument Valley était proche.
Les indiens Navajos ont obtenu depuis longtemps certains pouvoirs de gestion sur leurs terres et y interdisent notamment la construction d’hôtels ou de camping. Seul un vieux cow-boy, Goulding,vivant depuis toujours dans la région a obtenu le droit de construire un hôtel et un camping au pied d’une falaise de plus de quarante mètres de haut, sur un plateau qui domine encore la vallée et offre une vue exceptionnelle sur celle-ci.
Je ne l’avais pas confié aux enfants mais, de France, j’avais réservé une chambre au Goulding’s Lodge et avais aussi réservé pour eux une expérience extraordinaire: passer deux jours et une nuit en randonnée équestre dans cette monumentale vallée. Julie faisait partie de l’équipe de saut d’obstacle d’un club de Roubaix et avait fait de nombreux stages de parcours complet en Normandie. Elle se tenait sur un cheval comme si elle était née dessus, toujours volontaire pour monter un cheval récalcitrant ou nerveux. Matthieu, quant à lui, dans le même club s’obligeait à monter de la façon la plus académique.
Leur permettre de jouer comme John Wayne dans «　la chevauchée fantastique　» au milieu de ce décor grandiose, tel était mon intention. Le rendez-vous était tout proche du célèbre John Ford Point. Là, une famille d’indiens Navajo élevait des chevaux et organisait des randonnées à l’indienne, avec campement au cœur de la vallée, feu de bois, cercle de feu anti-scorpions et crotales. Bref, des vrais pros.
Je n’avais oublié que quelques petites choses. Tout d’abord les selles et harnachements n’avaient rien à voir avec nos montes britanniques, c’étaient des selles mexicaines à pommeau de cuir et les étriers étaient larges comme des pédales de vélo. Par ailleurs, les chevaux étaient en fait des «　broncos　», animaux solides et très vifs, enfin j’avais cru que les indiens fournissaient le couchage. Il n’en était rien!
Guidés par un vieux grand père accompagné de deux de ses petits enfants, la petite troupe composée de quatre autres personnes descendit vivement vers la vallée et disparut dans le lointain.
Profitant de cette nuit de tranquillité, je décidais de me lever à quatre heure du matin pour pouvoir, du balcon de ma chambre, faire des photos du soleil levant sur un paysage connu du monde entier .Au pied de l’hôtel, alors j’attendais le soleil, un énorme chat sauvage essayait d’ouvrir une poubelle.
Les enfants que je récupérais le lendemain soir étaient couvert de latérite rouge et des années plus tard alors que je demandais le souvenir qui les avait le plus marqué pendant ce voyage, ils me répondirent sans hésiter et tous deux en même temps : «　Monument Valley car on était dans le film !　» Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu