Profession : artisan S/M

J'ai évoqué tout dernièrement "les martinets", mais je ne voudrais pas tourner la page sans rendre l'hommage qu'il mérite au fabricant de ces vingt cinq modèles d'ustensiles différents.
Quelques pages sont consacrées  à cet homme en tout début du livre "Les Aventuriers du Fantasme", et je vous avoue qu'en découvrant le passe-temps tardif de ce bricoleur de génie, je me suis bien amusée, j'ai ri et j'ai une tendresse particulière pour ce grand-père "Géo Trouvetou" ingénieux et assez candide, travaillant sans état d'âme pour le bien être de ses clients S/M.
J'ai lu ce livre dans son entier (près de 250 pages quand même), j'ai beaucoup appris, je me suis instruite en découvrant un monde, des univers que je ne connaissais pas du tout. J'ai rencontré beaucoup de glauque et de sordide... Je me suis interrogée sur la normalité et l'anormalité, la mienne et celle des autres... Et puis, je me suis dit, que chacun était libre d'agir à sa guise, que cela ne me regardait pas tant qu'on ne voulait pas m'obliger à suivre certaines voies...
Lorsque la dernière page a été tournée, j'ai été heureuse de passer à autre chose, à une autre lecture... J'ai conservé le livre, parce que vous savez bien que je garde tout, surtout les livres, et aussi parce que j'avais bien aimé la rencontre avec ce personnage exerçant sur le tard la profession d'artisan S/M! Je l'imagine bien, tranquille, sage et studieux, mais ne manquant pas d'humour, affairé à son établi pour arrondir ses fins de mois... (une sorte de Nigloo qui ne fabriquerait pas que des portes de grange, et restaurerait autre chose que des commodes!).
Et puis, je dois dire aussi que ce livre m'aura été très utile lorsque je me suis aventurée sur le "Tchat", mon mari tentait de me persuader qu'on y parlait de choses et d'autres, de la pluie et du beau temps, des discussions aseptisées... Je n'ai sans doute pas eu de chance, lors de ma première tentative d'incursion j'ai rencontré mon lot de fétichistes, d'échangistes et une très large majorité de Sado/Masochistes... Grâce à mon livre fraîchement lu, j'ai su quoi répondre... Je me souviens même avoir dit à un monsieur "Tu me prends pour une débutante?" alors que l'ouvrage était refermé seulement depuis quelques jours... Cette première intrusion sur le "tchat" m'a énervée mais un peu amusée... la seconde, qui était le reflet de la première, a définitivement mis un terme à ma carrière de tchateuse! Pour avoir pratiqué aussi Meetic, je vais vous dire qu'il ne faut pas crier haro sur les sites de rencontres : onsait ce qu'on risque d'y trouver, parfois même on peut y avoir de bonnes surprises...(j'ai parlé littérature avec des hommes très instruits, sympathiques et intelligents, j'ai donné des conseils ou des recettes de cuisine... presque des cours de tricot...)... le tchat est moins net, moins franc, un repère pour dragueurs qui souhaitent ne pas perdre la face ou garder bonne conscience. De l'hypocrisie à l'état pur!

Photo trouvée sur le net.
Il fabrique des accessoires, instruments et autre appareillage sado/masochistes depuis qu'il est à la retraite. Son catalogue, ronéoté à la main (artisanat oblige!), ne compte pas moins de cent cinquante articles, qui vont du modeste martinet (vingt-cinq modèles différents quand même!) au "chevalet oriental" (enfin en France! précise le sous-titre), en passant par "l'oeuf infernal", le "soleil japonais", la "cangue à roulettes" ou "la main du diable". A chacune de ses créations, il a en effet donné des noms au gré de son imaginaire. Il a également dessiné les croquis qui accompagnent chaque descriptif.
Il approche aujourd'hui des soixante-dix ans et finit tranquillement ses jours à la campagne en compagnie de son épouse. De nature plutôt affable et communicative, il se plaint un peu de l'isolement et du peu de contacts avec les gens de la région où il s'est retiré depuis cinq ans. Heureusement, il a son atelier, ses commandes et son service après-vente. La Redoute artisanale du sado/masochisme, en quelque sorte.
- Comment l'idée de vous consacrer à l'artisanat sado/masochiste vous est-elle venue?
- Elle m'est venue parce qu'on me l'a demandé... J'avais un ami que je rencontrais régulièrement au moment du Salon de la Machine Agricole. Et, un jour, il a décidé d'ouvrir... une espèce de club sado/masochiste à Paris. Alors il avait besoin d'instruments, il avait besoin d'accessoires. Il avait besoin d'installer son établissement, si vous voulez. Et comme il me connaissait depuis longtemps et que je me suis trouvé à la retraite, il m'a dit : "Toi, qui travailles..." Parce que, moi, j'étais mécanicien en machines agricoles. Vous allez me dire : ce n'est pas tout à fait pareil, mais enfin, dans ce métier-là, il faut savoir travailler aussi bien le bois, que le fer, que tout un tas de matériaux. Et il me dit : "J'ai besoin de faire tout un tas de choses, pourrais-tu me les faire?" Je lui ai dit : "Ma foi, oui, on va voir ce que c'est."
- Et quand il vous a dit ce que c'était, ça ne vous a pas surpris?
- C'est-à-dire qu'on n'avait jamais abordé ces problèmes-là ensemble. Mais... quand il m'a demandé ça, non, je n'ai pas été vraiment surpris. Parce que je connaissais quand même les choses de la vie. Je savais que ça existait.
- Mais vous ne les aviez jamais pratiquées?
- Non... D'ailleurs, je ne les pratique toujours pas. Moi, je me contente de faire du matériel. Personnellement, je ne suis pas pratiquant. Certainement que si je n'avais pas eu cet ami qui ma demandé ça... C'est comme ça que ça a débuté cette affaire-là. (...)
Les Aventuriers du Fantasme - Jean Streff - ARTEFACT -