Gilles, tu es éditeur depuis un bon bout de temps et tu es très impliqué dans ce milieu.
Tu es quelqu’un de cash qui aime la vie, en profite tout ayant conscience des difficultés du quotidien.
Il y a une raison qui explique ton envie permanente de vivre au travers de tous tes sens ?
Oui, la peur de la mort ! Comme je ne suis pas très croyant (en fait pas du tout...), et que je ne suis pas James Bond, je suis convaincu qu’on ne vit qu’une fois et qu’il faut en profiter au maximum...
Par ailleurs, je suis un être qui vit plutôt dans l’excès que dans la mesure et cela explique la façon dont je vis et les relations qui en découlent...
Enfin je suis totalement allergique à l’hypocrisie et aux faux semblants, je ne crois pas vivre très différemment de la majorité des gens, je crois simplement que j’assume ce que je dis et ce que je fais et les autres pas.
Ni dans ce qu’ils sont, ni dans ce qu’ils font et donc à fortiori dans ce qu’ils montrent d’eux.
Je suis comme tu me connais et je ne cherche pas à être ce que les gens voudraient que je sois, on vit pour soi, pour les gens qu’on aime et pas pour le regard des autres !
Plus je vieillis et moins je supporte les gens qui vivent dans l’importance de l’image d’eux que l’on pourrait avoir !
Je vis ainsi pour faire mentir la phrase d’Alfred de Musset dans « Le roman par lettres » :
« Dis-moi un peu d'où vient cette manie de n'être jamais ce qu'on est ? » !
Nous nous connaissons depuis 3 ans et tu as toujours été d’une extrême gentillesse à mon égard et à l’égard de mon mari.
Pourtant je ne suis rien, ni parisienne, ni fille de…, ni riche et je ne gagne rien en travaillant dans ce milieu. Tu avoueras donc que cela me semble logique de parler de ce qui s’est passé au mois de juillet tant les jugements hâtifs et démesurés m’ont choqués !
C’est pourquoi je voulais t’offrir cet espace, pour te permettre de dire ce que tu avais envie de dire sincèrement et sans langue de bois.
Et si on me taxe encore de copiner pour être publié, j’assumerai sans souci mon amitié envers toi. Dans un milieu professionnel on fait de belles rencontres et tu en fais partie.
Donc… cet été un buzz issu de la diffusion de l’émission Streap-Tease a été relayé sur quelques blogs.
On t’a jugé, on t’a salit, voir même parfois insulté et jusqu’ici tu n’as rien répondu.
Courageux ?
Non absolument pas ! Cela n’a rien à voir avec le courage. La seule réaction que j’ai eue concerne un commentaire sur Héloïse dont je ne supporte pas qu’elle soit ainsi traitée...
Pour le reste il n’y a eu aucun courage d’aucune sorte à ne pas répondre à l’ensemble des abrutis qui n’ont rien d’autre à faire que de passer leur temps sur internet !
Je voulais avant tout savoir pour quelles raisons tu avais accepté de participer à ce tournage et ce que tu souhaitais faire passer comme message ?
J'ai accepté de faire cette émission parce qu'à l'origine elle devait parler d'édition!
Il y a eu 11 jours de tournage, il y a donc 88 heures de rush...! Je savais absolument qu'il s'agissait de Strip-tease mais je pensais que cela serait centré autour des différents aspects du métier. D’ailleurs il a été tourné des scènes en réunions commerciales, chez des libraires, dans des salons du livre...
Bien entendu je n'ai pas vu l'émission avant sa diffusion car je n'aurais pas accepté que des auteurs soient ainsi traités par moi certes, mais surtout devant des dizaines de milliers de gens. Par ailleurs, je ne trouve pas cela intéressant du tout cette approche pseudo people..! C'est donc un portrait semi vrai, semi faux, surtout de moi, du métier et de ma manière de l'exercer! Encore une fois je regrette énormément que les séquences avec les auteurs aient été ainsi montées et diffusées...
Cela étant l'excuse n'efface pas l'offense et très honnêtement, je regrette non seulement ce que je dis et montre mais surtout de m'être prêté à ce jeu ridicule sans l'assentiment d'Héloïse et cela depuis le premier jour ! J'ai donc perdu, deux auteurs, deux amis et un peu de crédibilité... Très cher payé pour une connerie !
Je crois avoir répondu aussi sincèrement que possible !
J’ai assisté à un morceau de tournage et personnellement je t’ai senti à l’aise, dans ton élément. Lorsque les caméras te filmaient constamment, est-ce que tu les oubliais ou est-ce que tu en jouais ?
Les caméras, plus exactement la caméra faisait partie du décor, comme le reste. Je ne l’oubliais jamais et j’en jouais un peu, mon côté cabot mais absolument pas celui que les gens ont cru voir dans le déjeuner avec Max...
Est-ce que tu as la sensation d’avoir représenté le milieu de l’édition ou juste ce que tu es ?
Non, je n’ai jamais eu la prétention de représenter l’édition même si mon premier métier dans ce métier a été représentant... Je ne voulais représenter, « représenter » n’est d’ailleurs pas le terme exact, je ne souhaitais que montrer la façon dont, moi j’exerce ce métier.
On te voit taquin, on te voit aussi pernicieux, tu cherches des solutions pour permettre à la maison EHO d’avancer encore un peu plus mais on te voit souvent agir seul. Héloïse semble plus rigoureuse et sans doute plus exigeante, est-ce une répartition du travail ? L’alliance de la fantaisie et de la rigueur ?
C'est une répartition des rôles qui n’était pas celle que nous avions imaginé au départ mais qui en réalité reflèteparfaitement à ce que sont nos personnalités.
La rigueur et le sérieux pour Héloïse et le déconnage pour moi ...
Mais contrairement à ce qui a été dit de manière un peu violente s’il y a une chose que je ne fais jamais c’est me prendre au sérieux ! Ce métier est une pratique quotidienne de l’humilité !
Si nous savions (tous éditeurs confondus) faire des livres qui se vendent cela se saurait ! La réalité c’est qu’il n’y a que des livres qui ne se vendent pas, cela devrait inciter certains à réfléchir...
Les auteurs filmés ont-ils vu les scènes avant la diffusion ?
Non ! Personne n’a rien vu ! Si j’avais vu le montage, je pense que je me serais opposé à sa diffusion. Personne ne peut accepter d’être vu dans la situation dans laquelle ont été vus Éric et Richard ! Rien ne justifie cela !
Est-ce que tu as eu des reproches de la part de ton entourage suite à cette diffusion ?
Bien entendu ! De la part de beaucoup de gens à commencer par Héloïse qui était contre depuis le début ! Le plus difficile dans cette histoire est d’avoir été montré sous un angle qui n’est qu’une facette (et pas la meilleure !) de moi et d’avoir perdu deux auteurs et deux amis...
Penses-tu que pour être publié il faille « copiner » ? Qu’en est-il de la légende du manuscrit reçu par la poste ?
« Copiner » ne sert à rien, « piner » peut-être... Là je suis fidèle à ce que les gens disent de moi en ayant seulement vu l’émission et en ne me connaissant pas...
Bien sûr que non cela ne sert à rien de « copiner » chez moi, d’ailleurs personne (moi y compris) ne peut dire qu’il n’a jamais publié pour faire plaisir...
La légende du manuscrit reçu par la poste est vraie...sinon ce ne serait pas une légende ! Il se trouve que recevant 3 000 manuscrits par an la proportion de ce qui est publié en étant reçu par la poste est chez moi de 3 pour mille c’est à dire un par an...
Que penses-tu des anonymes qui ne cessent de te critiquer cachés derrière un écran alors qu’ils n’ont qu’une vision tronquée et éphémère de ta vie, de ton travail ?
Honnêtement ? Très majoritairement une bande de frustrés aigris qui ne savent de quoi ils parlent. Ni du métier d’éditeur, ni de la littérature, ni de la réalité économique... des ratés qui n’ont jamais réussis à faire publier leurs manuscrits et déversent leur bile sur le premier éditeur qui passe... En gros rien de grave, déplaisant mais pas grave...sauf le commentaire suivant que vais te livrer brut et qui ne me concerne pas, celui là je ne laisserai pas passer.
« 19. Le samedi 1 août 2009 à 19:49, par stupidity
Je connais le dossier H²O-GCS d'assez près... Et je peux dire que ce qui persiste à me fasciner, c'est qu'Héloïse continue à intéresser les gens... Hé! c'est pas parce que c'est la Paris Hilton des Lettres Françaises labellisées "pur Figaro" que c'est une fille intelligente, cultivée et compétente... Elle n'a pas lu un manuscrit depuis des années, et peut-être même pas du tout un livre depuis presqu'aussi longtemps. Elle est toujours dans le job, parce qu'il y a encore des tas d'imbéciles (dont les auteurs qui se pâmeraient pour être publiés par elle) qui s'imaginent que le charme (à défaut du talent) se transmet dans les gênes... et son père, ah son père, il est si charmant avec ses yeux bleus rieurs et son sourire de gentil tonton polisson et spirituel... Il y a encore des tas d'idiots pour crever d'envie d'être invité aux dîners de crétins qu'H²O donne dans son appart du 5è arrondissement (ouaaaaahhhh! ch'uis invitée chez la fille de d'Ormesson, samedi, trop la classe!!!) - appart qu'elle paie naturellement avec les 2500 euros qu'elle se verse chichement chaque mois, évidemment! Croyez-moi, la vraie peau de vache, c'est elle. Lui, c'est le bouffon qu'elle a ramassé dans un bistrot et qui lui sert d'écran à sa bêtise, sa méchanceté et son incompétence. Conclusion, si vous êtes nulle, goujate et bête, faites-le oublier en prenant un mec qui le soit tout autant que vous et qui ait une grande gueule en supplément. Plus un bon coup de coude!A part ça, inutile d'aller s'auto-éditer, à moins de vouloir absolument se faire escroquer. 95% des éditeurs français sont des gens qui font bien leur métier... Encore faut-il que les milliers d'écrivains qui leur envoient des manuscrits puissent admettre que bien faire son métier, ce soit aussi refuser de les publier... eh oui, sorry, c'est la triste vérité, certes difficilement audible pour qui a passé ses journées et ses nuits à écrire un roman : le monde se passe parfaitement des écrits sans génie dont la boîte postale des maisons d'édition est quotidiennement gavée jusqu'à l'indigestion!
Ce commentaire là est insultant pour Héloïse. Moi je prends les risques et je les assume mais celui ou celle qui écrit se cache derrière un pseudonyme qui devrait être simultanément son prénom et son nom de famille n’est pas l’illustration absolue du courage et de l’intelligence...
En gros c’est même l’illustration de l’inverse !
On peut dire ce que l’on veut de moi mais on ne touche ni à ma femme pour qui j’ai un respect et une admiration sans limites, ni à mes enfants...
Ce commentaire là aura forcément des suites...
Pour toi le métier d’éditeur, c’est quoi ?
Éditeur ce n’est pas un métier, c’est un mode de vie. C’est peut-être le seul aspect positif de l’émission que d’avoir montré que nous vivions l’édition à chaque instant de notre existence...
D’ailleurs si c’était un métier il y aurait une école pour l’apprendre, or il se trouve qu’il n’y en a pas...
Maintenant techniquement c’est repérer un texte, un auteur, en faire un objet beau et intelligent, mener une réflexion sur la commercialisation et la promotion, parler aux journalistes mais pas trop, être en contact avec des agents pour les livres étrangers mais ne pas être dépendant d’eux, c’est juste respirer, parler, manger, boire , rêver édition toute la journée et toute la nuit !
C’est voir les libraires, les commerciaux, prospecter de nouveaux auteurs, garder ceux qui sont chez nous, bref c’est une vie à temps complet : être éditeur !
La boutique ne ferme jamais ! Et si on veut être en contact avec des Australiens ou des Sud Américains il faut travailler aussi la nuit... Et on le fait et on est heureux !
Tu penses réellement que cette émission a porté préjudice à EHO ? Que les lecteurs s’arrêteront à une diffusion plutôt qu’au contenu des ouvrages publiés, plutôt qu’aux talents des écrivains ?
Non, je ne pense pas. Les réactions des gens que je connais, y compris dans le milieu, ont été bonnes. Il faut relativiser dans 10 jours tout le monde aura oublié cette émission...En dehors des abrutis qui tourneront en boucle sur Internet mais ceux là, ils m’en gratouillent une sans chatouiller l’autre !
S’il fallait recommencer, tu le referais ?
Non, en tout cas pas sans savoir ce qui sera diffusé et encore une fois, je ne parle pas de moi, mais des auteurs, en particulier Richard et Éric.
As-tu un message à faire passer ?
Je voudrais m’excuser auprès de ceux qui ont été blessés par cette émission ou qui se sont sentis trahis...
Pour le reste comme le dit Al Pacino :
« La perception qu’ont les autres de ma personnalité ne me concerne pas »
Et puisque tu as eu la gentillesse de m’accorder cet espace je finirais par une vraie phrase de vraie littérature :
"Déplaire est mon plaisir. J'aime qu'on me haïsse." Edmond Rostand dans « Cyrano de Bergerac ».