Puis, faisant référence à l'Apocalypse, il parle du sang des "6 millions (de juifs) massacrés" et conclut par ces mots : "C'est ce sang dans l'affreux silence du Vatican qui étouffe tous les chrétiens. La voix d'Abel ne finira-t-elle pas par se faire entendre ?" Peut-on imaginer plus claire prise de position ?
Jacques Maritain, dont la réflexion sur l'antisémitisme s'est approfondie au cours des années 1930, était lui-même intervenu, dès 1942, pour obtenir de Pie XII une
encyclique "qui délivrerait beaucoup d'âmes angoissées et scandalisées". Il avait même proposé, la même année, de faire du Yom Kippour un jour de prière pour les chrétiens en faveur des juifs
persécutés. L'on sait que toutes ces démarches restèrent lettre morte.
On se souviendra du contenu de la lettre adressée par Edith Stein au pape Pie XI en avril 1933. Elle démontre sa lucidité sur la nature du régime nazi,
notamment en ce qui concerne le destin réservé au peuple juif.
Comment parler ? Comment agir ?
La Croix-Rouge, informée dès l’automne 1942, s’attacha à poursuivre, dans la discrétion, son action humanitaire. Pour les Alliés, réunis aux Bermudes le 19 avril 1943, renforcer l’effort de
guerre était le meilleur moyen de mettre un terme à la Shoah.
Quant à Pie XII, excellent connaisseur de l’Allemagne et de ses maîtres nazis, il avait été profondément blessé par les conséquences dramatiques de la dénonciation, le 26 juillet 1942, du sort
réservé aux juifs par Mgr Johannes De Jong, archevêque d’Utrecht et primat de l’Église hollandaise. Dans les semaines qui ont suivi, plusieurs milliers de catholiques hollandais d’origine juive
(dont Edith Stein) ont en effet été déportés vers les camps de la mort.
Pie XII, nonce durant douze ans en Allemagne (en Bavière puis à Berlin), il est nommé secrétaire d’État par Pie XI en n1930 et signe en 1933 le concordat avec l'Allemagne, alors que Hitler accède
au pouvoir. Jusqu’en 1939, il cherche avec Berlin un accord préservant les catholiques allemands.
477 juifs italiens, dont le grand rabbin de Rome, furent hébergés à l’intérieur du Vatican, et plus de 4 000 ont trouvé leur salut dans des institutions ou des bâtiments d’Église (dont la
résidence papale de Castel Gandolfo), ouverts sur instruction de Pie XII.
Le 16 octobre 1943, les nazis déportent 1 020 juifs de Rome vers Auschwitz. Quinze en reviendront. Informé de la rafle, Pie XII avait décidé de ne pas protester personnellement, mais de passer
par l’intermédiaire du recteur de la mission allemande de Rome, Mgr Hudal. Le pape a-t-il, ce jour-là, sous-estimé sa propre autorité morale ? Le débat reste
ouvert.
Pour comprendre, aujourd'hui, la motivation de Benoit XVI, ne serait-ce pas de regrouper autour de cette béatification: J.P. II, Pie
XII - pour leur implication , elle certaine, contre le symbole des erreurs de la modernité: le bolchévisme, ... rejoint par Pie IX, béatifié par JP II...?
Mes questions restent de savoir, pourquoi béatifier un pape quand il ne fait que son ' travail ' ? Pourquoi béatifier Pie XII, qui selon l'argument même de ceux qui le défendent, est resté
collé à la problématique de son époque, et n'a pas su poser un acte prophétique, non-ordinaire .. etc.. ?