2 NOVEMBRE
COMMÉMORATION DES MORTS
(DEUXIEME SERMON)
Le purgatoire
L’ENFER
LE JUGEMENT DERNIER
Miseremini mei miseremini mei, saltem vos amici mei, quia manus Domini tetigit me.
Ayez pitié de moi, vous au moins qui êtes mes amis, car la main du Seigneur s'appesantit sur moi.
(Job., IX, 2l.)
D'où sortent ces prières touchantes, ces tristes accents ? Serait-ce des profondeurs d'un sépulcre ? Non, car si les sépulcres nous instruisent, c'est sur le néant des grandeurs humaines ; les morts qui y sont étendus, ne nous parlent que par leur silence. Serait-ce du haut de ce beau ciel, l'heureux séjour des élus, que se font entendre ces tristes gémissements capables de fendre les rochers les plus durs ? Non, la même main qui leur a distribué ces brillantes couronnes, a en même temps essuyé leurs larmes ; l'on n'y entend plus que chants de joie et d'allégresse éternelle. Serait-ce du fond des enfers, de ces lieux d'horreur et de tourments, que se font entendre ces cris si tendres et si déchirants ?
Hélas ! non ; les noirs habitants de ces lieux de ténèbres ne demandent ni n'espèrent aucun soulagement ; ils sont damnés, ils sont séparés de leur Dieu, ils le seront pour jamais. Ils ont fait un adieu éternel au ciel et à tous ses biens ; ils sont très assurés que jamais ils ne sortiront de ces abîmes ; la main du Seigneur ne les touche pas seulement, mais les foudroie et les écrase. C'est donc du purgatoire que se font entendre ces pressantes sollicitations, ces tendres gémissements.
Mais à qui s'adressent ces larmes et ces sanglots ? Écoutez l'Église, cette tendre mère qui pleure amèrement sur les tourments qu'endurent ses enfants... Elle prie et nous conjure d'avoir pitié d'eux et de leur porter secours. Oui, après nous avoir fait le tableau du bonheur dont jouissent les bienheureux dans le ciel, elle nous transporte dans cette région de larmes et de tourments, pour nous faire la triste peinture des peines qu'y endurent ces pauvres âmes. Quoi de plus digne et de plus capable d'attendrir nos cœurs, que les cris de ces âmes souffrantes ? Écoutez-les : « O vous, mes amis, arrachez-nous, arrachez-nous de ces flammes qui nous dévorent ! » Voyez-vous cette mère ? Elle vous tend ces mains qui tant de fois vous ont porté. Voyez-vous cette pauvre enfant, dont la séparation vous fut si cruelle ? En l'embrassant pour la dernière fois, vous lui avez promis de ne jamais l'oublier... Nous pouvons les soulager, que dis-je ? nous pouvons leur ouvrir les portes du ciel, et les faire jouir d'un bonheur qui n'aura point de fin. Pour vous y engager, je vais vous montrer, autant qu'il me sera possible,
1° la grandeur des tourments qu'elles endurent, et
2° la facilité des moyens que nous pouvons employer pour les soulager.
I. – Si je parlais à des impies, à des incrédules, ou bien à des personnes croupissant dans une ignorance grossière, qui ne croient à rien et qui nient tout, je commencerais par leur prouver l'existence de ce lieu destiné à expier les fautes vénielles, et les péchés mortels qui ont été pardonnés dans le tribunal de la pénitence, et qui n'ont pas encore entièrement été expiés par des peines temporelles ; mais, puisque je parle à des chrétiens instruits, et parfaitement convaincus de cette grande vérité, je n'en donne donc point d'autres preuves que celles que vous avez trouvées dans votre catéchisme. Je vous dirai qu'il est certain, très certain qu'il y a un purgatoire, c'est-à-dire un lieu de tourments, où les âmes des justes achèvent d'expier leurs fautes, avant d'être admises à la gloire du paradis qui leur est assurée. Rien n'est mieux prouvé que l'existence de ce lieu. Nous lisons dans l'Écriture que « rien de souillé n'entrera dans le ciel » – « Il y a des péchés qui ne seront remis ni dans le siècle présent ni dans le siècle à venir », mais dans le purgatoire. Saint Paul nous dit encore que plusieurs ne seront sauvés, qu'après avoir passé par les flammes du purgatoire. Oh ! combien d'âmes justes la mort surprend dans quelques fautes vénielles ! Où vont-elles, ces pauvres âmes, puisqu'elles ne sont pas assez pures pour entrer dans le ciel ? Seront-elles jetées en enfer ? Si cela était, où seraient donc les élus ? Non, non, ce sont des âmes justes, et les flammes des abîmes ne sont point pour ceux qui brillent du feu de la charité ; c'est donc dans les flammes du purgatoire qu'elles vont achever l'expiation de leurs fautes, avant d'être réunies à leur cher et céleste Époux, qu'elles aiment et dont elles sont aimées.
Oui c'est une vérité de foi, que, quoique nos péchés nous soient pardonnés dans le tribunal de la pénitence, nous ne sommes pas pour cela exempts de souffrir des peines temporelles. Voyez le saint roi David, à qui Dieu même envoya son prophète pour l'assurer que son péché lui était pardonné. Le Seigneur fit cependant mourir l'enfant qui était pour lui l'espérance d'une heureuse vieillesse. La justice de Dieu, non contente de cette punition, frappa encore tout son royaume des fléaux les plus terribles. La peste semble le vouloir laisser seul dans le monde, il se voit chassé de son trône par celui-là même à qui il avait donné le jour. Ce malheureux fils ne craint pas de le poursuivre ; il veut ôter la vie à celui dont Dieu s'est servi pour la lui donner. Jusqu'à sa mort, David passa les jours et les nuits dans les larmes et les pénitences. Il les porta à une telle rigueur, que ses pieds ne pouvaient plus le soutenir. Voyez encore le pieux roi Ézéchias ; pour une légère pensée d'orgueil, le Seigneur mit son royaume en proie à mille malheurs. Voyez saint Pierre et sainte Madeleine. Personne ne doit douter que, quoique nos péchés soient pardonnés au tribunal de la pénitence, il nous reste encore des peines temporelles à souffrir, ou dans ce monde ou dans les flammes du purgatoire. Il nous est aussi nécessaire de croire cette vérité pour être sauvés, que le mystère de l'Incarnation. Arrêtons-nous là, descendons en esprit dans ces lieux de tourments ; soyons témoins des maux qu'endurent ces pauvres âmes, elles vont elles-mêmes nous faire la triste peinture des peines qui les rongent et les dévorent.
Deux supplices leur sont très sensibles :
1° La peine du dam, c'est-à-dire la privation de la vue de Dieu, et la peine du sens. L'amour qu'elles ont pour Dieu est si grand, la pensée qu'elles en sont privées par leur faute, leur cause une douleur si violente, que jamais il ne sera donné à un mortel d'en concevoir la moindre idée. Du milieu de ces flammes qui les brûlent, elles voient les trônes de gloire qui leur sont préparés et qui les attendent, une voix semble leur crier : « Ah ! que vous êtes privées de grands biens ! si vous aviez eu le bonheur de redoubler vos pénitences et vos larmes, vous seriez aujourd'hui assises sur ces beaux trônes tout rayonnants de gloire ; ah ! que vous avez été aveugles de retarder un tel bonheur par votre faute ! » Ce seul langage augmente leur douleur et le désir d'être réunies à leur Dieu ; elles s'en prennent au ciel et à la terre ; elles invoquent et les anges et les hommes. « Ah ! mes amis, nous crient-elles, s'il vous reste encore quelque amitié pour nous, ayez pitié de nous, arrachez-nous de ces flammes : vous le pouvez !... Beau ciel, quand te verrons-nous ? » Il est rapporté dans l'histoire de Cîteaux, qu'un religieux, après avoir été toute sa vie un modèle de vertu, apparut à un religieux, en lui disant qu'il avait été en purgatoire ; et la plus grande souffrance qu'il y avait ressentie, était la privation de la vue de Dieu
2° L'autre peine de ces pauvres âmes, c'est la douleur du sens, c'est-à-dire du feu. Les saints Pères nous assurent que c'est un feu matériel, ou plutôt que c'est le même que celui qui brûle les malheureux damnés. Ce feu est si violent, qu'une heure semble à ceux qui l'endurent, des millions de siècles. Oui, nous disent-ils, si l'on pouvait comprendre la grandeur de leurs supplices, nuit et jour nous crierions miséricorde pour elles. Un autre saint va encore plus loin, en nous disant que leurs souffrances surpassent même celles que Jésus-Christ a endurées pendant sa cruelle et douloureuse passion ; et cependant, si les souffrances que Jésus-Christ a endurées eussent été partagées entre tous les hommes, nul mortel n'eût pu les soutenir. Ah ! pauvres âmes, qui pourra donc jamais raconter la grandeur de vos peines ! Nous lisons dans l'histoire ecclésiastique, qu'un saint resta six jours en purgatoire avant d'entrer dans le ciel. Il apparut ensuite à un de ses amis en lui disant qu'il avait enduré des souffrances si grandes, qu'elles surpassaient toutes celles qu'ont endurées et qu'endureront jusqu'à la fin des siècles, tous les martyrs réunis ensemble. O mon Dieu, que votre justice est redoutable pour le pécheur !... Cependant, qui peut entendre sans frémir le récit de ce qu'ont enduré les martyrs chacun en particulier. Les uns sont plongés dans des chaudières d'huile bouillante, d'autres sciés avec des scies de bois, celui-ci étendu sur un chevalet, déchiré avec des crochets de fer lui arrachant les entrailles, d'autres que l'on foule aux pieds. Celui-là étendu sur des brasiers ardents, auquel il ne restait que ses os tout noircis et brûlés ; enfin, d'autres ont été mis sur des tables armées de lames tranchantes, et qui perçaient de part en part ces innocentes victimes. Peut-on bien penser à tout cela sans se sentir pénétré de douleur jusqu'au fond de l'âme ? Ah ! si une âme en purgatoire souffre encore plus que tous les martyrs ensemble, qui pourra donc y tenir ?... Mon Dieu, mon Dieu, ayez pitié de ces pauvres âmes !...
Mais pour nous en convaincre encore d'une manière plus sensible, écoutons : sainte Brigitte, à qui Dieu fit connaître les douleurs qu'endurent ces pauvres âmes, assure que leurs peines sont si grandes et leurs douleurs si violentes, que jamais l'homme ne pourra s'en former la moindre idée. Dieu lui en fit voir qui étaient condamnées à y rester jusqu'à la fin du monde. Le pape Innocent III apparut après sa mort à sainte Lutgarde sous une forme sensible. Effrayée d'une telle vision, elle se jeta la face contre terre, demandant au bon Dieu de lui dire ce que cela pouvait être. Le mort lui répondit qu'il était le pape décédé récemment. « Mon Dieu, s'écria-t-elle en pleurant amèrement, si un pape qui a été un modèle de vertu souffre de tels maux, malheur à moi » Le pape lui dit que, sans la sainte Vierge pour qui il avait fait bâtir une église, il était damné et condamné à brûler dans les enfers ; mais avant de mourir la sainte Vierge avait prié son Fils pour lui obtenir une véritable contrition de ses péchés. « Je resterai dans les flammes jusqu'à la fin du monde, ajouta-t-il, je viens réclamer le secours de vos prières, » et il disparut en s'écriant : « Ah ! que je souffre ! arrachez-moi des flammes qui me dévorent. » Saint Vincent Ferrier nous dit que Dieu lui fit voir une âme condamnée à un an de purgatoire pour un seul péché véniel. Écoutez encore ce que nous dit saint Louis, de l'ordre de Saint Dominique. Son père lui apparut sous une forme sensible, poussant des cris épouvantables et de profonds gémissements. Il venait implorer le secours de ses prières. Aussitôt saint Louis se livra aux larmes et à la pénitence, aux macérations les plus affreuses ; il célébra tous les jours pour lui la sainte Messe, et ne resta pas un jour sans implorer le secours de la sainte Vierge. Malgré cela, chaque matin son père apparaissait, en jetant les mêmes cris et les mêmes sanglots : « Ah ! que je souffre ! mon fils, ayez pitié de moi ! » Saint Louis ne cessait de demander jour et nuit, miséricorde pour son père. « Mon Dieu, mon Dieu, s'écriait-il, ne vous laisserez-vous pas toucher par mes prières et mes larmes ? » Sept ans après seulement, Dieu lui fit connaître que son père était délivré. – Mais, me direz-vous peut-être, que pouvait donc avoir fait ce malheureux père pour tant souffrir ? – Oh ! mon ami, si vous connaissiez bien ce que c'est que le péché, je n'oserais vous le dire, de peur de vous jeter dans le désespoir. Saint Louis rapporte que son père avait fait peu de chose : une personne lui avait rendu de grands services, et il cherchait à lui en témoigner sa reconnaissance, ne pensant pas assez peut-être que c'était Dieu qu'il devait remercier de ses bienfaits…
Que d'années de purgatoire pour nous, qui commettons ces sortes de fautes si souvent et avec si peu de scrupule ! Que de mensonges pour éviter une petite humiliation ou pour servir de divertissement ! Que de petites médisances ! Que de bonnes inspirations auxquelles nous n'avons pas répondu ! Que de distractions volontaires dans nos prières ! Que de fois le bon Dieu ne nous a-t-il pas donné la pensée de lui élever notre cœur, à notre réveil, pendant le jour, et nous ne l'avons pas fait ! ou si nous l'avons fait, avec quelle peine et quelle négligence ? Que de fois n'avons-nous pas eu la pensée de faire quelque mortification dans nos repas, dans notre démangeaison de parler ? Que de fois nous aurions pu aller à la Messe, tandis que, par paresse ou par crainte de perdre un moment, nous n'y sommes pas allés ! Que de fois le bon Dieu nous a donné la pensée de ne plus rester dans le péché, d'aller promptement nous confesser ! Que de fois nous avons eu la pensée de nous corriger, pour avoir le bonheur de nous approcher plus souvent du sacrement adorable de l'Eucharistie ! Que de bonnes œuvres, de pénitences nous aurions pu faire, et que nous n'avons pas faites ! O mon Dieu, que d'années, ou plutôt que de siècles il faudra souffrir dans ces flammes ! Mon Dieu, que nous sommes aveugles !...
Nous lisons dans l'histoire qu'une personne, après avoir vécu chrétiennement, apparut à une de ses amies, toute environnée de flammes, et souffrant cruellement, pour avoir négligé de fréquenter les sacrements. Dieu, en effet, lui avait souvent donné sur la terre, le désir de se corriger de ses petites fautes vénielles, et de recevoir plus souvent le sacrement de son amour ; aussi avait-il permis qu'elle apparût à son amie pour l'exhorter à faire ce qu'elle n'avait point fait elle-même, à mener une vie plus pure et plus sainte ; à offrir ses communions pour elle, et qu'ainsi Dieu lui ferait miséricorde. En effet, après plusieurs communions, elle lui apparut encore, mais toute rayonnante de gloire, et la remercia des communions qu'elle avait offertes pour sa délivrance. Un jour viendra que nous regretterons de n'avoir pas mené une vie assez pure et assez chrétienne, pour nous procurer le bonheur de venir plus souvent nous asseoir à la table des anges, ce qui abrégerait bien les peines du purgatoire.
Mais revenons à nos pauvres prisonnières, qui, du milieu des flammes, nous tendent leurs mains suppliantes, et nous conjurent de ne pas les laisser souffrir plus longtemps. Qui sont ces pauvres âmes, sur lesquelles la justice de Dieu s'appesantit ? Hélas ! ce sont peut-être nos parents, qu'une mort cruelle a séparés de nous il n'y a que quelques jours. Ce sont des amis chéris, qui viennent de descendre dans le tombeau où nous les suivrons bientôt. Ces pauvres âmes sont détenues dans des torrents de flammes qui les inondent et les dévorent ; la main du Seigneur les poursuit, les frappe et les châtie rigoureusement. « O vous, nos amis, nous crient-elles, soyez sensibles aux maux que nous souffrons ! « Voyez-vous, entendez-vous ces pauvres âmes ? Chacune s'adresse à ceux qu'elle a aimés et protégés pendant sa vie, pour les porter à avoir pitié d'elle. Entendez-vous cette épouse qui lève les yeux et tend ses mains suppliantes vers son époux : « Ah ! si vous pouviez, dit-elle, comprendre mes souffrances, pourriez-vous oublier une épouse qui vous aimait si tendrement ! Avez-vous oublié mes derniers adieux, quand, vous serrant entre mes bras, je vous donnais les dernières preuves de ma tendresse ? Vous m'aviez promis de ne jamais m'oublier ; seriez-vous insensible aux tourments que j'endure ? Ah ! de grâce, arrachez-moi de ce feu qui me dévore, vous le pouvez... ah ! que je souffre ! » Écoutez les cris déchirants de cette pauvre mère à son fils : « Mon enfant, pourquoi me laissez-vous endurer des tourments si affreux ? avez-vous déjà oublié tout ce que j'ai fait pour vous ? moi qui ai eu tant de peine à mourir, craignant que, séparé de moi, vous fussiez malheureux ! Vous m'abandonnez dans un lieu où je souffre cruellement. De grâce, délivrez-moi, délivrez celle qui a tant versé de larmes pour vous, qui a si souvent demandé à Dieu de la faire souffrir à votre place ! Mon fils, ayez pitié de votre pauvre mère qui vous a tant aimé, et qui est digne d'être payée de retour !... » Écoutez cette pauvre enfant, dont la séparation vous fit tant verser de larmes : « Ah ! ma mère, vous crie-t-elle , avez-vous oublié nos derniers adieux, avez-vous oublié ce moment où nous mêlions nos larmes ensemble, quand la mort nous forçait de nous séparer ? me laisserez-vous dans ces flammes qui me dévorent, tandis qu'il vous serait facile de me délivrer ! Oh ! de grâce, ne m'abandonnez pas ! Lorsque votre tour viendra et que vous serez jugée, je ne vous oublierai pas, j'irai moi-même me jeter aux pieds de votre juge, dont je serai alors l'amie et l'enfant bien-aimée. Si je ne suis pas moi-même assez puissante, j'appellerai toute la cour céleste à mon secours, afin de demander votre grâce. »
Mais à qui vont s'adresser ces pauvres âmes qui n'ont ni parents, ni amis pour penser à elles ? Il me semble que je les entends crier : « Pasteur charitable, dites à tous les chrétiens, combien nos souffrances sort longues et cruelles, non, il n'y a que Dieu pour connaître la rigueur des supplices que nous endurons ; ah ! dites-leur bien que nous ne serons pas des ingrates. » Hélas ! ces pauvres âmes sont dans les flammes comme des prisonnières, qui, depuis un grand nombre d'années, gémissent au fond de cachots ténébreux, soupirant après le moment de leur délivrance. Mais c'est en vain, on les abandonne, elles subissent de point en point l'arrêt de leur condamnation ; elles voient venir des âmes beaucoup plus coupables qu'elles, et qui sont plutôt délivrées, parce qu'elles ont des amis pour satisfaire à la justice de Dieu. « Mon Dieu, s'écrient-elles à chaque instant, n'aurons-nous donc personne pour nous délivrer ? »
Combien dureront les peines de ces pauvres âmes ? Hélas ! quand de tels supplices ne dureraient qu'un jour, qu'une heure, qu'une demi-heure, cela leur paraîtrait infiniment plus long, que des millions de siècles dans les supplices les plus rigoureux que l'on puisse souffrir en ce monde. – Et pourquoi cela : – Mon ami, le voici. Quand Dieu punit quelqu'un en ce monde, ce n'est que sous le règne de sa miséricorde et de sa bonté car, si Dieu nous envoie une infirmité, une perte de biens ou d'autres misères, tout cela ne nous est donné que pour nous faire éviter les peines du purgatoire, ou pour nous faire sortir du péché. En effet, si le Seigneur a traité le saint homme Job si durement sur cette terre, n'est-ce pas parce qu'il l'aimait d'une manière particulière ? Ce saint homme ne dit-il pas lui-même que « le bout du doigt du Seigneur l'a touché ? » L'ange ne dit-il pas aussi à Tobie, que si Dieu l'avait affligé, ce n'était que parce qu'il lui était agréable ? Ainsi donc, si dans ce monde Dieu nous fait souffrir, ce n'est que par amour et par charité. Dans l'autre, au contraire, Dieu n'est conduit que par sa justice et sa vengeance ; nous avons péché, nous avons passé le temps de sa miséricorde ; il nous avait mille fois menacés, il faut que sa justice soit accomplie et sa vengeance satisfaite. Oh ! qu'il est terrible de tomber entre les mains d'un Dieu vengeur !
Mais ce qui devrait nous porter à ne rien négliger pour délivrer ces pauvres âmes, c'est que nous sommes la cause du malheur de la plupart d'entre elles. En voici la raison. Cette épouse sera dans les flammes, parce qu'elle a eu pour son époux trop de faiblesse, peut-être même des complaisances contraires à la loi du Seigneur. Ce pauvre père, cette pauvre mère souffrent dans le purgatoire, parce qu'ils n'ont pas assez corrigé leurs enfants, et leur ont permis ce qu'ils n'auraient jamais dû leur permettre. Cet ami ou ce voisin souffre aussi parce qu'étant en votre compagnie, il n'a pas osé vous reprendre, lorsque vous avez médit du prochain ou que vous avez dit des paroles peu décentes. Enfin, une multitude d'autres brûlent dans ces brasiers, parce que vous leur avez donné mauvais exemple, ce qui les a portés à pécher. Ah ! pauvres âmes, c'est nous qui sommes cause de vos tourments, et nous vous laissons, nous vous abandonnons !... Ingrats, un jour viendra que nous pleurerons notre insensibilité pour ces pauvres âmes souffrantes ! Quoi ! nous les laissons brûler, pouvant si facilement les conduire au ciel ! Ah ! M.F., laissons-nous toucher, puisque Dieu a mis leur délivrance entre nos mains.
(Note : La seconde partie de ce Sermon étant à peu près identique à celle du précédent, nous croyons inutile de la reproduire.
Nous reproduisons la dernière partie du Sermon du 1° dimanche de l’Avent, qui reprend ce thème, traité de deux manières : Le Jugement Dernier, l’Enfer.
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LES COMMENTAIRES (2)
posté le 31 janvier à 18:49
Pathétique ! Navrant !
posté le 31 janvier à 18:42
Pathétique! Navrant !