Ces derniers temps, je dois reconnaître que les soirées entre filles, ça ressemble un peu à des "soirées caserne". Je crois qu'une armée de légionnaires qui reviendrait d'une mission de six mois, sans aucune femme à l'horizon, serait beaucoup plus glamour que nous... et le pire, c'est que ça nous fait hurler de rire... et qu'on adore ça ! On dit des énormités, en terminant nos phrases par des "rhoooooooooo !", comme si on n'assumait pas du tout... Mais, en fait, nous sommes un peu comme des enfants qui disent des gros mots : on aime ça !
Est-ce qu'un homme pourrait comprendre que nous sommes les spécialistes des coups de téléphone qui durent des plombes pour pas grand chose, au final ? Est-ce qu'un homme comprendrait qu'on saute partout parce qu'on est contente que ça frétille dans la vie sentimentale et/ou sexuelle d'une copine ? Est-ce qu'un homme comprendrait pourquoi l'une donne aux autres la "capote de l'amitié", celle qui attire le mâle parce qu'elle est pleine d'énergie sexuelle ? Est-ce qu'il comprendrait qu'une copine envoie une photo de ses nouvelles merveilleuses paires de chaussures par MMS à ses amies ?
Est-ce que ça semblerait totalement invraisemblable qu'on soit littéralement impatiente d'être à cette soirée filles prévue en septembre ? Une soirée filles, comme à l'époque où nous étions étudiantes, et où mon studio avait servi de décor : un moment où on avait fait les dindes en se maquillant pour des faire des pubs pour Ripolin, en se crêpant les cheveux pour faire années 80, en se faisant un trip baba cool, en abusant de tout un tas de de bonbons, douceurs et champagne ? Un homme pourrait-il ne pas être effrayé par ça ? Je n'ai qu'à me souvenir la tête de mon meilleur ami qui était passé nous faire un bisou rapide ce jour-là : il n'en revenait pas... Je doute même qu'il s'en soit remis... Donc, un homme ne pourrait que fuir à toutes jambes...
Et puis, il faudrait assumer d'être au téléphone, avec l'homme, en version glamour, avec la petite voix de femme qui joue la carte de la séduction, quand une copine se met à crier, derrière : "heyyyyyyy, tu fais quoi ? Tu fais caca ?" (célèbre référence à "j'peux pas, j'ai la diarrhée"!)... ou qui, parce qu'elle vous entend jouer l'amoureuse éplorée au téléphone, fait exprès de vous téléphoner en même temps pour vous embêter avec le double appel. "Non, c'était juste pour vérifier que tu étais bien en ligne !"...
Oui, nous sommes des gamines. Oui, on a 14 ans parfois... et encore... Mais qu'est-ce que c'est bon !... Nous sommes mères pour certaines, mariées pour d'autres ou célibataires, profs pour quelques unes, (toutes ne sont pas passées du côté de la force obscure), mais nous avons gardé en commun cet état d'esprit où on peut tout dire, où on peut rire comme des niaises sans être jugée par les unes ou les autres. A côté de ça, on aborde aussi des sujets beaucoup plus personnels, intimes, on se conseille mutuellement, on serre les rangs de la "brigade du coupe-ongles" (on fantasme sur le fait d'aller découper au coupe-ongles les hommes qui auraient fait souffrir les copines)... Bref... nos moments filles sont bien remplis... Et je crois que nous en avons besoin pour échapper au quotidien de maman, épouse et autre wonder woman que nous sommes presque tous les jours. Ce sont nos bulles d'oxygène à nous, qu'on se réserve... et qu'on espère bien se réserver encore si un jour nous avons un amoureux, pour les célibataires (mais un amoureux chacune, pas le même !)... (enfin, en même temps, on n'a pas du tout les mêmes goûts...)
Alors, c'est vrai que si l'une d'entre nous devait présenter un nouvel amoureux aux autres, ça risquerait d'être coton. Non pas que les unes doutent des capacités des autres à savoir faire bonne figure pour une première rencontre, mais on sait que ce sera un cap important à passer. Comme me disait Nan, "si j'avais un mec qui n'assurerait pas la conversation avec toi et qui n'aurait pas suffisamment d'humour pour comprendre nos délires, je crois que ça serait mauvais signe...". Et elle a raison. Ce n'est pas que les avis des copines comptent plus ou moins qu'un éventuel amoureux, mais si un homme était totalement étranger à notre humour, s'il était choqué par les adolescentes qui sommeillent en nous, si il posait un regard dédaigneux sur tout ce qui nous unit, que nous partageons et qui fait que nous sommes ce que nous sommes aujourd'hui, je crois que je saurais très vite que je ne pourrais pas l'aimer comme j'ai envie d'aimer...