Magazine Journal intime

Premières décénies

Publié le 05 septembre 2009 par Lephauste

On ne naît pas ni ne meurt sans que la même gestation ne s'opère, dans un cas, comme dans l'autre. Se souvenir de la première sûrement aiderait à endosser la seconde, sans trop emmerder son monde. Car le monde vous aime tant, que tant que vous ne lui poser pas trop de questions, il vous aime. C'est à dire qu'il s'acclimate peu à peu à votre présence et parfois vous marque de l'affection, en vous marchant un peu sur les pieds. Au delà, comme je l'ai lu quelque part, lors d'une des nombreuses rentrées littéraires que j'ai regardé passer comme un bovin regarde passer et repasser le  balancier métronomique du merlin, au delà votre ticket n'est plus valable. Ne tenter pas d'offrir des fleurs à la saison des trouilles, vous risqueriez d'avoir à les jeter sur le premier corbillard qui passe. Et il en passe. Ne tenter pas d'enjoliver le tableau, la dorure du cadre vous en resterait aux mains et l'on vous accuserait d'avoir, comme Brassens, décelé sous le vernis craquelé le désastre d'une croûte de trop, et d'être tenté de n'emporter que le crochet, afin de le fourguer à un férailleur, qui par ailleurs fut un de vos amis. Du temps où il se grandissait en vous aidant à rester ce que vous étiez, une sorte de gestation de manchot morveux.

Naître n'est pas aisé, le passage est à l'étroit, et la laisse ne se laisse pas rompre, jamais. Allez-y avec les dents, vous verrez, c'est d'une elasticité, ça prend des allures d'éplorée, ça vous aime pas tout à fait achevé. mais ça finit toujours, au bout du fil par vous expulser. En jurant naturellement que c'est pas Dieu possible, qu'on aura jamais la paix. Naître ? Ça fait bien près de cinquante ans que je m'emploie à y parvenir. Je vous fais rire ? Ça vous repose de vos propres tentatives. Mais toujours on me rappelle : Tu penseras à appeler Maman ! J'y pense mais ma piété filiale se heurte à des obstacles. Et parfois même des invisibles. V'lan ! Celui là je l'avais pas vu venir. Serait-ce que je n'aime pas ma mère ? Profondément si. Si profondément que cet amour oscille sans cesse entre les serre-livres de la haine et de la passion inavouable. Ces deux-là sont infiniment indissociables même si dans l'espace qui les sépare végètent les chefs-d'oeuvres de la littérature contemporaine, de l'art de consommer et de l'art de vivre réunis en un épais volumes constitués de toutes cartes parfumées que je n'ai pas envoyées pour la fête des pères. Une mère c'est toujours un mystère, on a vécu dedans pourtant. on devrait en reconnaître, une fois qu'on en a fait le tour dans les bras de tout un chacun qui nous aime (voir plus haut), tout ce qui se trouve à l'ombre et que l'on comprend mieux quand c'est à la lumière des apparences. Du convenable possessif. Et je ne parle pas de celles qui sont de vos proches et qu'un instinct sûr les pousse à vous jeter du pré carré des aréoles, quand votre âge marque un sevrage problématique. celles là m'inspire, tant sont ciselés les discours, des réflexions à propos de mes doutes sur une quelconque évolution du genre humain. Chez elles la laisse est passée par bien des théories où la psychologie mercantile s'est débarassées de ses vieux kit de survie.

Mourir. Mourir n'est pas plus simple mais comme je ne me décide pas vraiment, que je n'ai à vrai dire pas encore fini de faire mon tour du jardin de mes amours, je pense en vaniteux, que je vais essayer d'attendre que l'ouverture du col soit à son optimum et que Saint qui vous voudrez ait réussis à passer son diplôme de sage-homme.


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