Il y a des matins, on y pense longtemps, longtemps à l'avance, et puis ils arrivent, et puis ils ne ressemblent pas du tout à ce qu'on avait imaginé. On n'imaginait pas grand chose, en même temps. C'était juste une date cochée sur l'agenda, qui faisait gong dans les oreilles, une date qu'on pensait ôh là là et puis voilà.
La date de la rentrée. Sept lettres. Rentrée. Collège. Sept lettres.
D'abord il pleut ici en Lorraine en ce jeudi.
Ensuite les affaires de classe n'étaient pas prêtes et il a fallu se hâter au sortir des céréales. Quant à la nuit précédente, que nous redoutions tant, gars de onze ans est du style à ne pas bien dormir quand un lendemain différent se profile, s'est bien passée. Très bien même. Une bonne nuit. Douze lettres.
Il y a des matins, finalement, on se dit qu'ils sont historiques et puis c'est tout. On boit son café comme tous les matins et l'on comprend. Ce matin n'est qu'un prélude. C'est la journée qui sera forte. Forcément. Neuf lettres.
Le moment devenu réalité s'est mué en passage, surtout pour le papa et la maman dont l'aîné va faire sa première rentrée au collège. Qui savent et qui ne savent rien. Des parents, quoi. Leur histoire est passée par là. Celle de leur enfant s'écrit.
Collège. Sept lettres qui ont agité les neurones parentaux depuis que l'école primaire a fermé ses rideaux. Elle les garde ouverts pour gars de sept ans, toutefois. Trait d'union.
Sept lettre pour la rue d'à côté. Le bâtiment d'en face. On quitte un dedans connu. On va découvrir un dedans que l'on ne faisait qu'apercevoir. Autre monde. Celui des plus grands dans lequel notre grand va devenir un des petits.
Sept lettres chargées comme des baudets. Sept lettres.
Collège. Passage. Changement d'échelle.
Ce matin est juste un matin. Ce jeudi juste un jeudi. Et pourtant.