Un jour, mon regard changea. Non que je pensais quelque chose de bien précis. Je ne pensais rien. Ce qui ne m'empêchait nullement d'avoir un avis.
Ainsi cette jeune collègue, croisée régulièrement pendant quelques années. En pleine construction, la demoiselle, reconstruction pouvant tout aussi bien être le mot puisqu'un jour, elle me fit cette confidence : elle envisageait se se refaire la poitrine. Nous en parlâmes pendant des heures. L'enjeu était de taille. Nous n'entrâmes pas à gorge déployée sur les modèles, esquisses, et autres prospectus. Nous fûmes plutôt du style gorge profonde. Quêteurs de sens. Démêleurs de pelote.
De prime abord, adepte du on est comme on est, et donc à ce titre plutôt enclin à être sévère à l'égard de tout ce qui peut ressembler à de la mobilisation d'infrastructures médicales pour son confort personnel, quel qu'en soit le coût, je fus au mieux sceptique, au plus assez critique. Mais elle me demandait mon avis. Quêtait mes arguments.
Je lui conseillais de quitter cette idée. Elle n'essaya pas de me convaincre. Les discussions aidèrent à comprendre. A respecter. Elle riait de bon coeur lorsque je me pris à la surnommer silicone vallée. C'est ce bon coeur qui était la clé. Elle souffrait de tant de choses. Depuis qu'elle était toute petite.
L'opération n'était pour elle pas que esthétique. Il y avait derrière toute une démarche. Tout un désir. Celui de se plaire à soi d'abord.
L'opération, elle l'a faite, passant par l'emprunt.
Par la suite, elle trouva un petit copain, puis se maria. Elle changea de boulot. Repris des études.
Energie retrouvée.