Introduction aux expressions (Démons des Mots font Démo sur Dix Maux)

Publié le 07 octobre 2009 par Collectif Des 12 Singes

Introduction aux expressions directes

« Les mots savent de nous des choses que nous ignorons d’eux » disait René Char.

La langue française est bien pendue, normal, tout le monde lui est passé dessus !!!

Au carrefour des limitations montagneuses et maritimes autant que des civilisations, la France s’est toujours enrichi des brassages ethniques, linguistiques, techniques, artistiques, culturels, cultuels, artisanaux, maritaux !!! Il suffit de voir que nous sommes les seuls Européens à avoir mélangé de la base 10 (indo-européenne) et de la base 20 dans nos nombres : quarante (4*10), quatre-vingt (4*20) au lieu d’octante (8*10), et encore pire quatre-vingt dix (4*20+10) au lieu de nonante.

Vieux de ce melting-pot « pourri » (un pot-pourri est un mélange de fleurs, méfiez-vous des doubles sens plus ou moins fâcheux), le franc parler … pardon, le parler franc [la tribu germanique qui a envahi la Gaule en foutant sur la gueule aux (mal) gaulés et en la leur mettant profond, jusqu’aux gorges burgondes] peut s’enorgueillir de son riche vocable, son verbe étant autant support de la verve que ses expressions d’impressions.

Amoureux transi d’effroi devant la puissance de la langue, le Collectif des 12 Singes souhaite ici vous faire part de son admiration sans borne pour les jeux de mots, notamment concernant les maux humains !

Curieux de tout et encore plus des thématiques qui ont toujours agité nos groupes sociaux depuis que l’humain est civilisation, nous voulions discourir philosophiquement sur les grands sujets de société, qui touchent tant au collectif qu’à l’individu !

Étant donné qu’une illustration vaut mieux que de longs discours, nous avons opté pour une discussion à bâtons rompus [1] à base de petites phrases qui en disent long ! Nous avons donc regroupé dans ce petit bréviaire {document de synthèse et de commentaire} des dictons, expressions, proverbes populaires, aussi bien que des citations, dialogues de films et paroles de chansons. Pour rendre la chose plus digeste, nous avons choisi de compiler tout ceci dans le cadre d’une discussion de comptoir, les mêmes qui sont souvent très animées grâce à l’alcool et qui permettent de dire des choses normalement socialement tues !

Les deux protagonistes

Les femmes et les (petits) enfants d’abord certes, mais les vieux ont aussi un droit d’aînesse ! Il faut bien commencer par quelqu’un donc, galanterie oblige, présentons cette quelqu’une qui est loin d’être quelconque : Dame de cœur à vous l’honneur, roi de pique à vous la suite !!!

  • Manon Lescaut {nous avons utilisé ce nom connu pour jouer l’opposition avec le célèbre roman de l’Abbé Prévost ! Montesquieu en dit : « Je ne suis pas étonné que ce roman, dont le héros est un fripon et l’héroïne une catin [...] plaise, parce que toutes les mauvaises actions du héros [...] ont pour motif l'amour, qui est toujours un motif noble, quoique la conduite soit basse ». En outre, le roman a traversé les époques, revêtu de ces plumes de canard dont parlait Jean Cocteau, sur lesquelles glissent les crachats des prudes et les poussières de l'oubli (ce que nous nous souhaitons également)} : comme sa sœur Julie, Manon Lescaut est une fille de l’ordre qui marche au pas des lois, gendarmette de Saint-Tropez plutôt mignonne mais pas franchement bonne vivante !
  • Son papi, maternel, Mougeot (le petit frère rebelle et urbain du célèbre papi de Carjac – petite ville de l'Aveyron – qui avait participé à la célèbre émission créée et animée par Guy Lux, le Schmilblick) : à l’opposé de son grand frère fauderche Antoine (petit paysan passionné par les champignons, comestibles), Jean-Louis Mougeot (à ne pas confondre avec son homonyme François Valéry, chanteur populaire), pense à beaucoup de choses pour faire avancer le fameux Schmilblick. Membre de l'Académie des inscriptions sur les murs et des lettres recommandées rageuses envers l’état, il aime à marcher en-dehors des clous !

Quand papi Mougeot retrouve
sa petite filliotte Manon Lescaut

  • Manon Lescaut : Mais qu’est-ce qu’il trafique encore ??? Je sais bien que les "stars" aiment à se faire désirer, mais là c’est abusé !!! Ah, te voilà toi, quand même !!! Avant l’heure ce n’est pas l’heure mais après l’heure ce n’est plus l’heure : j’allais lever le camp, j’étais en train de prendre racine !!!
  • Papi Mougeot : Bonjour aussi !!!
  • ML : Moui, bonjour ! Je sais bien que tu n’es pas royaliste pour un sou mais ce n’est pas pour autant que tu dois bafouer la ponctualité, politesse des rois !!!
  • PM : Euh oui, même si c'est sans doute pour ça que les reines se font tant attendre ! Bref, promis, je le referai plus !
  • ML : Oui oui, on dit ça, mais ce n’est pas à ton âge qu’on te changera !!!
  • PM : Ah ça non ! Bon allé, on se fait un bisou-bécot et on va se boire un coup au chaud ?! Tu as bonne mine en tout cas, ça fait plaisir à voir … j’espère que le crayon va pareil ! ... ?
  • ML : Papi !!! Tu sais très bien qu’avec ma carrière militaire je n’ai ni le temps ni la tête à … ça !
  • PM : Oui c’est vrai, toi les beaux gars tu préfères les arrêter plutôt que de les menotter après les avoir emballés !
  • ML : Ce n’est tout de même pas ma faute si je suis du bon côté de la ligne jaune !!!
  • PM : Pfff, tu parles, le côté obscur des forces de l’ordre oui !!!
  • ML : Bon hé, hein, oh !!! C’est fini oui ??? Sinon, je prends mes cliques et mes claques et je rentre chez moi, je ne suis pas venu jusqu’ici pour entendre tes sempiternelles railleries de gaucho soixante-huit attardé !!!
  • PM : Hum, j’adore quand t’es colère, quand tu montes sur tes grands chevaux [2] de la chienne de garde républicaine, cadre noir de la saumure imbuvable de l’état !!! Bon allé, stop, pouce, temps mort : on va se jeter un godet derrière le gosier, un ch’ti canon sera bon pour détendre l’atmosphère !

Nos deux compères, qui ne s’entendent pas trop comme larrons en foire [3], s’installent tranquilles, sont pénards accoudés au comptoir. Manon commande un café noir, Jean-Louis prend un vrai truc à boire, soiffard qu’il est il tourne à la Marie Brizard allongée sur son lit de glace !



[1] Battre du tambour "à bâtons rompus" signifiait donner deux coups successifs de chaque baguette, sans produire de roulement continu.

[2] Lorsque les chevaliers combattaient, plus le "cheval de bataille" était grand plus ils pouvaient observer et dominer l'adversaire. De la fougue et l'ardeur nécessaires pour partir ainsi en guerre, il nous est resté, au figuré et depuis la fin du XVIe siècle, cette expression où la fougue est devenue celle de celui qui s'emporte. Le Cadre Noir est un corps de cavaliers d'élite français, instructeurs à l'École nationale d'équitation près de Saumur.

[3] Un larron étant « celui qui commet un larcin, qui dérobe furtivement », l'expression "s'entendre comme larrons" (version du XVIe siècle) désignait des compères qui s'entendaient pour préparer un mauvais coup. C'est au XVIIe que la "foire" est ajoutée, ces grands marchés publics où les mauvais coups au détriment aussi bien des marchands que des visiteurs peuvent être faciles à perpétrer. Si on emploie cette expression aujourd'hui pour désigner deux gamins qui s'entendent si bien qu'on imagine qu'ils pourraient très bien faire des bêtises ensemble, elle peut aussi simplement désigner des gens qui s'entendent à merveille, sans autre connotation.