Do not disturb

Publié le 10 novembre 2009 par Dalyna

Malgré les constatations de l’étude du jour qui dit que les « français ont grossi » et que « cela s’explique par la quantité supérieure à la normale de sucre et graisse chez les hardiscounters », je reste fidèle à cette petite supérette qui me dépanne, pour un prix un tantinet moins cher sur quelques produits qu’ailleurs. Entre midi et deux, à une heure où mon Leader Price de quartier est souvent désert, j’en profite pour faire mes courses. Mais arrivée à la caisse, je trouve une caissière pliée en deux, qui souffle et se parle tout bas comme pour se donner du courage.

-   Ca va ? lui dis-je.

-   Oui…

Elle se redresse, me fait un sourire de circonstances, et commence à biper mes articles. Tandis que je range mes affaires, je la regarde du coin de l’œil, et je vois qu’elle s’arrête à nouveau entre deux bipages tout en tenant un coin de son ventre.

-   Ca va ? Vous êtes fatiguée…, lui ai-je dit à nouveau.

Elle se redresse de la même manière que la première fois, comme pour me faire oublier ce que j’ai vu, et elle me dit, toujours en souriant :

-   Oui… Je suis enrhumée et très fatiguée, c’est pour ça…

-   Faîtes-vous arrêter, lui dis-je, tout en sachant que dans cette société, on ne s’arrête pas forcément quand on est malade, et surtout pas dans la grande distribution. Elle m’en donne la confirmation en disant :

-   Je ne peux pas. Ma collègue s’est arrêtée et elle a pris un avertissement.

Je crois que rares sont les milieux où l’on est traité comme dans la grande distribution. Combien d’histoires rapportées de relations travaillant dans des conditions ultra difficiles où le salarié, en plus d’être très mal payé, est sous l’emprise totale des supérieurs qui se servent de leur pouvoir pour obtenir  tout qu’ils veulent, au détriment des droits les plus fondamentaux des travailleurs. Exemple : la grève. Dans la grande distribution, on observe des salaires de misère, et paradoxalement, c’est un secteur où les grèves sont quasi inexistantes. Et pour cause… Le personnel est interchangeable, le marché en crise, et les salariés savent bien qu’en cas de révolte, ils peuvent se retrouver dès le lendemain matin devant le Pôle Emploi.


« Je peux pas, elle va me le faire payer ». Ca, c’est une autre phrase que les salariés du commerce connaissent bien puisqu’on me la ressort à chaque fois que je dis naïvement : « Mais pourquoi tu ne te sers pas de ton droit à la formation ? Pourquoi vous ne faîtes pas une grève ? Pourquoi tu ne te fais pas arrêter, attends soigne-toi, t’es pas bien… ».

A chacun de mes pourquoi, on me renvoie des répliques dignes d’un bon western : « Je ne peux pas, ma responsable va me le faire payer si je fais ça ». Comment ? En vous confiant à répétition les tâches les plus ingrates de votre travail, en vous planifiant sur les horaires les plus pénibles, en vous refusant vos jours de congés et j’en passe. Dans ces secteurs, vous êtes le maillon faible de la chaîne, forcé à vous adapter à la vie de votre entreprise. C’est celui qui rampera le plus, et le plus longtemps qui pourra espérer tirer son épingle du jeu. A ces horaires impossibles (sortie à 21, 22h30 parfois), et ces vies de familles désorganisées, on a ajouté à présent un nouvel objet de chantage dont pourront user et abuser les dirigeants : le travail le dimanche. Et une nouvelle raison aux salariés de se plier pour ne pas « qu’on leur fasse payer » leur désobéissance d’avoir voulu passer un moment avec leurs proches.

Depuis hier, c’est la grève dans Paris. C’est du moins ce qu’en disent les médias qui relayent l’info, car s’ils ne nous l’avaient pas dit, personne ne l’aurait remarqué. 2/3 rames pour le RER B, trafic normal pour le RER A. Un paradis pour les voyageurs, un enfer pour les cheminots qui vont devoir faire preuve d’imagination pour reconquérir leur droit de grève abattu par le service minimum. L’idée de Dominique Bussereau, ministre des transports en 2007, et Xavier Bertrand, ministre des affaires sociales, est une merveille d’ingéniosité : Faire passer une mesure soit disant en faveur des travailleurs et du service public et taire par la même les trop gênantes et fréquentes revendications sociales des employés de la Ratp et Sncf. Moi aussi, j’ai râlé, moi aussi, j’ai marché plus d’une heure pour rejoindre mon domicile, et j’ai même fait du stop de manière inconsciente. Mais le droit de grève ne devrait jamais être remis en question. Le service minimum, peu importe la façon dont on le présente, est une insulte et une façon subtile de déjouer ce droit fondamental pour lequel se sont tant battus les travailleurs.

Voici un article décousu mes amis. Le seul lien entre ces thématiques est l’insupportable régression sociale à laquelle nous assistons. Et vous savez qui en est responsable : Ce gouvernement d’extrême droite qui ne cesse de faire plier le peuple un peu plus, un peu plus… Jusqu’à quand ? Ne nous laissons pas faire.