Le train arrive en gare et
s’arrête dans une symphonie stridente. Marion se bouche les oreilles puis monte
dans un compartiment et cherche une place libre, côté lac, pour pourvoir
admirer le paysage, vu le temps radieux de cet automne qui n’en finit pas de
l’éblouir. Pour un train régional de début d’après-midi, il y a du monde et
elle s’assied en face d’une jeune femme qui prend à elle toute seule trois
places avec ses multiples sacs. Le train s’ébranle, Marion enlève son manteau
et le pose bien plié sur sa droite, lisse sa jupe et croise les jambes. Elle sort
son ipod de son sac et cherche l’émission qu’elle a enregistrée.
Quand elle
relève la tête, son regard croise celui d’un jeune type, assis trois sièges
plus loin qui sourit. L’homme étant un total inconnu, nettement plus jeune
qu’elle de surcroit, elle n’imagine pas que ce sourire s’adresse à elle mais
par trois fois, il se retourne pour croiser son regard. Il a un beau sourire
mais cette marque d’attention la rend mal à l’aise, elle n’a pas l’habitude.
Le train arrive à l’arrêt suivant, sa voisine prend ses affaires et descend, Marion en profite pour changer de place et se mettre dans le sens du train. Le jeune homme longe le couloir, passe à côté d’elle et descend également. Sur le quai, il se retrouve à marcher dans sa direction. Il lui sourit à nouveau à travers la vitre et cette fois, elle répond. Elle ne risque plus rien à être aimable ! Mauvais calcul, l’homme fait demi-tour et remonte dans le train. Le cœur de Marion bondit dans sa poitrine. Pourvu qu’il ne vienne pas s’assoir en face d’elle ! Quelle conne d’avoir répondu à ce sourire mais ouf, l’homme s’assied un rang avant, à l’inverse du sens du train et de façon à pouvoir la regarder bien en face. Pendant tout le trajet, Marion se cache derrière ses lunettes de soleil, regardant ostensiblement le paysage et les écouteurs bien enfoncés dans ses oreilles dans une attitude de rejet de toute tentative d’approche mais les rares fois où elle tourne la tête, il la regarde…et lui sourit.
Ce n’est pas le fait d’être draguée qui la dérange, non, cela est plutôt agréable quand on a son âge, c’est même valorisant, voire plaisant et délicieux pour le moral et l’égo…mais que penser d’un homme qui pourrait être son fils ?