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Du Cambodge (II) : Les enfants de la décharge

Publié le 07 décembre 2009 par Voilacestdit


Elle s'appelle Moline. C'est une jeune femme cambodgienne, avenante, avec laquelle nous avons sympathisי, que nous avons rencontrיe dans la boutique de commerce יquitable qu'elle tient א Phnom Penh. C'est elle qui nous a fait connaמtre  l'association Pour un Sourire d'Enfant [PSE] qui prend en charge des enfants issus de Stung Mean Chey, la grande dיcharge de Phnom Penh.
Moline nous a dit : Venez les voir. C'est ainsi que nous avons traversי avec elle en tuk-tuk une partie de Phnom Penh pour rejoindre une banlieue trטs pauvre. A un moment nous avons quittי la route principale pour nous engager dans des ruelles dיfoncיes, et brusquement, א un dיtour de chemin, nous nous sommes trouvי face א une grande enceinte renfermant plusieurs bגtiments, des cours, des prיaux, avec des centaines d'enfants, impeccablement habillיs d'un chemisier blanc et d'une jupe bleue pour les filles, d'une chemise blanche et d'un pantalon bleu pour les garחons, s'יgayant en tout sens dans un joyeux brouhaha. Nous avons du mal א rיaliser que tous ces enfants viennent de la dיcharge, toute proche.
Du Cambodge (II) : Les enfants de la décharge
Nous apprenons l'יtonnante histoire de PSE. Tout dיmarre en 1995. Christian et Marie-France des Palliטres, un couple א l'גge de la prי-retraite, dיcouvrent la dיtresse des enfants qui travaillent, vivent, se nourrissent sur la dיcharge de Phnom Penh. Ils dיcident immיdiatement d'agir. "Il n'יtait plus question de rentrer chez soi et de dormir tranquille". Leur premiטre action : distribuer un repas quotidien, le matin, sur la dיcharge, א une trentaine d'enfants. Mais ils sont des centaines, affamיs, dont certains n'ont jamais quittי leur village de cabanes, au pied du tas d'ordures. Leur demande unanime : "Manger et יtudier".
Mobilisant leur famille, leurs amis, leurs rיseaux, d'anciens collטgues [lui a יtי cadre dirigeant international chez IBM], les des Palliטres rיussissent א יlargir leur action : distribuer plus de repas sur la dיcharge, et ils commencent א prendre des enfants chez eux, ouvrir une classe. Mais tout va trטs vite. Ils יtaient une dizaine d'enfants inscrits sur la premiטre liste d'urgence en 1995. Ils sont aujourd'hui 4000... Il a fallu s'organiser, mobiliser des moyens, faire des tournיes en France pour susciter des parrainages, bientפt acheter un terrain tout prטs de la dיcharge, et commencer א bגtir : c'est le terrain sur lequel nous sommes aujourd'hui, couvert d'une vingtaine de constructions, abritant des salles de classes, un dortoir pour une soixantaine de pensionnaires, des ateliers de formation (secrיtariat, boulangerie, buanderie), une יcole hפteliטre, un restaurant, bientפt d'autres ateliers de formation professionnelle (mיcanique etc).
Les enfants au Centre sont au nombre de 2000 (2000 autres sont scolarisיs א l'extיrieur et suivis). Seuls soixante pensionnaires, des enfants qu'il faut spיcifiquement protיger, logent sur place. Les autres rejoignent le Centre le matin א 6H30, venus א pied, א vיlo... Chaque enfant se lave les mains et prend un petit-dיjeuner א base de riz et de lיgumes, puis tous se douchent selon la mיthode cambodgienne, drapיs dans leur krama, et lavent un de leur deux uniformes qui, sיchי, sera redistribuי le lendemain matin. Commencera alors, aprטs la cיrיmonie au Drapeau, comme dans toutes les יcoles au Cambodge, une journיe d'enseignements de diffיrents niveaux, יcole primaire, collטge, enseignement gיnיral, mais aussi danse traditionnelle (nous sommes au pays des "apsara"), thיגtre, formation professionnelle pour les plus grands. Le soir les enfants retournent chez eux... parfois dans des cabanes au pied de la dיcharge.
Grגce א Moline, nous avons pu rencontrer Christian et Marie-France des Palliטres [Moline est mariיe א un de leurs fils, ce sont ses beaux-parents...]. Une rencontre brטve mais intense. Il se dיgage de ce couple exceptionnel une profonde impression de force et en mךme temps de douceur. Ils se disent comblיs d'amour, vivant au milieu des enfants dans une maison au centre du terrain. Les enfants les appellent Papy et Mamie. De fait, malgrי l'יnormitי de la tגche et les soucis liיs א l'organisation et au dיveloppement permanent de l'association, le coeur de leur prיoccupation c'est  l'יcoute des enfants, comme ils l'ont fait depuis le dיbut sur la dיcharge.
Beaucoup de choses partent des initiatives des יlטves. Un Groupe d'Ecoute, par exemple, a יtי mis en place : sept filles de terminale qui ont ouvert une sorte de bureau des confidences. "Nous avons vu qu'il y avait beaucoup d'enfants tristes, qui avaient des problטmes et nous avons voulu faire quelque chose pour eux. On a pensי qu'il fallait parler de ses problטmes pour pouvoir les rיsoudre et nous sommes sept amies sיrieuses qui avons dיcidי d'יcouter ceux qui ont besoin de parler. C'est secret : ils peuvent nous faire confiance".
Partant de l'יcoute des besoins de l'enfant et soucieux de la prise en compte globale des problטmes : hygiטne, santי, famille  (beaucoup de problטmes de violence et de sיvices), un atelier de couture a יtי crיי s'adressant aux mטres des enfants (fabrication des uniformes et d'objets vendus dans une boutique א l'intיrieur). Des emplois sociaux aussi ont יtי crייs pour les parents en grandes difficultיs, les soutenir dans un but d'insertion.
PSE est aussi une sorte de laboratoire du futur qui se veut participer א la re-crיation des valeurs aprטs le traumatisme des kmers rouges. Une fois par semaine Christian des Palliטres donne א l'ensemble des יlטves rassemblיs un cours de morale trטs interactif. Les enfants discutent des propositions. Des saynטtes sont jouיes. "Il ne s'agit pas seulement d'enseigner mais de refaire les coeurs"...
Autre point notoire : le souci des des Palliטres de s'entourer de collaborateurs kmers. Ils sont 300, formיs א leurs mיthodes innovantes, qui oeuvrent dans le Centre ou participent א l'animation des יcoles autour de la dיcharge, partageant le mךme amour des enfants. Christian des Palliטres, quant א lui, n'est pas le prיsident de l'association, il n'est que l'un des administrateurs. Il ne veut pas que PSE soit sa chose. Le conseil d'administration est composי de personnalitיs fortes chargיes d'apporter des compיtences diffיrentes et d'autres faחons de voir.
L'action de PSE pour sortir les enfants de la dיcharge et les accompagner jusqu'א ce qu'ils aient un mיtier est א tout point exemplaire. Elle mיrite d'ךtre connue, soutenue. L'essentiel des ressources de l'association vient du sponsoring, du mיcיnat, et des parrainages [Pour 36 euros par mois un enfant est nourri, soignי, יduquי]. Dans l'engagement des dיpenses revient toujours la question : est-ce vraiment dans l"intיrךt des enfants ? La rטgle d'or c'est : pas de gגchis. Grגce א une gestion trטs rigoureuse PSE rיussit א maintenir les frais gיnיraux א 7%, un taux que peu d'ONG parviennent א respecter.
Telle est la trטs belle rencontre que nous avons faite. La puissance du coeur qui relטve le dיfi d'une situation dramatique par la crיation d'une entreprise humaine exceptionnelle.

Pour accיder au  Site de PSE


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