Mon cher Victor,
Mercredi après-midi, j'ai fait ma première heure de conduite depuis mon passage raté. Inutile de te dire que je l'appréhendais beaucoup... Tu sautes des étapes,
Mirabelle : tu ne nous as que très peu parlé de ton changement d'auto-école ! Parce qu'il n'y a pas grand chose à en dire. J'ai trouvé une autre auto-école, dont j'avais entendu
beaucoup de bien, et dont j'avais vu le moniteur en situation : jamais énervé, toujours à rassurer ses élèves. Bref : la perle qu'il te fallait ! Je
crois, oui. Cela a-t-il eu les effets escomptés sur ta conduite ? Comme tu y vas...
D'abord, j'étais très tendue. Quand je suis rentrée chez moi, j'ai retrouvé des sensations de douleurs dans le pied, au niveau des muscles, comme lors de ma toute première leçon de
conduite. Heureusement, la comparaison s'arrête là ! Aah ! J'entrevois une lueur d'espoir dans ce que tu dis ! Tu peux. J'ai fait quelques
bêtises mais... Globalement, la leçon s'est bien déroulée ! Et déjà, je sens que je comble des lacunes. Des lacunes ? Tu en as encore ? Après je ne sais combien
d'heures de conduite au compteur ?
Le moniteur a voulu me faire faire une marche arrière en angle de rue. J'ai eu l'air complètement effarée : "Je n'en ai jamais fait !". Quoi ?! Mais cela fait
combien de temps que tu es sur ce fichu permis, Mirabelle ? Bien deux ans ? Plus de deux ans ! En deux ans, tes moniteurs ne t'ont jamais fait faire
cette manoeuvre ?! Jamais ! Je peux te l'assurer ! Tssss... Ca en dit long sur la qualité de l'enseignement prodigué là-bas, tiens... Tu as bien fait
de partir ! Plus j'y pense et plus j'en suis convaincue !
Bref. A aucun moment ce moniteur ne m'a engueulée. Et quand je paniquais face à mes erreurs, il avait recours à une arme qui me plaît tout particulièrement : l'humour. A la fin de l'heure, il
rend son verdict : mes entrées et trajectoires dans les ronds-points ne vont pas, j'ai du mal avec les créneau, et l'insertion sur le périphérique est à revoir. Il ajoute : "Ce sont des
choses qui ont sans doute été faites mais qui n'ont pas été terminées.". Moi, rouge comme une tomate, suant comme un boeuf, je bafouille : "Mais euh... Globalement, c'est pas la ca... Enfin, ça
va, quoi ?". Il sourit : "Tu allais dire "ce n'est pas la catastrophe ?", c'est ça ?". J'explique : "Disons que j'ai pas mal perdu confiance en moi et...". Soudain, les larmes me montent aux
yeux, en même temps que l'envie de me gifler moi-même. Et puis je me reprends. Surtout que j'ai l'air d'amuser mon moniteur plus qu'autre chose : "Alors ne t'inquiète pas. Tu peux
reprendre confiance en toi. Vraiment."
Cette dernière phrase m'a fait un bien que tu n'imagines pas. Siii ! Non, non, tu n'imagines pas ! En sortant, je me sentais légère et sereine.
Confiante. Rassurée. Je me disais : "alors je ne dois pas être si nulle que ça...", en décidant d'oublier les paroles de l'Inspecteur lors de mon troisième passage. Alleluïa ! Te voilà en route pour le succès ! Doucement, Victor, doucement. Ce qui m'importe, pour l'instant, c'est d'effacer ma honte et de repartir sur de
bonnes bases. C'est en cours, c'est en cours ! Oui. Et je suis plus revigorée que je ne l'imaginais. Je n'ai plus à passer devant mon ancienne
auto-école. Je n'ai plus mal au ventre en y pensant. Je suis juste soulagée. Soulagée de ne plus en faire partie.
Tiens, avant de te quitter, juste pour la petite histoire : dans ma petite ville, mon ancienne auto-école a la pire réputation qui soit. Et j'ai appris la semaine dernière que le vieux
moniteur qui m'avait pour élève, avant que je ne récupère mon dossier, n'a pas une bonne publicité. Il est connu pour ne pas être DU TOUT pédagogue et pour "gueuler" sur ses élèves.
Tu as été surprise ? Non. Même pas. En revanche... En revanche ? En revanche, j'ai été contente.
Contente ? De quoi donc ? Contente de savoir que je ne m'étais pas fait de film. Que cette auto-école est rééllement une calamité. Il y a une seule
chose que je regrette. Une seule. Ah ? Ne pas m'être barrée de là plus tôt.