On a l'âge de ses artères, de ses allées et venues, de ses avenues, de ses rues, de ses passages, de ses impasses. De tout ce qui n'était pas le lieu mais qui y menait. On à l'âge de sa mémoire et puis l'on se dit, quand se souvenir demande à ce que la traduction se fasse avec lenteur, que l'on a l'âge de vider les tiroirs de la mémoire. Delete ! On sort alors, en se disant que c'est l'heure de rentrer, on s'en retourne en imaginant qu'en notre absence tout a changé. Comme si tout ce qui faisait notre richesse de débris ne s'était pas dissipé, comme si le fait de s'éloigner rendait enviable les accrocs du passé. Delete ! La mémoire est vièrge, tout est à inventer des inventaires et nous trions, à ma gauche le vide urgent, à ma droite le vide qui peut attendre, devant, le vide à venir, derrière, le vide impossible, au dessus le vide résigné, et sous les pieds le vide attendu, celui qui invite les naissants à se débarasser des cellules, des numéros d'écrou. Ce vide redoutable et aimé, comme tout que l'on redoute d'aimer.
Sous mon front froissé se déploie un désert, une étendue semée de petites pierres que je n'ai pas jetées comme les points sous la crosse de mes interrogations, j'avance et nu, au sortir d'une forêt de forceps. Delete!