D'autres amendements inacceptables (parce qu'inutiles ou bien mauvais)
2eme Partie
Dans les Constitutions républicaines de 1806 et de 1816, un article, respectivement 112 et 147, prévoyait que le Conseil des Secrétaires d'État assurerait l'intérim en attendant l'élection d'un nouveau président. Dans la pratique, c'est le Secrétaire d'État qui a été choisi comme président intérimaire : Bruno Blanchet (janvier-mars1806), Jean-Chrysostome Imbert (mars 1811, mars 1815 et mars-avril 1818), André Pilié (mars-avril 1843).
À partir de 1843 jusqu'en 1950, il n'y eut plus de concept de Président provisoire. Ce fut le Conseil des Ministres, sous la présidence du Président du Conseil (premier ministre), Chef du Gouvernement quand il y en avait un, que l'intérim était assuré, article 108 en 1843, 119 en 1846, 198 en 1867, 115 en 1874, 104 en 1879, 36 en 1888 avec en cas de défaillance du Conseil des Ministres, le Comité permanent de l'Assemblée Nationale, 93 en 1889, 77 en 1918, 81 en 1932, 39 en 1935 et 86 en 1946 ...
Cette situation constitutionnelle a débouché sur 2 cas de figure, selon qu'on se soit trouvé dans une hypothèse heureuse ou une hypothèse malheureuse.
- L'hypothèse heureuse a été le cas de mort du Chef de l'État en exercice, de causes naturelles ou accidentelles. Cas des Présidents Guerrier en 1845, Riché en 1847, Hyppolite en 1896, Leconte en 1912 et Auguste en 1913.
Le Conseil des Ministres a exercé un intérim très court et le nouveau président a été démocratiquement élu par l'Assemblée Nationale, tout en étant une personnalité membre ou bien proche du pouvoir en place.
- L'hypothèse malheureuse : Renversement de Rivière Hérard, de Geffrard, Salnave, Domingue, Canal, Salomon, Légitime, fin du mandat de T. Sam, renversement de Nord Alexis, Antoine Simon, Michel Oreste, Oreste Zamor, Davilmar Théodore, Vilbrun Guillaume Sam, Elie Lescot, Dumarsais Estimé. Ici, cet article n'a jamais joué et il y a eu des gouvernements provisoires extra-constitutionnels : ceux de 1867, le gouvernement provisoire de Saget en 1869, le gouvernement provisoire de 68 jours du Président Joseph Lamothe en 1879 et celui de 20 jours de Salomon lui succédant à la suite du coup d'État militaire du général Richelieu Duperval, les trois gouvernements provisoires de Boisrond Canal 1876, 1888 et 1902, le gouvernement insurrectionnel d'Hyppolite en 1889.
En 1874, à la fin du mandat constitutionnel de Saget, on a un proche du pouvoir en place, le général Michel Domingue, qui s'empare du pouvoir après avoir fait sa propre Constitution et s'être fait nommer président dans un simulacre d'élection.
Après la première Occupation, à la chute des présidents Lescot et Estimé, on a eu des gouvernements de facto avec les mêmes personnages. Point n'est besoin de revenir sur ce qui s'est passé en 1957.
A partir de 1957, les choses étaient devenues encore plus simples : Duvalier avait supprimé dans ses Constitutions toute notion de vacance présidentielle.
L'article 149 et l'article 81 avant lui ont permis aux juges Nemours Pierre-Louis, Ertha Pascal Trouillot, Joseph Nérette, Emile Jonassaint et Boniface Alexandre d'occuper la présidence provisoire de la République, assurant une certaine forme de continuité de l'État, et évitant de tomber dans les schémas malheureux de 1844 à 1950 discutés plus haut.
D'après le nouvel article 149 proposé, on retombe dans les 2 cas de figure déjà exposés.
Ou bien le Président disparaît brusquement par mort naturelle ou accidentelle, et le Premier Ministre assure l'intérim avec ses Ministres et peut avec l'aide d'un CEP complaisant propulser au pouvoir quelqu'un de son choix (hypothèse calme).
Ou bien, le départ du Président est le fruit d'un mouvement de protestation populaire de type GNB, et le Premier Ministre et les Ministres politiquement discrédités sont obligés de partir aussi. L'article 149 sera « épuisé » et il faudra créer à partir de rien un gouvernement provisoire qui pourrait être bientôt renversé à son tour (hypothèse mouvementée).
Une pareille situation peut et doit être évitée en recourant à l'intérim assuré par les juges de notre Cour de Cassation.
Nous faisons remarquer que l'une des raisons avancées pour les amendements à la Constitution de 1987 est le souci d'économie avec des élections générales tous les cinq ans. Cependant personne n'est dupe quant à la finalité de ce changement majeur proposé.
Cela cache une volonté de s'emparer de l'appareil d'État et de se maintenir au pouvoir. Nous y reviendrons plus loin. Le nouvel article 149 proposé prévoit que si la vacance présidentielle se produit durant les trois premières années du mandat présidentiel, un nouveau président est élu au suffrage universel pour le temps qu'il reste à courir.
Si c'est une vacance qui se produit à partir de la 4e année du mandat présidentiel, le nouveau président élu pour le temps qui reste à courir, le sera cette fois-ci par l'Assemblée Nationale, et il sera dans ce cas affublé du titre de « Président Provisoire ».
Cela est assez alambiqué et le risque de faire élire un homme du pouvoir en place s'en trouve accru.
Les rédacteurs des amendements proposés ont pris la précaution par un article # 149.1 ajouté, de dire que ces nouveaux présidents élus sous l'empire du nouvel article 149 seront réputés avoir complété un mandat présidentiel.
L'article 149.2 dit qu'aucune procédure d'interpellation du Gouvernement ne peut être entamée durant les périodes d'empêchement temporaire du Président de la République ou de vacance présidentielle. Dans le cas où une telle procédure aurait été entamée avant la période, elle est suspendue.
Cet article ajouté est-il vraiment nécessaire ?
Ne peut-on aménager son contenu par une loi ? Nous faisons ensuite remarquer que ce nouvel article 149.2 ajouté laisse ouverte la possibilité pendant ces périodes spéciales d'interpeler et de censurer individuellement les Ministres en vertu de l'article 172 (petite censure).
L'article 157 concernant le Premier Ministre aurait dû être dénoncé pour harmoniser son libellé avec la nouvelle notion d'Haïtien de naissance qui remplace celle d'Haïtien d'origine, comme on l'a fait pour l'article 135 concernant le Président de la République. Or il n'a pas été dénoncé. Il est trop tard pour le faire.
L'article 158 amendé fait recevoir la déclaration de politique générale du Premier Ministre par l'Assemblée Nationale, non plus par les deux Chambres siégeant séparément, mais ces dernières tout en siégeant en Assemblée Nationale voteront quand même séparément pour approuver la déclaration de politique générale. Cela frise l'absurde.
L'article 158.1 réduit la ratification du choix du Premier ministre à un simple contrôle des pièces soumises à l'appui de sa candidature préalablement étudiées par une Commission bicamérale spéciale de (9) Députés et de six (6) Sénateurs. Elle se fera au cours de la même séance prévue pour la présentation de la déclaration de la politique générale et du nouveau gouvernement. Encore la même philosophie expéditive. Les deux Chambres n'aurait plus leur mot à dire quant à la personne du Premier Ministre désigné. La voie est grande ouverte pour l'accession des copains ou des laquais du Président de la République au poste de Premier Ministre.
Le nouvel article 159 a un alinéa ajouté à l'ancien, dans lequel il est dit que le pouvoir réglementaire du Premier Ministre s'exerce par Arrêté du Premier Ministre (rien qui ne pouvait être dit par une loi !).
L'article 165 prévoit le cas où un Premier ministre expédiant les affaires courantes serait empêché ou se retirerait du poste. Le Président de la République pourrait alors choisir un Premier ministre intérimaire parmi les ministres en poste, en attendant l'installation du nouveau gouvernement. Ceci est une bonne chose en soi, mais cette petite chose justifie-t-elle un amendement de la Constitution ?
Un article 172.1 ajouté précise les conditions pour être ministre (rien qui ne puisse être réglé par une loi).
Un article 175 modifié concernant la nomination des Juges se trouve dans le texte publié au Moniteur mais non dans le texte qui a été voté.
L'article 183 qui donne à la Cour de Cassation le pouvoir de se prononcer sur la constitutionnalité des lois est supprimé, à cause de la création d'un Conseil Constitutionnel.
L'article 183.1 est supprimé, car il donnait au Parlement la possibilité de donner son interprétation d'une loi, par une autre loi interprétative.
Un article 184.2 proposé traite du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire déjà organisé par un texte ayant force de loi.
Un chapitre est ajouté au Titre VI traitant des Institutions Indépendantes concernant la création d'un Conseil Constitutionnel de 9 membres.
Nous signalons d'abord que, du point de vue de la forme, le nouveau chapitre est volant et sa numérotation est bizarre.
Le chapitre est volant, parce qu'il et placé avant le chapitre I.
Tous les articles traitant de ce Conseil sont numérotés 190 bis et 190 ter avec une multitude de sous-articles.
Ne serait-il pas plus rationnel de placer ce Conseil Constitutionnel à la place du chapitre III traitant de la Commission de Conciliation supprimée et de numéroter les articles relatifs à cette nouvelle Institution 206, 206. 1, 206.2, 206.3 etc au lieu de recourir à la numérotation alambiquée choisie ?
On pourrait aussi bien faire un chapitre VI de ce Titre VI avec une numérotation commençant par un article 216.1 etc.
Une instance de contrôle de la constitutionnalité est une excellente chose en soi, bien que la formule de Conseil Constitutionnel soit plus politique que celle de Cour constitutionnelle. La question de créer une instance de contrôle de la Constitutionnalité s'est effectivement posée à la Constituante de 1987, mais le principal obstacle qui a empêché la création d'une telle instance est de nature politique. Cet obstacle demeure aujourd'hui plus que jamais dans toute sa force : c'est le fait que le Conseil Constitutionnel ne soit qu'un instrument docile au service du pouvoir exécutif qui lui servirait pour domestiquer complètement toutes les autres composantes de l'appareil d'État et l'universalité des citoyens. À preuve de ce que nous avançons, nous constatons par exemple que le Conseil Constitutionnel proposé mettra son nez jusque dans les règlements des Chambres législatives, ce en contradiction avec l'article 112 de la Constitution. La non-création d'une instance de contrôle de la Constitutionnalité par la Constituante de 1987 est délibérée et ne constitue pas un oubli de sa part. Les discussions ont été assez âpres sur ce point. Nous pensons avec le recul du temps (plus de 20 ans) que la Constituante a agi avec sagesse et a pris la bonne décision en la matière.
Au sein d'un Conseil Constitutionnel ou même d'une Cour Constitutionnelle aux attributions et aux pouvoirs nécessairement exorbitants, les Constituants de 1987 étaient bien conscients que le Pouvoir Exécutif prendrait bien soin de n'y placer que ses fidèles, ses copains, ses séides et que cet organisme serait toujours peuplé des créatures du Président qui s'en servirait comme d'un bâton pour bastonner à volonté le Pouvoir Législatif, le Pouvoir Judiciaire, l'Administration publique, les Institutions Indépendantes et les citoyens. Chez nos cousins d'Afrique francophone, les diverses Cours Constitutionnelles ne brillent pas par leur indépendance et, à part de rares exceptions comme la Cour Constitutionnelle du Bénin, elles sont généralement soumises aux volontés du Président. C'est la raison majeure pour laquelle l'Assemblée Constituante de 1987 n'a créé ni Conseil, ni Cour constitutionnels, car cela aurait équivalu a créer un super-pouvoir, supérieur à tous les autres, et entièrement aux mains du Pouvoir Exécutif.
Il fut même dit à la Constituante que les membres de ce Conseil Constitutionnel finiraient par connaître un mauvais sort et voir leurs maisons par exemple déchouquées par des foules en colère à la chute d'un gouvernement, comme salaire de leurs décisions complaisantes ou serviles. Ce risque demeure bien réel.
Qui veut le prendre ?
En France, où il existe un Conseil Constitutionnel, on a la tradition d'y faire entrer des personnalités politiques proches des différents pouvoirs en place, des copains quoi, mais des copains prestigieux et capables. François Mitterand y fit rentrer ses amis Robert Badinter auréolé par l'abolition de la peine de mort et Roland Dumas ancien ministre des Affaires Étrangères qu'on devra faire partir plus tard du conseil en raison de sa profonde implication dans le scandale de la compagnie pétrolière Elf-Aquitaine.
En 1962, le Conseil Constitutionnel présidé par l'ex-ambassadeur Léon Noël, un proche du général de Gaulle, et bourré d'autres gaullistes, saisi par le président du Sénat Gaston Monnerville, refusa de condamner le coup de force contre la Constitution de 1958 effectué par le général de Gaulle lors de l'affaire de l'élection du Président de la République au suffrage universel. Souvent, les décisions de ce Conseil sont empreintes de partialité et sont parfois influencées par la politique. On doit encore remarquer que jusqu'au jour d'aujourd'hui, les citoyens français n'ont par le droit de saisir ce Conseil Constitutionnel pour défendre leurs droits par voie d'action ou même par voie d'exception, comme c'est le cas dans d'autres pays européens, l'Allemagne par exemple. Dans un autre ordre d'idées, il est interdit au Conseil Constitutionnel français de s'autosaisir d'une question, même devant une injustice, une violation de droits, un abus flagrant et révoltant.
Le Conseil Constitutionnel qu'on nous propose pourra-t-il être saisi par les citoyens pour défendre leurs droits ? Ce n'est pas sûr, car l'article 190 ter.5 proposé dit en son dernier alinéa : « La loi détermine les autres entités habilitées à saisir le Conseil Constitutionnel ». Ce Conseil pourra-t-il s'autosaisir ? Probablement pas.
Les pouvoirs de ce Conseil Constitutionnels sont à géométrie variable, flous et exorbitants. Même en cas d'une disposition légale déclarée inconstitutionnelle par ce Conseil, cette décision n'est pas « erga omnes » comme c'est le cas des Cours Constitutionnelles en Allemagne par exemple, mais le texte des amendements proposés dispose : « Si la disposition est déclarée inconstitutionnelle, elle est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil Constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil Constitutionnel détermine les conditions et les limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause. » Cette dernière phrase est la porte ouverte à tous les abus.
Pour être membre de ce Conseil Constitutionnel il faut être :
a) un Magistrat ayant une expérience de dix (10) ans au moins ...
b) un juriste de haut niveau, professeur ou avocat ayant une expérience de dix (10) ans au moins ...
c) une personnalité de grande réputation professionnelle ayant une expérience de dix (10) ans au moins...
Nous voyons très bien, en vertu de cette dernière disposition, la nomination au Conseil d'un éminent citoyen comme M. Frantz Gérard Verret qui a si brillamment dirigé le C.E.P., ou même son élection par ses pairs comme président du Conseil Constitutionnel.
Dans le contexte haïtien, les décisions de cette nouvelle instance seront nécessairement partiales et influencées par la politique. Les dés sont pipés d'avance. Le Conseiller Constitutionnel haïtien qui rendrait une décision contre le Pouvoir Exécutif n'est pas encore né. Il faut regarder la réalité en face.
Il faut aussi considérer la possibilité bien réelle, compte tenu de nos hommes, où des membres du Conseil seront grassement payés, parfois avec des fonds de l'État, pour rendre une décision dans un sens ou dans un autre.
On pourra aussi les inviter au Palais National pour leur faire des mamours ou pour « leur expliquer la position du Pouvoir Exécutif sur une question ».
Parfois, il suffira que Président de la République leur fasse simplement risette pour qu'ils soient parfaitement éclairés.
Le peuple ne manquera pourtant pas de réagir contre des décisions iniques ou serviles de ce Conseil en dénonçant les « magouilleurs du Conseil Constitutionnel » et en demandant leur renvoi en bloc.
S'il n'obtient pas satisfaction, il attendra, mais à la plus prochaine commotion politique, il ira déchouquer lui-même tous les Conseillers et saccagera en prime le local du Conseil.
Voilà tout ce à quoi on se prépare !
À notre avis, l'existence d'un Conseil Constitutionnel dans le contexte politique haïtien tel que nous le connaissons ferait plus de mal que de bien.
Le nouvel article 192 concerne la nomination des membres du Conseil Electoral Permanent, où les Assemblées Départementales ne jouent plus aucun rôle. Le principe d'une juste répartition départementale au sein du CEP est supprimé. En théorie désormais, selon le nouveau texte proposé, tous les membres du CEP permanent peuvent être par exemple du seul Département de l'Ouest, ou du seul Département du Sud. La clameur publique prête au Président actuel la tendance à ne pas beaucoup aimer la participation des Assemblées Départementales dans le choix des membres du CEP.
Les articles 206 et 206.1 traitant de la Commission de Conciliation sont supprimés. Il n'est un secret pour personne qu'en réalité, on n'a jamais voulu de cette Commission qui aurait pu rendre beaucoup de services au pays et nous éviter depuis 20 ans bien des crises politiques. On supprime cette pauvre Commission de Conciliation avant même qu'elle ait pu fonctionner et faire ses preuves.
L'article 207.2 ajouté enjoint au Protecteur du Citoyen d'avoir une attention particulière pour les plaintes déposées par les femmes (rien qui n'aurait pu être fait par une simple loi).
L'article 211 proposé parle de la création d'un Organisme public chargé de la régularisation et du contrôle de qualité de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique sur tout le territoire (rien qui n'aurait pu être établi par une simple loi).
Le nouvel article proposé remplace l'ancien article 211.
L'article 211 proposé supprime ainsi :
1.- La primauté de l'Université d'État Haïti sur les autres Universités du pays ;
2.- L'autorisation de fonctionner de ces dernières qui est jusqu'à présent subordonnée à l'approbation technique du Conseil de l'Université d'État d'Haïti ;
3.La participation majoritaire haïtienne au niveau du capital des Universités
privées ;
4.- La participation majoritaire haïtienne au niveau du corps professoral ;
5.- L'obligation d'enseigner en langue officielle du pays (français / créole). On verra donc en théorie proliférer en Haïti des Universités privées dispensant leur enseignement en langues anglaise, allemande, russe, arabe ou japonaise.
Le nouvel article 217 proposé supprime le principe de la décentralisation des finances de la République déjà prévue par l'article 157 de la Constitution de 1889, supprimé par la première Occupation étrangère, mais repris par la Constitution de 1987.
Le nouvel article 217 peut être inclus dans une loi.
Le nouvel article 218 proposé escamote le consentement des autorités départementales pour d'éventuelles contributions départementales. On ne voit pas trop la raison de ce changement. Le nouvel article 220 proposé concerne une nouvelle rédaction pour l'indexation des pensions sur le coût de la vie.
Une loi pourrait se charger de cela.
Le nouvel article 223 proposé n'apporte rien de nouveau. Son libellé pourrait être inclus dans une loi. Nous constatons cependant qu'il parle de la « Cour Supérieure des Comptes » et non plus de la « Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif », alors que le nom de cette Institution n'a pas changé.
Le nouvel article 227 proposé dit : « Le budget est voté par entité administrative suivant la classification établie par la Loi. »
L'article 227 de la Constitution qu'il se propose de remplacer dit ceci : « Le Budget de chaque Ministère est divisé en Chapitres et en Sections et doit être voté article par article ». Jugez vous-mêmes lecteurs !
Cette exigence nous vient de la Constitution de 1946 en son article 128 et a été reprise par les Constitutions suivantes 1950 (article 139), 1957 (article 145), 1964 (article 151), 1971 (article 154). Cette exigence disparaît dans la Constitution jeanclaudienne de 1983, mais elle a été rétablie par la Constitution de 1987. On veut maintenant la supprimer à nouveau. Voilà où le commentaire justificatif qui est prescrit par la Constitution de 1987 en son article 282 et qui devait accompagner la déclaration de révision aurait été fort utile pour nous éclairer.
L'article 227.1 est supprimé et avec lui une référence explicite au bonus à payer aux employés publics (13e mois) qui leur est garanti par la Constitution de 1987. Il y a une autre mention de ce 13e mois pour les fonctionnaires à l'article 35.1 auquel on n'a pas touché, mais elle est beaucoup moins claire. Les réformateurs ont-ils simplement oublié de supprimer cette disposition ?
L'article 227.3 change encore le nom de la « Cour des Comptes et du Contentieux Administratif » pour celui simplement de « Cour des Comptes ». (Quelle mouche les a piqués ?). Le délai de 15 jours au plus tard pour la soumission des documents financiers aux Chambres Législatives est supprimé et laissé à la loi.
L'article 228 proposé enlève le membre de phrase concernant « l'aperçu et la portion des fonds alloués pour l'année à chaque Ministère ».
Ici encore, le commentaire justificatif contenant « les motifs à l'appui » des amendements voulu par l'article 182 et qui n'a pas été voté fait cruellement défaut pour renseigner les profanes que nous sommes sur les raisons de ce changement.
La suppression proposée de l'article 228.2 est une bonne chose, mais il semble de toutes façons qu'on trouvait dans la pratique un moyen de contourner cet article.
Cet article concernait la difficulté d'augmenter les traitements des fonctionnaires publics.
La suppression proposée de l'article 229 est moins innocente. C'était le seul endroit dans la Constitution où il était spécifiquement mentionné que les Chambres Législatives étaient les seules compétentes pour accorder la décharge aux Ministres. Cette mention passe donc délibérément à la trappe. C'est très grave.
Est-ce à cause d'intentions inavouées ou inavouables ? Ici encore le commentaire justificatif aurait pu nous éclairer.
Un article 234.1 est ajouté, faisant une distinction dans l'Administration publique entre l'Administration d'État et celle des Collectivités territoriales.
Le commentaire justificatif que les parlementaires dans leur hâte ont oublié de voter aurait pu encore ici nous éclairer.
Néanmoins, ne peut-on pas considérer qu'il vaut mieux qu'il y ait une seule Administration publique à l'échelle du pays ?
Deux articles 253.1 et 256.1 concernant l'écologie sont ajoutés. Ils pourraient figurer dans une loi sur l'écologie.
Les changements affectant les articles 263, 264.1, 264.2, 265, 266, concernent exclusivement un changement d'appellation de l'Institution Militaire nationale de « Forces Armées d'Haïti » en « Armée d'Haïti ».
« Paris vaut bien une messe » aurait dit le bon roi Henri IV. Un changement d'appellation vaut bien une messe pourrions-nous dire.
L'article 266 proposé au lieu d'énumérer les attributions de l'armée nationale qui demeurent les mêmes de a) à f), le fait de 1 à 6 désormais.
L'article 267.1 proposé raccourcit un peu le délai de séparation de service d'un militaire de « un (1) an avant la parution du délai électoral » à « un (1) an avant les élections ».
L'article 267.2 ne concerne que le changement de nom de « Forces Armées d'Haïti » en « Armée d'Haïti ».
L'article 267.3 proposé voit la suppression du second alinéa qui permettrait au militaire de recourir à un Tribunal administratif ou autre, en cas de séparation de service jugée arbitraire par lui. En quoi ce recours ouvert devant la justice dérange-t-il ? Le commentaire justificatif qui est consubstantiel à la déclaration de révision mais qui n'a pas été voté aurait pu nous renseigner ici sur l'intention des réformateurs en supprimant cet alinéa.
De toutes façons, ce recours devant la juridiction administrative peut être prévu par la loi sur les personnels militaires que le Parlement haïtien devra voter au moment de la réorganisation de l'Armée nationale en vertu de l'article 111 de la Constitution.
Au niveau des Dispositions transitoires de la Constitution de 1987, les suppressions d'articles proposées concernent des articles épuisés. Ainsi donc, les articles 285, 285.1, 286, 287, 288 qu'on se propose de supprimer sont des articles épuisés. On enfonce des portes déjà ouvertes. Ceci reviendrait à vouloir tuer un mort.
L'article 289 proposé prévoit l'établissement d'un Conseil Électoral Provisoire de 9 membres recrutés sur de nouvelles bases : des représentants du Secteur Public, des Partis Politiques et des Organisations de la Société Civile. Le nouvel article ne prévoit pas cependant les proportions au sein de ce nouveau Conseil Électoral Provisoire entre ses différentes composantes. Nous supposons qu'il s'agit de 1/3, 1/3, 1/3, mais ce n'est qu'une simple supposition de notre part.
Les suppressions des articles 291, 292, 293, 294 concernent également des articles transitoires épuisés.
Nous pensons cependant que les suppressions des articles 293-1 et 294 sont condamnables. Il vaudrait mieux laisser ces articles en place. Pour la pleine édification des lecteurs nous citons le texte de ces articles : « Article 293.1 : tout individu victime de confiscation de biens ou de dépossession arbitraire pour raison politique, durant la période s'étendant du 22 octobre 1957 au 7 février 1986 peut récupérer ses biens devant le Tribunal compétent.
Dans ce cas, la procédure est célère comme pour les affaires urgentes et la décision n'est susceptible que du pourvoi en Cassation ».
Une disposition similaire de la Charte Européenne des Droits est justement la cause pour laquelle le Président tchèque Vaclav Claus refusait de signer le Traité de Lisbonne réorganisant l'Union Européenne. Le Président Claus a fini par obtenir la dérogation sur cette clause qu'il exigeait pour son pays en échange de sa signature.
S'il avait signé le Traité sans la dérogation, cela aurait permis aux millions d'Allemands des Sudètes expulsés de Tchécoslovaquie à la suite des décrets de 1945 du Président Edouard Benes après la Seconde Guerre mondiale, de récupérer les biens dont ils avaient été dépossédés lors de leur expulsion, en introduisant des actions devant des tribunaux tchèques. Avec la dérogation, ces actions sont irrecevables.
L'article 294 est d'une nature voisine et dispose : « Les condamnations à des peines afflictives et infamantes pour des raisons politiques de 1957 à 1986, n'engendrent aucun empêchement à l'exercice des Droits Civils et Politiques. »
De tels articles qui ont en plus de leur contenu juridique une haute valeur éducative et symbolique mériteraient de demeurer dans la Constitution.
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Dr Georges Michel
Ancien ConstituantYon gwo AYIBOBO pou ou men m zanmi m ki vizite lakou sa pou pwan nouvèl zanmi lakay ak lòt bò dlo.