Depuis que je navigue entre Paris et Rome, j'entends souvent les mêmes choses. Que j'ai de la chance, que Rome, que Paris est belle. Des adjectifs, des superlatifs. Paris et ses lumières, son goût pour l'apparat, son chic et son swing, son réseau de transports en commun qui fait l'admiration de mes amis italiens. Rome et son exception, ses siècles à ciel ouvert, sa douceur de vivre à l'italienne et ses accents populaires. Des deux côtés, dans les deux langues, j'entends les mêmes mots. Il y a tellement d'étoiles dans les yeux de mes interlocuteurs, des images de films mythiques et des clichés qui durent encore, des souvenirs de voyages et des vœux de vacances prochaines. Et souvent, je ne sais pas quoi dire en retour.
Personne n'a envie de briser un rêve. C'est embarrassant, j'ai peur de décevoir parce que mon regard est différent. Mais c'est normal lorsque l'on vit quelque part! Plus que l'habitude, dont on se sépare assez aisément lorsque l'on a toujours une valise ouverte - et à moitié défaite - dans son appartement, le responsable s'appelle l'expérience. Parce qu'on finit toujours par connaître les entrailles d'une ville, ses humeurs, ses rumeurs, ses manies agaçantes et ses défauts bien dissimulés sous le clinquant des vernis soignés.
Même au cœur d'un mythe, le quotidien comme partout au monde se vit au jour le jour. Et il est tellement difficile d'habiter et dans l'une, et dans l'autre. Ce serait beaucoup trop long d'expliquer pourquoi... Comme deux cousines envieuses, enfants gâtées par l'Histoire, orgueilleuses de leurs années fabuleuses, elles se complaisent trop dans leurs lumières pâlissantes. Mais elles ont de la chance. Elles savent se faire pardonner. Et aimer. Malgré tout et pour ce qu'elles sont dans le fond. - "Alors, laquelle préfères-tu?"
Pourquoi faudrait-il choisir?
Photos et texte de Peggy Picot, Tous droits réservés