Depuis un mois, me voilà relancée dans le milieu de l'enseignement ! Les copies se succèdent, parfois me submergent, me stressent... mais finalement c'est aussi le plaisir de renouer avec des auteurs classiques et de constater à la fois, que les années effacent le savoir acquis, mais aussi que, replonger dans les livres d'avant, ravive d'anciens bonheurs.
Samedi matin, aux aurores, j'ai donc fait passer mes premiers oraux. Il faisait encore nuit, quand j'ai passé les portes du lycée... les élèves attendaient patiemment, les profs convoqués arrivaient au compte gouttes. On sentait l'angoisse des lycéens... depuis deux jours, j'avais le nez dans mes manuels d'histoire littéraire.... Chaque texte doit donner lieu à des questions ouvertes sur lesquelles les élèves doivent bucher pendant une demi-heure.... je me suis revue moi-même, il y a un peu plus de 20 ans... oui déjà, 20 ans !!!!
Installée dans une salle de classe, les néons allumés, les feuilles de brouillon préparées, une table avec deux chaises se faisant face.
Au programme : un corpus autour du Sonnet (Louise Labé, Du Bellay, Baudelaire et Rimbaud) et le roman La Peste de Camus... Devant moi, mes petites fiches bristol noircies par mes questions : "Comment s'exprime la sensualité dans ce sonnet de Baudelaire?" ; "Comment s'exprime le désordre amoureux dans le sonnet de Louise Labé?" ; "A quoi reconnaissons-nous, dans ce texte de Camus, que nous avons affaire un incipit?" etc.
J'apréhendais moi-même un peu cet exercice qui m'est peu familier : examinatrice... je n'aime guère ce terme... examiner le savoir, les connaissances, mais aussi aller fouiller dans les failles, les méconnaissances... pas facile. Pour rassurer tout le monde, et finalement mettre à l'aise, je ne me suis pas campée dans le rôle. Je n'ai pas fait la jury vacharde, au contraire, j'ai tenté de dédramatiser tout cela.
Les élèves se sont donc succédés, une majorité de filles, plus ou moins à l'aise. Beaucoup de difficultés au final. Une perception des textes qui reste très scolaire, une volonté de recracher le cours sans le maîtriser vraiment... mais peu ou pas de passion, d'enthousiasme. Qu'il est dommage de constater que ces élèves ne trouvent pas ces textes un lien avec leur sensibilité! et pourtant quand Louise Labé décrit les tourments que provoque l'amour, il y en aurait des choses à dire ! quand Baudelaire évoque Jeanne Duval, il y a tellement plus qu'un simple sonnet...
Alors oui, je me suis laissé aller ... je me voyais aborder ces textes en cours, faire sentir leur évocation, amener les élèves vers ces textes si beaux et dont ils ne perçoivent souvent que l'aspect scolaire et rébarbatif ! Que la littérature est donc maltraitée, elle en perd son âme et sa vocation.
Demain matin, je recommence... sur d'autres textes : La Fontaine, Marivaux et sa Double inconstance mais aussi Montesquieu ou Kessel...