La FIAC 2009 a offert comme à l’accoutumée son lot de pures merveilles, à côté d’un étalage foutraque de bibelots aussi moches qu’absurdes. C’est tout le problème de ces grands messes planétaires, où plusieurs centaines de galeries scénographient leurs préférences esthétiques et leurs stratégies commerciales, sans se concerter le moins du monde sur la question de la réceptivité du public. On passe d’un grand Soulages à 780.000 euros aux petites bêtes colorées de Murakami à 3.000.000 de dollars, d’une vitrine remplie de clopes écrasées signée Damien Hirst (350.000 euros) à un bronze poli de Brancusi dont on ose à peine imaginer le prix.
Damien Hirst
Dog Days, 2008 / Glas, wood, paint, cigarettes, cigars, ash and lipstick
122X183X12
Constantin Brancusi
Mlle Pogany I, 1913 / Bronze poli sur base en pierre calcaire
H 44,5 cm
Un peu plus loin, un singe en peluche coiffé d’une couronne royale domine un cheval miniature qui semble agoniser sur une colonne recouverte de tissus. Cà me rappelle une phrase de Buffet: «Pourquoi les gens achètent-ils de la peinture figurative ? Ils n’ont qu’à la faire eux-mêmes» .
A toute question , on s’entend répondre: « Vous ne comprenez pas, c’est le marché de l’ART ! ». C’est lui qui dessine les grandes tendances, décide de ce qui est VALABLE , et impose ainsi à tous les autres ce qui caractérise l’art de notre époque. «Lui», ce sont les artistes, collectionneurs, galeristes, investisseurs, commissaires priseurs, qui d’autre ? «Tous les autres», c’est nous, la majorité, la piétaille inconsciente, qui sommes supposés vivre un authentique moment d’extase en flânant autour des stands, en évitant SVP, de fourrer son nez dans la dimension affairiste de l’événement et les négociations de couloir. On n’y a pas notre place.
Un rapide calcul m’aide à mieux réaliser la distance: il me faudrait 166 ans d’indemnités de chômage pour acquérir un Murakami. C’est drôle, comme on ne regrette pas toujours d’être fauché !
Takashi Murakami
Dob in the strange forest, 1999
(adjudication: 3440000 USD)