Magazine Humeur

Ma FIAC 2009… et de deux!

Publié le 05 décembre 2009 par Icipalabre

La ballade dans le Saint des Saints de l’art contemporain (le Grand Palais) a un coût: 28 euros. Pour voir de l’art contemporain.
Pas cher, si on considère l’extraordinaire concentration de créations proposées au visiteur. Mais le must - ce pour quoi je ne regrette en rien cette dépense-  réside moins dans les arts visuels que dans la bande son de l’événement. Les petites annonces diffusées à intervalles réguliers dans les hauts-parleurs du prestigieux édifice furent en effet le témoignage exact d’une poétique des plus contemporaines, celle qui renvoie, tout comme certains objets d’art, à la réalité de notre époque :«Les propriétaires de la Porshe Cayenne rouge immatriculée … et du coupé Mercedes Classe E noir immatriculé…. sont priés de bien vouloir déplacer leurs véhicules.»
Un peu plus tard, la même voix annonçait:
«Nous informons les propriétaires des scooters et deux roues stationnés sur les trottoirs de l’avenue Eisenhower en face du Grand Palais, que la police nationale est entrain de procéder à l’enlèvement des véhicules».

Les uns sont «priés», les autres «informés».
Sur les stands de la foire, c’est pareil.

Naomi Campbell par Peter Lindbergh
J’en prends pour preuve cette petite anecdote.
Je suis face à une oeuvre de Peter Lindbergh, une grande photo représentant Naomi Campbell sous les traits de Joséphine Baker (Peter Lindbergh, Naomi Campbell, Vogue italien / Deauville France 1988, 2008 / Edition 3/3 / 263X178 cm / Lightjet C-print).
Je l’observe en silence, ne sachant quoi penser, entre la beauté de l’oeuvre et la beauté du sujet. Quand un homme, sorti tout droit d’un défilé Lagerfeld, s’avance dans mon dos. Il lance à la galeriste, non sans attirer l’attention des autres visiteurs présents:
«Magnifique ce Lindbergh! Exceptionnel.»
La galeriste: « Une belle pièce, n’est-ce pas ?»
L’homme: «J’adore. La Baker version Naomi, c’est énorme ! Elle est à combien ?»
La galeriste: « Elle fait 75».
L’homme: «Haaa ?! Seulement ? Mais c’est un tirage unique ? »
La galeriste: «Heu, non, il y en a 3. C’est le troisième, et dernier. Une pièce rare.»
L’homme: «Ah, non ! C’est pas vrai ?! Deux autres personnes auront la même oeuvre que moi ?! Comme c’est dommage.»
La galeriste: « Oui, je comprends, mais je vous prie de croire que l’identité des deux précédents acquéreurs n’enlève rien à la qualité de l’oeuvre !»
L’homme: «Ah bon ? Oui, sans doute. J’avoue que c’est tentant.»
La galeriste: « N’est-ce pas ? Oui, c’est une oeuvre majeure de Lindbergh. Mais je vous en prie, prenez le temps de la réflexion, cher Monsieur.»
L’homme dit en s’éloignant «Oui, merci,  je vais réfléchir, c’est mieux. Je reviens tout à l’heure. Vous serez encore là ?» .
Dans le même temps, une jeune lycéenne, carnet de notes à la main, s’avance à son tour vers la galeriste: « Excusez-moi Madame, bonjour. Pourrais-je avoir des renseignements sur cette oeuvre de Peter Lindbergh, c’est pour un exposé.»
La galeriste: «Oui, elle coûte 75000 euros».
Les uns sont priés, les autres informés.

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