Magazine Journal intime

Agra Hotel

Publié le 01 septembre 2009 par Alainlecomte

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Un dessin s’efface. Celui-ci date de juste douze ans. C’était un 1er septembre et c’était à Agra, India. Les gros lézards verts escaladaient les murs de notre chambre sans fenêtre et nous venions de Delhi emmenés par un chauffeur qui se prénommait Lashkar : il nous conduisait dans tous les aspects, prétendant nous faire aller dans les hôtels où il avait un intérêt. Sa lourde Ambassador tanguait sur la route trop étroite où il fallait slalomer entre les vaches, les buffles et les montreurs d’ours. L’un de nos premiers voyages en Inde… nous étions étonnés de cette faune parcourant les routes. « Pourquoi, vous n’avez pas ça chez vous ? D’animaux sur les routes ? -vous les avez tous mangés ? ». On rigolait jaune avec Lashkar. Il n’aimait pas Gandhi. Il n’aimait qu’Ambedkar, dont on voit souvent la statue sur les places des villages, car lui seul au moins voulait combattre le système des castes et libérer les dalits. Il se moquait de nous aussi. Quand nous parvenions à lui arracher la possibilité de dormir là où nous le voulions (comme à Jaipur et plus tard à Pushkar), il nous faisait culpabiliser toute la journée car, disait-il, à cause de nous, il avait dû passer la nuit dans la voiture… A Agra, il y eut un incident. Nous étions entrés dans une auberge et pendant que nous sirotions un lassi, il y avait eu un coup de feu dehors. En sortant nous vîmes un attroupement autour… d’un énorme serpent mort. Il était dans les arbres et aurait pu se jeter sur n’importe qui. Un de ces serpents qui vous tue un cheval en moins de temps qu’il n’en faut pour hennir de douleur. Agra, c’était bien sûr le Taj Mahal, pour y accéder il fallait négocier avec des conducteurs de bus attitrés, toujours prêts à nous soutirer le maximum.

Au matin du premier septembre, dans cet hôtel déglingué aux Ambassador fatigués, les rares touristes et les préposés au petit déjeuner s’agitaient autour du récepteur télé. Dans une image glauque, style aquarium sale, on distinguait vaguement des vues de Paris… Qu’est-ce qui pouvait comme ça tant les intéresser qui s’était passé à Paris ? Puis une carcasse d’automobile de luxe. C’était la mort de Diana qui les absorbait autant.

Et moi j’avais un petit haut le cœur en voyant tomber sur ma tartine de beurre fondant un gros cafard noir venu du plafond.


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