Moment de grâce un certain samedi soir à Namur : Benoit met un de ses vieux CD en fond sonore et, installés confortablement, nous lisons des poésies…
J’ai à ce moment-là un sentiment de sécurité et de bien-être, comme si, après un très long voyage, j’étais enfin de retour au pays…..
Nostalgie ? Ou même ‘Saudade’…. Il me revient en mémoire, un autre week-end, à Londres cette fois, il y a une quinzaine d’années, lorsque le même Benoit y résidait et que j’étais allée lui rendre visite… C’était déjà ce CD comme fond sonore : il venait de découvrir l’artiste et je m’étais évidemment empressée de me procurer l’album.
Depuis, cette musique a souvent accompagné nos soirées et si je suis seule au moment de l’écoute, je ne peux m’empêcher de penser à nos 20 ans, Londres, nos rêves, nos goûts et nos espoirs de l’époque.
Je crois me souvenir qu’ils n’étaient pas bien différents de ceux d’aujourd’hui…
Dans le train du retour de chez l’ami Ben, d’autres musiques dans mes oreilles. Je m’étonne, à leur écoute de voir affluer, selon le morceau, des pans entiers de ma vie, ou alors de simples petits moments isolés.
Ainsi, quand j’écoute les premières notes de ce morceau, je me revois dans la piscine à Pont Blondin, à garder le silence, car Karim pleure près de moi…. c’était le morceau dont il partageait l’écoute avec une amie, trop tôt disparue. Nous n’avions pas 18 ans…
Quand je repense à la période où un proche nous a quitté, je me revois, comme dans un film, roulant furieusement à travers le Brabant Wallon dans ma vieille Opel. Je n’avais pas encore de permis, mais pas peur de la vitesse non plus et en sono et à “fond de balle” l’album “Paris Sous les Bombes”. J’avais l’impression à l’époque, que c’est ma vie qui était sous les bombes…tout n’était pas si facile….
Et voici cet autre moment, quelques années plus tard, arpentant pendant trois semaines les plages de l’une ou l’autre île des Philippines.
Je me rappelle m’être décidée à la dernière minute pour ce voyage (oui, c’est une vieille habitude!) et ce n’est qu’à l’aéroport de Zurich, où je prenais ma correspondance pour Manille, que je me suis occupée du poste ‘musique’.
N’ayant pas beaucoup d’argent, j’ai acheté un “Walkman”. Cet achat effectué, il me restait à peine de quoi acheter un seul et unique album. Quel serait, parmi l’offre du disquaire de l’aéroport, celui que je pourrai écouter non stop pendant les trois semaines et qui sera à même de couvrir toutes les émotions possibles du voyage ?
Cette année-là, Alanis avait déjà sorti son album “Jagged Little Pill”, devenu un classique… Il est déconcertant de réaliser que nous savions nous contenter de peu. Depuis l’ère des MP3 a rendu incompréhensible l’idée même que j’ai eu à opérer un choix…! Que je n’ai jamais regretté.
Et j’ai appris que nous n’arrêtons pas d’apprendre. Mais que nous avons tendance à oublier.