Fin d'année
Par Gary Victor, journaliste et romancier
L'année 2009 prend fin. Notre pays n'arrive toujours pas à prendre le chemin qui lui permettrait de prendre sa place dans le concert des nations. On reçoit certes des délégations étrangères. D'anciens présidents encore en position de force effectuent des tournées avec, dit-on, des investisseurs. Les Nations-Unies en Haïti se donnent constamment de bonnes notes. Mais, nous, Haïtiens, avons conscience que rien ne se passe tout simplement parce que nous ne pouvons pas encore nous offrir une gouvernance moderne, avec une compréhension claire de notre passé et de notre présent pour penser un futur qui nous redonnerait un tant soit peu notre fierté.
La politique haïtienne malheureusement, reste toujours aux mains des mêmes familles, des mêmes petits groupes, dont le seul objectif est de perpétuer un pouvoir dédié à leur seul intérêt. Ces familles, ces groupes, ont toujours eu le génie de maintenir notre peuple dans son ignorance pour le manipuler. On est alors constamment dans ce cas de figure absurde où la population choisit toujours des dirigeants qui travaillent contre ses intérêts.
Mais le fait qu'un groupe aussi fermé soit-il, garde le pouvoir, serait un moindre mal s'il avait seulement la décence de soigner sa propre image. On n'a qu'à voir comment se sont dégradées au fil des années les hauteurs de Pétion-Ville, de La Boule pour se dire que, définitivement, il y a quelque chose qui cloche dans la tête de cette race supérieure qui a les rênes de ce pays depuis 1804. On survole depuis des années un bidonville hallucinant pour atteindre un aéroport international. Aucune politique de logement n'a jamais été vraiment pensée voir lancée.. Voici une faculté de médecine fermée depuis des mois dans un pays qui manque de médecins alors que dans aucun cas de figure on n'aurait dû tolérer cela. Pendant ce temps, nos cadres médicaux formés à Cuba sont pratiquement laissés à eux-mêmes.
Au niveau de l'éducation, la commission présidentielle a effectué sur le papier un travail intéressant, mais on sait déjà qu'avec cette gouvernance, ses recommandations ne feront pas long feu. Un petit tour sur nos routes, partout dans l'arrière-pays, nous fait découvrir constamment un pays abandonné, laissé à lui-même où une population se démerde pour vivre face à un État inutile et partout combien prédateur.
Nous allons aux élections. Je suis étonné de voir à la fois l'intérêt suscité par ces joutes électorales dans de nombreuses circonscriptions, mais plus encore par l'absence de toute réflexion, de toute proposition sérieuse de la part des candidats. Tout se résume à des batailles de personnalités et à une question de fric et de relations personnelles. Plus les problèmes du pays se font aigus, plus l'intelligence et l'imagination semblent déserter cette terre. On parle d'un pouvoir qui veut rester en place. On ne sait pas trop pourquoi. Mais il semble qu'il le fait en faisant le pari de la médiocrité et du néant avec comme la bénédiction d'une partie de la communauté internationale. Il faut dire aussi à la décharge de ce pouvoir que ladite opposition depuis toutes ces années s'est montrée aussi nulle. Bref !
Certains diront que ce n'est pas essentiel de parler cinéma. Avatar, un grand film de science-fiction fait courir les foules partout au monde. Nous, il nous faudra attendre pour voir ce film en Haïti qu'il sorte en DVD. On le verra certainement dans les salles en République dominicaine, à la Jamaïque, partout dans la Caraïbe. Nous sommes le seul pays du continent et peut-être même au monde, à ne pas disposer d'une salle de cinéma. Nous en avions plus d'une vingtaine dans le temps seulement à Port-au-Prince. Je crois seulement pour une question de décence, que l'État aurait dû intervenir pour en garder quelques-unes fonctionnelles en Haïti...
Voici que je parle de décence là où il n'y a rien. Que du vide. Que du manque d'imagination. Le Ti kounouk est vraiment le mot clé pour comprendre tout un fonctionnement mental dans ce pays du haut au bas de l'échelle sociale.
Avez-vous réfléchi au fait qu'on ait prévu la campagne électorale en pleine saison d'exercice carnavalesque alors que la simple logique aurait dû permettre de se rendre compte que cela n'est pas sécuritaire ?
Pour l'instant, je ne peux que souhaiter aux lecteurs de cette chronique bonne et heureuse année 2010.
Gary VictorYon gwo AYIBOBO pou ou men m zanmi m ki vizite lakou sa pou pwan nouvèl zanmi lakay ak lòt bò dlo.