Seule une oiselle de l’élevage avec une personnalité plus affirmée avait osé chanter que les volatiles des autres espèces se rebelleraient contre la façon dont dindes et dindons se comportent et ne comprendraient pas qu’un dindonneau, fut-il mignon, précoce et princier, devienne si vite un chef dindon. L’oiselle fut priée illico d’aller chanter dans une basse-cour voisine où paraît-il son glouglou sera plus admiré. Soucieuse de ses jolies pattes et de ses beaux yeux sombres, elle obtempérera certainement car les dindes, c’est bien connu de tous les éleveurs, deviennent agressives quand elles sont stressées et alors attaquent les yeux ou les doigts des pattes de leurs voisines. Vivre serrées les unes contre les autres en batterie, forcément, les rend très nerveuses. D’autant que la nourriture qu’on leur donne manque cruellement de variété, toujours préparée par des spécialistes chargés de mijoter des rations destinées à faire que tout l’élevage glougloute à l’unisson.
Prenons garde à ce que dindes et dindons, trop standardisés, ne se révoltent et n’attaquent nos mollets comme le faisaient les vulgaires oies et jars de mon enfance. À moins que – et le risque est grand si j’en crois les nouvelles de la semaine passée – le virus H1N1 ne les décime comme ce fut le cas au Canada. Un passage du virus de l’homme aux dindes était pourtant réputé fort improbable par les experts. À trop jouer les dindons pour ceux qui les gouvernent, il y a un risque pour que les volatiles, jusque-là sagement Unis Mouvementés et Pondeurs, ne voient leurs rangs éclaircis par un…