Bright star

Publié le 21 janvier 2010 par Lejournaldeneon

CRITIQUE CINÉMATOGRAPHIQUE

BRIGHT STAR
(de Jane Campion)


L’histoire débute à la fin du règne de Georges III, quelques mois après la défaite des français à Waterloo, au tout début de ce que l’on nomme... le siècle impérial de l’histoire britannique. L’histoire... du jeune poète John Keats et de sa liaison passionnelle avec Fanny, une jeune fille de la bonne société anglaise. L’action se déroule principalement entre 1819 et 1820, dans la maison familiale des Brawne à Hampstead, un faubourg du nord de Londres. Jane Campion explique que c’est la biographie d’Andrew Motion qui l’a d’abord profondément bouleversée. L’histoire d’un très jeune poète romantique, mort d’une tuberculose à l’âge de 23 ans. Le film est inspiré par des lettres d’amour de John pour Fanny, quelques-unes des lettres les plus belles qu’un homme est pu écrire à la femme qu’il aime. « Bright star » est construit à la manière d’un poème narratif, inspiré de cet « Ode on a Grecian Urn » d’ « Ode on Melancholy » ou encore d ’ « Ode to a Nightingale ». Trois des plus beaux poèmes de John Keats, tous écrits alors qu’il fréquentait la maison d’Hampstead et les yeux éblouis de Fanny.

L’image du film est suave et délicieuse. Une des plus douces qu’il soit permis de ressentir sur un écran perlé de cette envergure. L’image d’une femme, je veux dire : d’un cinéma « féminin », je ne sais pas ? Le côté féminin de la cinéaste néo-zélandaise, l’auteur de la superbe « Leçon de piano » palmes d’or à Cannes en 1993 ou de cette adaptation à l’écran du « Portrait de femme » d’Henry James. Tout est beau, sobre et lumineux... Irradié même ! Une image de verts tendres, de neige immaculée ou de ciels éthérés. Un décor moelleux pour l’histoire la plus cruelle qu’on puisse entendre. Car cet amour-là, ce grand amour... est privé d’oxygène d’un bout à l’autre du film. L’histoire de sentiments impossibles au-delà de la seule beauté des choses. « Beauty is truth, truth beauty,-that is all Ye know on earth and all ye need to know » (« Beauté est vérité et vérité beauté. Voilà tout ce que l'on sait sur terre et tout ce qu'il faut savoir » a écrit Keats cette année-là. « Moitié légume, moitié mec... » chantait Gainsbard. Le type est une sorte d’ange, « Sorry angel... » C’est çà. Pas tout à fait un homme, ou plutôt : Un homme, mais dans sa quintessence. Nettoyé de tout son gras immonde, de toute sa perversion. L’homme, sans sa couleur infâme. Elle... (En réalité, le film de Jane ne parle que d’elle. Et lorsque l’image s’attarde souvent sur Keats, c’est encore par le prisme de ses yeux à elle, de son amour absolu pour lui.) Jane réussit à filmer avec une incroyable justesse, l’ultime sentiment d’un cœur las. Bref ! Fanny aime Keats et Jane aussi, qui se voit peut-être un peu dans les yeux de cette belle héroïne désespérée. Fanny a survécu à la mort de son grand amour, ce qui est déjà beaucoup pour l’action minimaliste d’un cinéma qui chuchote plus qu’il n’articule exagérément. Mais quand je dis survivre... Devrait-on parler plutôt, de l’amplitude du noir qui recouvre le ciel à l’endroit du générique, et cette sorte de tendance à la brume matinale qui vous enveloppe encore longtemps après le caractère intense du spectacle.
Néon™