On se demande bien pourquoi Nathalie Pages prendrait l'avion. Mais, peut-être, enhardie par son récent salaire,
projette t-elle un voyage pour l'été en Italie.
Elle devra couvrir ses épaules à l'entrée des basiliques romaines. Mais à l'aéroport, peut-être lui demandera t-on, dans la grammaire universelle des injonctions contradictoires, qui
est loin d'être une idiosynchrasie italienne, de se dénuder entièrement.
Sous les portiques d'aéroport, on ne fait pas pousser de glycine. Sous les portiques d'aéroport, la nudité n'est pas le signe d'un embarquement immédiat vers des envols délicieux. Plutôt la
menace de rester au sol à tout jamais.
La nudité des aéroports est une image de plus, une image médiatisée, une image par truchement. La nudité n'est plus l'approche. La nudité sert le soupçon. Car sous la peau scannée peut-être
se cachent encore d'autres armes? Sous la boite cranienne peut-être se cachent encore d'autres noires préméditations?
Quels autres examens invasifs devra subir Nathalie dans quelques mois, dans quelques années, sous les portiques d'aéroport?
99,9% des passagers sont d'honnêtes gens", dit le Président de l'autorité italienne pour le transport aérien, "mais nous devons tous les contrôler avec le même soin "(Le Monde du 1er
janvier).
Rien ne permet de penser que Nathalie fait partie des 0,1% restant. Rien. Et pourtant, en elle, quelque chose s'apprête à exploser. Sa pudeur? Ou bien sa colère?