Angoisse

(Écrit il y a une dizaine d'années)
Au coeur des ténèbres une anxiété crasse s’insinue chez moi sans crier garde, me mordille, joue de moi, me dévore petit à petit. Elle veut se payer ma tête, s’offrir mon contenu et ensuite, avec les restes, me répandre en cendre. Cette panique clandestine qui me côtoie uniquement quand advient le déclin du JOUR affûte ma mollesse et ma démence, chaque fois que se présente la fin du JOUR se pressure mon âme. Elle se décharne et se dénature pour qu’au moment où surgit la tombée du JOUR mon bon sens m’abandonne, passe à l’ennemi et, qu’à l’aube, je ne me ranime plus; que je ne sois plus.
«Angoisse, prends congé de ma chair. Fiche le camp de mon univers. Renie-moi pour qu'en définitive mes tourments s'arrêtent. Sans faire d'esclandre, prends le large. Déniche une autre vie; un autre lieu sûr pour t'amplifier. En cet endroit, au creux de mon être, tu vas finir par être dépourvue de terrain. Bien sûr, tu te retireras en arrière-plan et tu reviendras lorsque que je t’aurai laissé m’échapper, chaque fois que je t’aurai oubliée, soit quand je croirai aux bonnes nuits clémentes et affriolantes.
Quand est-ce que j’aurai fini d’expier ma pénitence? Combien de temps te répandras-tu encore dans mes veines? Quel nombre d’heures, de nuits et d’années me réserves-tu encore avant de cesser in extenso d’exister?»