Elle sort du bus, ouvre son parapluie et courbée sous la frêle protection continue son chemin. Sur le pont, le trafic est dense, la pluie forte, des rigoles transforment les côtés de la route en ruisseau et les voitures soulèvent des gerbes d’eau qui retombent sur le trottoir. Joséphine rase la balustrade du pont, cherchant à se protéger d’un arrosage qu’elle ne veut pas. Arrivée à l’extrémité du pont, elle respire et c’est alors qu’une voiture noire arrive à toute allure et l’asperge. Pantalon et bas de veste mouillés, elle peste contre l’imbécile qui n’a rien vu ou qui a fait exprès, elle ne sait pas. Elle est furieuse et réalise que l’objet de sa colère est arrêté aux feux. Elle hésite puis les paroles de sa collègue reviennent en mémoire : « la première fois est difficile, après c’est plus facile ». Elle prend son courage à deux mains et va taper contre la vitre du passager du véhicule. A l’intérieur, une femme est en train de téléphoner. Elle tourne la tête et continue de parler au téléphone. Joséphine insiste et tape à nouveau contre la vitre qui cette fois, descend.
-Vous trouvez génial d’arroser les piétons ?
-Quoi ?
-Vous m’avez complètement mouillée en ne faisant pas attention à votre conduite, je suis trempée et ce n’est pas agréable, je vous assure. La prochaine fois, pensez aux piétons et faites gaffe.
Elle se relève et s’en va, hésite puis revient vers la vitre.
-Au fait, on ne vous a jamais dit que téléphoner et conduire pousse à faire des conneries ? Vous m’avez trempée, la prochaine fois, vous m’écrasez ?
Très contente d’elle, elle part, laissant la conductrice la bouche ouverte, sans réactions. C’est d’un pas guilleret qu’elle poursuit son chemin, sa nouvelle conduite valant largement les inconvénients d’un pantalon mouillé…