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La mode, le luxe et la crise

Publié le 30 août 2009 par Michelgutsatz

Deux exemples récents nous montrent que la situation économique impacte directement les business models dans la mode et que s'ouvre pour elle une période de grands bouleversements:

  1. Shirt.190 Brioni, marque de mode italienne, s'est construite autour de deux éléments centraux: le costume fait sur mesure ("made-to-measure formal wear") et l'exclusivité - comme en attestent sa signature "To be one of a kind" et ses prix (ses costumes sont vendus entre $4 000 et $ 47 000). Le New York Times du 11 août 2009 nous apprend que Brioni lance.. un tee shirt. Nous sommes loin des racines de la marque: certes ce tee shirt sera vendu $250, mais nous sommes dans le "casual" et absolument plus dans le "sur mesure". Brioni qui a "inventé" la mesure semi-industrielle dans les années 60 (comme Charvet pour les chemises) s'éloigne dangereusement de son territoire d'origine pour se rapprocher des autres marques de mode... Une nouvelle génération prend le pouvoir chez Brioni et espère ainsi élargir la base clientèle en développant le casual wear à hauteur de 50% du CA. Suggestion: Brioni ne pourrait-il pas proposer du "casual" en "made to measure"? Un tee shirt reste un tee shirt, même signé Brioni.
  2. Le Wall Street Journal du 30 juillet annonce que Saks et Bloomingdale's (re)lancent des marques propres de lignes de mode masculine. Saks lance ainsi "Men's Collection" et Bloomingdale's  lance "Bloomingdale's: The Men's Store" (marque qui remplace "Joseph & Lyman" et "Metropolitan View"). Ces initiatives convergentes sont intéressantes pour trois raisons principales:
  • Les deux "Department Stores" affrontent frontalement les marques de luxe et les marques de designers qu'elles ont contribué à lancer sur le marché américain: ils sont vraisemblablement persuadés que le marché de l'homme peut être plus facilement investi par des marques de distributeurs et ils le font sous leur propre nom. Les marques de luxe vont souffrir sur ce marché.
  • Ils proposent ces lignes à des prix 30% à 40% inférieurs aux prix des marques de designers et de luxe: la crise économique a bouleversé les repères prix des consommateurs et les "Department Stores" y ont largement contribué (voir mon post du 15 mars sur les soldes à -70% chez Saks). Saks et Bloomingdale's bouleversent leur business model en faisant le même raisonnement que les marques de luxe il y a 15 ans: "supprimons un intermédiaire et gardons la marge entière pour nous".
  • Ils font appel à des sous-traitants qui leur permettent d'offrir des produits de qualité à leurs clients: Todd & Duncan pour le cashmere, Loro Piana pour les manteaux... La force des marques propres dans la mode va se trouver dans la nécessité pour certaines marques de luxe de petite taille de trouver de nouveaux clients.. chez les distributeurs par exemple.

Le 21ème siècle ne fait que commencer: il va être passionnant.


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