Magazine Humeur
Les plus beaux textes sur Marie : s. Louis-Marie Grignon de Montfort
Publié le 08 janvier 2010 par Hermas
Nécessité d'une vraie dévotion à la Sainte Vierge Marie est le grand moule de Dieu, fait par le Saint-Esprit pour former au naturel un Homme-Dieu par l'union hypostatique, et pour former un Homme-Dieu par la grâce. Il ne manque à ce moule aucun trait de la divinité ; quiconque y est jeté et se laisse manier aussi, y revoit tous les traits de Jésus-Christ, vrai Dieu, d'une manière douce et proportionnée à la faiblesse humaine, sans beaucoup d'agonies et de travaux ; d'une manière sûre, sans crainte d'illusion, car le démon n'a point et n'aura jamais d'accès en Marie, sainte et immaculée, sans ombre de la moindre tache de péché. Oh ! chère âme, qu'il y a de différence entre une âme formée en Jésus-Christ par les voies ordinaires de ceux qui, comme les sculpteurs, se fient en leur savoir-faire et s'appuient sur leur industrie, et une âme bien maniable, bien déliée, bien fondue, et qui, sans aucun appui sur elle-même, se jette en Marie et s'y laisse manier à l'opération du Saint-Esprit ! Qu'il y a de taches, qu'il y a de défauts, qu'il y a de ténèbres, qu'il y a d'illusions, qu'il y a de naturel, qu'il y a d'humain dans la première âme ! et que la seconde est pure, divine et semblable à Jésus-Christ ! Il n'y a point et il n'y aura jamais créature où Dieu soit plus grand, hors de lui-même et en lui-même, que dans la divine Marie, sans exception ni des Bienheureux, ni des Chérubins, ni des plus hauts Séraphins, dans le paradis même. Marie est le paradis de Dieu et son monde ineffable, où le Fils de Dieu est entré pour y opérer des merveilles, pour le garder et s'y complaire. Il a fait un monde pour l'homme voyageur, c'est celui-ci ; il a fait un monde pour l'homme bienheureux, et c'est le paradis ; mais il en a fait un autre pour lui, auquel il a donné le nom de Marie ; monde inconnu presque à tous les mortels, ici-bas, et incompréhensible à tous les Anges et Bienheureux, là-haut dans le ciel, [et] qui, dans l'admiration de voir Dieu si relevé et si reculé d'eux tous, si séparé et si caché dans son monde, la divine Marie, s'écrient jour et nuit : "Saint, Saint, Saint." Qu'on ne s'imagine donc pas, avec quelques faux illuminés, que Marie, étant créature, soit un empêchement à l'union au Créateur ; ce n'est plus Marie qui vit, c'est Jésus-Christ seul, c'est Dieu seul qui vit en Elle. Sa transformation en Dieu surpasse plus celle de saint Paul et des autres saints, que le ciel ne surpasse la terre en élévation. Marie n'est faite que pour Dieu, et tant s'en faut qu'Elle arrête une âme à elle-même, qu'au contraire Elle la jette en Dieu et l'unit à lui avec d'autant plus de perfection que l'âme s'unit davantage à Elle. Marie est l'écho admirable de Dieu, qui ne répond que : Dieu, lorsqu'on lui crie : Marie ; qui ne glorifie que Dieu, lorsque, avec sainte Elisabeth, on l'appelle bienheureuse. Si les faux illuminés, qui ont été misérablement abusés par le démon jusque dans l'oraison, avaient su trouver Marie, et par Marie Jésus, et par Jésus Dieu, ils n'auraient pas fait de si terribles chutes. Quand on a une fois trouvé Marie, et par Marie Jésus, et par Jésus Dieu le Père, on a trouvé tout bien, disent les saintes âmes : Inventa, etc. Qui dit tout n'excepte rien : toute grâce et toute amitié auprès de Dieu ; toute sûreté contre les ennemis de Dieu ; toute vérité contre le mensonge ; toute facilité et toute victoire contre les difficultés du salut ; toute douceur et toute joie dans les amertumes de la vie. Ce n'est pas que celui qui a trouvé Marie par une vraie dévotion soit exempt de croix et de souffrances, tant s'en faut ; il en est plus assailli qu'aucun autre, parce que Marie, étant la Mère des vivants, donne à tous ses enfants des morceaux de l'Arbre de vie, qui est la croix de Jésus ; mais c'est qu'en leur taillant de bonnes croix, Elle leur donne la grâce de les porter patiemment et même joyeusement ; en sorte que les croix qu'Elle donne à ceux qui lui appartiennent sont plutôt des confitures ou des croix confites que des croix amères ; ou, s'ils en sentent pour un temps l'amertume du calice qu'il faut boire nécessairement pour être ami de Dieu, la consolation et la joie, que cette bonne Mère fait succéder à la tristesse, les animent infiniment à porter des croix encore plus lourdes et plus amères. La difficulté est donc de savoir trouver véritablement la divine Marie, pour trouver toute grâce abondante. Dieu, étant maître absolu, peut communiquer par lui-même ce qu'il ne communique ordinairement que par Marie ; on ne peut nier, sans témérité, qu'il ne le fasse même quelquefois ; cependant, selon l'ordre que la divine Sagesse a établi, il ne se communique ordinairement aux hommes que par Marie dans l'ordre de la grâce, comme dit saint Thomas. Il faut, pour monter et s'unir à lui, se servir du même moyen dont il s'est servi pour descendre à nous, pour se faire homme et pour nous communiquer ses grâces ; et ce moyen est une vraie dévotion à la Sainte Vierge.