# o5 — OPÉRATION 'BISCUIT DU DÉSERT'

Publié le 18 décembre 2009 par Didier T.
Deux garçons de six et onze ans, deux frères.
Le Petit, hé bien, évidemment, comme il est petit, dans sa vie quotidienne il souffre un peu avec le Grand, parfois —c’est la nature humaine. Mais comme il est malin, le Petit, point trop d’années ne lui furent nécessaires avant de comprendre comment s’y prendre pour neutraliser l'impérialisme du Grand. Obligé de se la jouer défensif avec ses cinq ans de moins, le Petit tape donc régulièrement son numéro de victime immaculée auprès de sa mère... qui de facto punit le Grand, parfois pour des méfaits pas toujours très réels qui compensent toutefois d’autres injustices enfantines restées hors compétence du redouté TPM (Tribunal Pénal Maternel) —intox fructueuse auprès de l'Autorité c’est de bonne guerre de la part du cadet un peu léger en armes de destruction massive, et ça dissuade l’aîné de trop utiliser n’importe comment sa force de petite frappe dans des ‘opérations liberté immuable’ à vocation multibouffes unilatérales (même à onze ans, on ne peut pas pendre Saddam Hussein tous les jours). Tout ça crée un espèce d’équilibre fraternel qui brinqueballe un peu, m’enfin, ça le fait à peu près, du moins tant qu’aucune des parties n’abuse trop des prérogatives consubstantielles à son statut biologique. Rien de nouveau, 'la force du faible & la faiblesse du fort', un mode de fonctionnement immémorial et comme qui dirait universel, un mode de fonctionnement qui a cependant la fâcheuse particularité de pouvoir très vite dégénérer en guerre civile —ce qu’on voit par exemple à l’œuvre en ce moment-même, heu... un peu partout sur Terre.
# o5 — OPÉRATION 'BISCUIT DU DÉSERT'
Guerre civile que l’on a donc aussi vue à un moment sévir entre les deux frères, le jour où le Petit a fait salement punir le Grand pour un crime parfaitement imaginaire. Et suite à cet incendie du Reichtag de bac à sable, hé bien, le Grand, forcément, a décidé d'envahir la Pologne de bac à sable. Mais comment faire? Le Grand ne pouvait pas latter le Petit en frontal, sinon, il savait bien, il prendrait double-dose au TPM avec révocation de tous ses sursis et zéro bonbecs avant longtemps, vu comment ce petit agneau de pure innocence larmoyante savait trop bien y faire pour enfumer le magistrat instructeur. Mais en même temps, vu comment il avait reçu pour rien avec le TPM, le Grand ne pouvait laisser passer une pareille saloperie, il lui fallait frapper fort pour pas que s'installent de mauvaises habitudes... Bref, la situation est devenue aussi simple que la régularisation de tous les sans-papiers.
Pendant plusieurs jours après le forfait du Petit, le Grand rumine... et bien sûr, dès que le TPM a le dos tourné le Petit se fout ouvertement de sa gueule en lui rappelant comment il a été puni pour rien. Énervant.
Le Grand cherche, cherche... cherche... Jusqu’au moment où il trouve comment niquer son Petit, le Grand. Et comme c'est souvent le cas, la solution perche complètement ailleurs que là où il cherche et en plus il la trouve à un moment où il ne cherchait pas, il la trouve bêtement en circulant dans le garage, une illumination en forme de gros sac. "Bon sang! Mais c'est bien sûr!". Ah. Entre ici, ô petit ange martyrisé par une grosse brute...
Les parents ont un chien. Pour le nourrir, deux gamelles —une alimentée avec des restes de barbaque, l’autre avec des biscuits. Pour la gamelle à biscuits, un gros sac de 25 kilos en papier kraft. Alors le Grand récupère un morceau de choco BN qu’il taille au format d’un biscuit pour chien, qu’il pose exactement au sommet du sac dans le garage. Et puis il s’arrange pour y faire venir le Petit. Une fois sur zone avec le Petit sur les talons, le Grand chope son bout de choco dans le gros sac en papier kraft et le mange en disant un truc genre “wow! c’est superbon!!!”. Le Petit approche du gros sac sa bonne bouille angélique de 'Tintin au pays des soviets', et... son bras se lève... et... sa main plonge dans le sac... et... et... enfin bon, voilà. Suivi d'une grosse crise de rire pour l'un, grosse crise de larmes pour l'autre. Tout ça restant définitivement impuni. Car quand on a soi-même avalé un biscuit de son plein gré sans menace ni contrainte ni violence, comment porter plainte au TPM sans aussitôt passer pour ce qu'on est? Hein, comment?... Et que faire sans missiles sol-sol? Hé bien on réagit exactement comme le malheureux qui a acheté la Tour Eiffel.
Depuis ce jour et jusqu'ici, il ne m’a plus jamais fait punir abusivement, mon petit frère.
***Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu