Elle avait commandé la dinde, cinq kg pour 14 personnes. Elle l’avait voulue du coin, une dinde bien de chez elle, nourrie aux grains et ayant pu vivre en plein air sa courte vie. La mise à mort de la bête ? Elle préférait ne pas l’imaginer, cela allait lui perturber sa digestion.
Elle devait passer la prendre dans l’après-midi du 24 décembre et c’est ce qu’elle fit. Elle avait vaguement regardé sur internet le trajet pour se rendre dans cette boucherie perdue au milieu de la campagne vaudoise et comptant sur la chance des nulles en géographie, elle avait pris le volant et était partie.
Bon, passé le village d’Assens, elle avait bifurqué en direction du Jura et se retrouvait sur des routes secondaires. Le paysage n’était pas très engageant, la pluie avait remplacé la neige qui noircissait et se tassait au bord de la route. Cela sentait la désolation, loin de l’idée carte postale des veillées de Noël surtout qu’au loin, au pied du massif du Jura, une bande de stratus posait son chapeau sur l’horizon et amplifiait ainsi cette impression terne.
Ne retrouvant pas le nom des villages qu’elle devait traverser, elle fit une halte et sortit la carte du vide-poche. C’est à ce moment qu’elle réalisa qu’elle s’était trompée de village, ce n’était pas à Assens qu’elle aurait dû bifurquer mais à Aclens et ce dernier se trouvait à l’ouest alors qu’elle allait au nord. Bon, elle avait tout faux, elle rebroussa chemin en zigzaguant en fonction des noms de villages qu’elle repérait sur la carte mais qu’elle ne trouvait jamais sur sa route. Elle fit cinquante km pour rien à aller de droite et de gauche, s’arrêta un nombre de fois pas possible pour essayer de s’orienter et finalement demanda son chemin alors qu’elle était dans le village à côté de celui qu’elle cherchait.
Enfin la boucherie apparut sur sa droite et elle parqua. Sa dinde l’attendait sagement, le sourire du boucher était de rigueur quand elle lui expliqua qu’elle s’était perdue et il se permit de lui suggérer de demander au père Noël…un GPS !