Des titres, des fonctions : un même ministère
Que signifie donc être Précurseur par la prédication ? Sous différentes images se complétant l'une l'autre, on peut faire l'approche de ce qu’a été son rôle très particulier. Elle recouvre la même réalité. Abordons-les rapidement !
Le héraut avant-coureur du roi
Dans l'Antiquité, lorsque le Roi faisait sa joyeuse visite dans une cité, il était toujours précédé d'un héraut qui, déployant un parchemin et faisant résonner les trompettes, annonçait les titres du Souverain en train d'arriver. Plusieurs mois ou plusieurs semaines à l'avance, ce héros faisait le tour de toutes les cités.
Impensable qu'un Roi puisse débarquer à l'improviste sans être attendu, sans que la cité ne soit préparée à le recevoir ! Lorsque le héraut était passé en signalant les dates approximatives de la venue, alors se déclenchaient tous les préparatifs d'accueil.
Jean est ainsi le héraut singulier du Roi des rois. Il est son porte-étendard. Il est l'avant-coureur, mais aussi celui qui court devant (en anglais : forerunner), qui court devant le char du Roi. (On se rappelle que lorsque Samuel veut dissuader le peuple de demander un roi, il lui dit : « Il prendra vos fils et il les mettra sur ses chars et parmi ses cavaliers, afin qu'ils courent devant son char » 1 S 8,11.)
Car s'il y a le héraut lointain qui, des mois et des semaines à l'avance, vient susciter les préparatifs, il y a aussi celui qui le précède immédiatement, au début du cortège royal. Et Jean est aussi celui-là. Plus tard, le Seigneur enverra en avant de lui en mission les Soixante-douze, en toutes cités et lieux où il devait lui-même venir (cf. Lc 10,1). Ils le précèdent. Ils relaieront Jean-Baptiste.
Le porte-flambeau du Seigneur
Mais pour Jean, il y a encore plus : non seulement il annonce celui qui vient, non seulement il proclame sa venue imminente, mais déjà il en porte la flamme. Dans toutes les cités où passe la flamme olympique, on sait que les jeux vont bientôt commencer. On peut dire que Jean est le marathonien de la flamme olympique, avant que ne s'ouvre le grand jeu de la Rédemption. Il porte la flamme qui va venir partout embraser. Il est le porte-flambeau, l'oriflamme, ou plutôt la torche vive du Seigneur.
Lors des jeux olympiques de Rome, on avait branché un micro sur la poitrine du dernier marathonien. Pendant qu'il montait en courant vers la grande vasque à embraser, le monde entier pouvait entendre les pulsations rapides de son cœur, ainsi que son souffle court et saccadé.
L’Ange de la face
En fait, le texte original de Luc (10,1) est : « il les envoya devant sa face ». Jean porte le titre admirable de : Ange de la Face.
D'abord Ange (angelos) : il est messager, porteur du message même de Dieu, dont il est dit au début du livre de la Consolation :
« Monte sur une haute montagne, joyeux messager de Sion ! Élève et force la voix, messager de Jérusalem ! Crie aux villes de Juda : Voici votre Dieu, voici le Seigneur qui vient avec puissance ! » (Is 40,9-10).
Et plus loin encore, ces paroles qui s'appliquent à Jean comme à nul autre :
« Qu'ils sont beaux au sommet des montagnes les pieds (ou les pas) du messager de bonnes nouvelles qui annoncent la paix ! » (Is 52,7 )
Non seulement qui l’annonce, mais qui la donne :
« Qui apporte le bonheur »
Et quel est ce bonheur ? C’est une personne, c'est le roi. Le héraut « dit à Sion : ton Dieu règne ! » (Is 52,7).
D'emblée et immédiatement, avant même de prononcer son nom et dès le deuxième verset de son Évangile, Marc présente Jean :
« Comme il est écrit dans le prophète Isaïe, voici : j'envoie devant ta face un Ange pour préparer ta route ! » (Mc 1,2)
En fait, Marc attribue à Isaïe le texte de Malachie. Le seigneur lui-même, dans son grand éloge du Précurseur, citera aussi le même texte de Malachie pour définir la mission et la personne de Jean :
« Voici : je vais envoyer mon Ange pour qu’il fraie un chemin devant moi ! Et soudain il entrera dans son sanctuaire, le Seigneur que vous cherchez ! L’Ange de l'Alliance que vous désirez, le voici, il vient ! » (Mt 3,1)
Ange, mais aussi ambassadeur du Christ : son délégué. Il va parler en son nom. Les apôtres seront ses ambassadeurs qui suivront sa venue ; Jean est celui qui le précède. Il re-présente déjà la Présence qui s'approche. De cet immense corps diplomatique de Dieu, il est le premier. Il est le nuntius, le nonce apostolique de l'Apôtre par excellence : Jésus !
Bref, Jean est l'envoyé de l'Envoyé du Père. L'ambassadeur de l'Ambassadeur du Père. L’ange de l'Ange du Grand Conseil (Is 9,5).
(à suivre)