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nantes 7.Voyage d'affaires

Publié le 17 septembre 2009 par Didier T.
nantes 7.Voyage d'affaires
nantes 7.Voyage d'affaires
Ainsi donc, le sort en était jeté. Le choix du tramway s’imposait et rendait caduques les espoirs de voir Jean Luc Lagardère investir à Nantes dans son usine électronique (voir Nantes 5 et 6 déjà publiés). Heureusement, nous avions pris soin de n’en pas ébruiter l’hypothèse et surtout avions déconnecté toute relation entre le choix du mode de transport et la création d’une telle usine.
Contrairement à ce que l’on croyait, alors que l’exclusion du VAL de MATRA était devenue une évidence publique et connue de son patron, ce dernier me convoqua dans son hôtel particulier Place de l’Etoile et me confirma son intention initiale, me révélant le nom de son partenaire étranger.
Il souhaitait que soit rapidement organisée à NANTES une réunion regroupant son futur partenaire américain, toutes les autorités publiques et lui-même accompagné de son chef de projet afin que leur soient présentés plusieurs sites susceptibles d’accueillir la future usine. Il nous en indiquerait la date dès qu’il aurait connaissance des disponibilités du docteur Boyd, son associé dans le joint venture en cours de création.
C’est donc pendant les vacances de Pâques que je dus rentrer en catastrophe de l’ île d’Yeu pour accueillir la délégation sur l’aéroport de Nantes. Un rendez-vous était prévu chez le Président du Conseil Régional, Olivier Guichard et pour rejoindre ses bureaux il nous fallut traverser une violente manifestation d’ouvriers de la Navale.
Malgré toutes les tentatives de ce vieux grigou de Guichard qui souhaitait attirer cette activité sur La Baule dont il était maire, nous présentions à cet aréopage un espace qui ne pouvait qu’être retenu tant il présentait d’avantages.
Nous savions que Boyd, le PDG de Harris souhaitait construire en Europe une usine en tous points semblable à celle qu’il possédait déjà à Melbourne en Floride et qu’il attachait beaucoup d’importance à la présence de l’eau. Nous avions donc choisi un terrain en bordure de l’Erdre que François 1er disait être la plus belle rivière de France. Lors de la visite du site, Boyd fut littéralement conquis.
Matra-Harris était née, serait installée à Nantes et produirait des composants C Mos par bombardement de plaques de silicium dans un environnement ultramoderne.
Dès lors, une course de vitesse s’engagea car dans cette activité un avantage technologique sur la concurrence ne dure pas très longtemps.
Il me revint la responsabilité d’obtenir de toutes les autorités publiques les autorisations nécessaires à la construction de l’établissement. L’ouverture en était prévue huit mois après cette réunion….
Le Conseil Municipal qui suivit, acheta les terrains nécessaires, les revendit plus chers à Matra-Harris et enclencha les travaux pour en favoriser l’accès. Tout cela au cours de la même séance !!!
Pour la petite histoire, l’usine fut ouverte avec 10 jours d’avance !
C’est pendant ces huit mois de construction qu’une visite exploratoire d’éventuels investisseurs américains fut décidée et son organisation confiée à un Français représentant aux USA une filiale de la Caisse des Dépôts.
Tout avait été organisé par lui, hôtels, déplacements et prises de rendez-vous, je n’y avais fait rajouter q’une visite à la société dont m’avait parlé le docteur Demeirler à Bruxelles (voir Nantes 4).
Direction New York, embarquement sur Air France en première classe, champagne en salle d’attente et dans l’avion avant le décollage. Ca commençait bien !
Nous devions être des VIP very importants, c’est dans une interminable limousine que l’on rejoint notre hôtel le Park Lane sur South Park Avenue. De nos chambres du vingt-cinquième étage, Central Park à nos pieds, nous n’avons pas réellement profité car les rendez-vous avec les banquiers avaient été montés à la mode américaine, s’enchaînant les uns à la suite des autres. C’est tout juste si nous avions le temps à Wall Street d’admirer le fameux lustre du lobby de la banque Morgan dont le représentant nous stupéfia en nous présentant son collaborateur qui était natif de Vertou, à une encablure de Nantes.
Enfin seuls, le soir, Alain et moi en profitions pour aller dîner en haut de la tour sud du WTC dans un restaurant japonais et regarder les petits avions et hélicoptères qui volaient plus bas que nous….
Au lieu de prendre le shuttle pour Washington, notre guide nous fit prendre le train sur l’Amtrac afin que l’on puisse s’arrêter à Philadelphie et rencontrer la Chemical Bank.
Arrivés à Washington dans la soirée, notre guide nous emmena dîner dans un restaurant Français à la mode alors que nous n’avions pas déposés nos bagages à l’hôtel....Quand nous nous présentions au desk du Watergate Hôtel, sur les bords du Potomac, il nous fut répondu que nos chambres avaient été louées car notre arrivée tardive n’avait pas été annoncée…. Notre guide, qui habitait Washington, était déjà reparti chez lui car le lendemain nous prenions un avion pour Detroit qui décollait à sept heures !
Pour s’excuser, l’hôtel nous logea dans une des deux suites présidentielles de l’établissement !
C’est ainsi que l’on vécut une courte nuit dans un décor ahurissant, là où le scandale du Watergate avait été perpétré par Nixon et consorts ! Deux chambres, deux salles de bain, un dressing et un salon immense, meublé de bois précieux et de cuir dont le balcon donnait sur la rivière….
J’aurais aimé que le temps puisse s’arrêter pour en profiter un peu, mais il était écrit que cette fois, tout se ferait en coup de vent. Sur le chemin de l’aéroport, ce n’est que grâce à un détour que je pus apercevoir la Maison Blanche.
Cette journée qui commençait allait être des plus bizarre.
Les tours noires et rondes de Détroit se profilaient déjà dans notre paysage et nous foncions vers notre rendez-vous avec le vice exécutive chairman de General Motors. Le hall de l’immeuble était composé d’un musée où était exposés les modèles emblématiques des véhicules produits sous différentes marques, Lincoln, Buick et autres Impalas.
Pas le temps de rêver devant cette Buick décapotable, toute de rondeurs apaisantes et de couleur pastel, pas le temps d’admirer les flancs blancs des roues de ces voitures qui meublèrent mes rêves de jeunesse.
Notre Vice Chairman nous attendait de pied ferme. La presse française se répandait à l’époque sur une hypothétique installation de Ford en Lorraine et le gouvernement, face aux multiples manifestations des lorrains qui voyaient leurs industries traditionnelles foutre le camp, laissait entendre qu’il était favorable à une telle implantation.
Le vice chairman nous expliqua que tout ceci n’était que de la poudre aux yeux, que le projet Ford n’avait aucune existence réelle mais que des fuites vers la presse avaient été savamment organisées par leur concurrent afin de rendre plus difficile la réalisation du projet de General Motors.
Ce projet prenait en compte les difficultés économiques et les capacités de deux régions françaises :
- A Saint Etienne, le rachat de la Manufacture permettrait d’y fabriquer des moteurs en bénéficiant d’une main d’œuvre dont le savoir faire permettrait une rapide reconversion.
- Dans la région nantaise, une usine de montage des véhicules était sérieusement envisagée, la main d’œuvre étant elle aussi suffisamment formée.
Ce n’était donc pas une simple usine qui nous était proposée mais une véritable nouvelle industrie très consommatrice de main d’œuvre qui permettrait de réemployer la totalité des personnels des chantiers navals nantais. Une véritable aubaine !
Trois heures plus tard nous reprenions l’avion, direction Atlanta où nous nous posions après avoir été sévèrement chahutés par le cyclone Frederick qui venait d’y mourir. Là un jet privé, De Havilland, nous attendait pour nous emmener à Greensville en Caroline du Sud où était implanté le cabinet d’études qui supervisait la construction de l’usine Matra Harris à Nantes. A cette époque, imaginer un bureau d’études composé de plusieurs milliers d’ingénieurs et possédant une dizaine d’avions comme le nôtre était peu banal.
C’est dans la piscine du Ramada Inn qu’Alain et moi refaisions de tête le voyage de la journée et le replaçant en Europe. C’était comme si, partis de Paris nous étions allés à Stockholm, puis à Lisbone pour se poser enfin à Malaga dans la même journée…
Le lendemain, un autre jet, un Learjet cette fois, mis à notre disposition par Harris, nous emmenait pour un court déplacement à Melbourne en Floride où était installée « l’usine modèle ».
Confortablement installés dans des fauteuils clubs, nous survolions la côte atlantique en dégustant du Bourbon dans des verres en cristal. Il faut bien peu de choses pour se croire milliardaires…
Une fois la visite de l’usine terminée, le week-end arrivant, on nous demanda ce que nous souhaitions faire de notre samedi et nous fut proposé de choisir entre une visite de Cap Kennedy, une excursion à Disney World ou une partie de pêche au gros.
Sans se consulter, nous choisissions d’une même voix la pêche au gros.
Le lendemain, un petit avion à hélice nous emmenait à Fort Pierce, où un bateau spécialisé dans ce genre de sport nous attendait avec deux hommes d’équipage.
La mer avait été furieusement brassée par le passage du cyclone Frederick et avait une couleur maronnasse, le bateau faisait route vers les "wahous", lieu de pêche au large des Bahamas.
Soudain, il nous fallut franchir une longue ligne d’écume qui délimitait le début d’une eau bleue. C’était le Gulf Stream qui se matérialisait ainsi. Le bateau était équipé à l’américaine…c’est-à-dire qu’une des cannes à pêche était actionnée par un moteur électrique…
Quelques thons et autres King makrels plus tard, alors que l’après midi était déjà bien entamé, les hommes d’équipage nous montrèrent un triangle noir qui flottait non loin du bateau.
En quelques minutes, ils relevaient toutes les lignes et installaient sur le fauteuil central une énorme canne à pêche, dotée d’un gros moulinet pouvant être actionné à deux mains et d’un fil à pêche métallique.
Ils avaient repéré un requin de grande taille !
Rapidement, un des hommes coupa un thon en deux et en jeta une moitié vers le squale qui se précipita pour l’avaler. Dans la seconde moitié du thon, il glissa un hameçon de vingt centimètres, demanda à Alain de s’attacher avec la ceinture sur son siège de pêche et jeta le bout de thon à l’eau.
Aussitôt le requin attiré par le sang plongea vers le bout de thon et le moulinet laissa filer un bon kilomètre de fil à pêche.
Commença une épreuve de force où il fallut remonter le fil que nous avions laissé partir avec le requin au bout.
Près d’une heure plus tard, épuisés, nous pouvions voir le squale proche du plat-bord arrière du bateau et un des marins partit chercher une carabine pour tuer l’animal avant qu’il ne soit remonté car un simple coup de queue aurait pu nous casser les jambes.
Celui qui n’avait pas la carabine voulut se rendre utile et monté aux manettes de commande du bateau commença une marche arrière.C’était absolument ce qu’il ne fallait pas faire, en redonnant du mou au poisson, celui-ci plongea sous le bateau et coupa net le fil métallique !
Adieu veaux, vaches, cochons et requins, et dans la précipitation, nous n’avions même pas pris de photo de la bête !
Le retour fut maussade et dès le lendemain nous prenions la route de Miami d’où Alain devait rentrer directement en France pendant que moi, je devais me rendre à Seattle pour présenter devant le Conseil Municipal, une offre de jummelage avec Nantes.
Miami - Seattle, c’est la plus longue distance possible entre deux villes américaines, voyageant sur la Braniff, société texane, après une escale à Dallas-Forthworth, le sommet du Mont Regnier n’en finissait pas de nous guider et les huit heures de vol furent un calvaire.
C’est donc devant le conseil municipal réuni au grand complet que je présentais le candidature de Nantes pour un futur jummelage.
De retour à mon hôtel, j’eus la surprise de recevoir un appel téléphonique d’une française m’appelant par mon prénom qui se révéla être une fille avec qui j’étais en classe en seconde à Chateaubriant. On l’appelait Sniffant !
Elle avait suivit mon intervention à la télé.
Comme quoi le monde est petit.
Elle était mariée , vivait dans une île du Pudjet Sound au large de Seattle et ne se déplaçait qu’en hydravion. Une visite s’imposait, mais je devais rentrer en France le lendemain. La prochaine fois ? Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu

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