Magazine Journal intime

Être au parfum

Publié le 11 novembre 2009 par Pierre-Léon Lalonde
Je prends l'air en attendant mon chauffeur de jour qui est encore en retard. Installé devant les portes du garage, j' observe le nouveau mécanicien qui s'affaire d'un taxi à l'autre. Bien qu'on annonce du temps doux pour les prochains jours, il fait plutôt froid pour le moment et je suis content de voir mon taxi enfin arriver. Mon confrère haïtien prend tous ses trucs et il déguerpit rapidement sans même nous saluer. Je reste avec le mécano pendant qu'il verse de l'huile essentielle au véhicule, je lui donne quelques dollars de pourboire et je vais prendre place à bord du Malibu pour une nuit qui sera bonne, je le sens.
J'ai à peine le temps de refermer la portière que déjà mes sens se dérèglent. L'habitacle du taxi est envahi par un nuage odoriférant qui me fait friser les poils de narines. J'ai l'impression que je viens de plonger dans une bouteille de parfum. Un petit sapin sent-bon à la puissance dix. C'est infect. J'ouvre toutes les fenêtres du taxi et démarre en me disant qu'une bonne aération va venir à bout de ce déversement toxique, mais après quelques minutes, l'odeur reste intacte et je commence à avoir sérieusement froid et sérieusement mal à la tête. La nuit sera longue, je le sens.
Ça me démange de retourner au garage pour mettre le patron au parfum, pour tenter de changer de taxi, pour confronter mon chauffeur de jour dont je devine maintenant les raisons de s'être rapidement volatilisé. Je me doute bien que ça ne devait pas être de mauvaise foi de sa part, mais c'est moi qui me retrouve avec les conséquences. Je le vois bien dans l'attitude de mes premiers passagers que l'atmosphère n'est pas idéal. J'essaie de faire des farces et même des jeux de mots, mais les maux de tête prennent le dessus, ce n'est pas drôle.
Au fil de la nuit, je vais lentement m'habituer à l'odeur et au rôle du chauffeur mal engueulé qui patauge dans de la mauvaise eau de Cologne. Je tente également de ne pas trop prendre personnel les silences, les vitres qui s'ouvrent un peu plus, les gloussements et les petits toussotements polis. Je continue de faire ma job comme si de rien n'était et tente de me convaincre qu'après tout, l'argent n'a pas d'odeur.

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