Magazine Nouvelles

...and then you wake up

Publié le 06 décembre 2009 par Elinorbird

- BIRD!?

Bang Bang Bang

zzz....

- BIRD?.. BIRD!!!

Bang Bang Bang

zzz... zzz...

- Bird! Tu es là? BIRD! hurla Jack en poussant la porte de la salle de bain.

- Aaaaahhhhh! JACK! hurlai-je en redressant la tête, toujours à moitié endormie, les yeux plein d'effroi

- Bird! Bon sang... répéta-t-il en refermant la porte derrière lui. Mais ça fait vingt minutes que je t'attends en bas. J'ai essayé de t'appeler, tu ne répondais pas... J'ai sonné mais j'ai bien l'impression que ta sonnette ne fonctionne pas... Alors je suis monté. Heureusement que j'ai encore tes clés... Je suis rentré et tout était éteint alors j'ai failli repartir... Et puis j'ai aperçu une lueur dans la salle de bain... Je n'osais pas rentrer... J'ai eu si peur que tu te sois évanouie... que....

Et il continuait ses explications pendant que je tentais de reprendre mes esprits, attrapant une serviette éponge et m'enveloppant dedans pour me réchauffer. J'étais secouée, de l'autre côté de la cloison et essayais de me remettre les idées en place...

Je ne comprenais RIEN...

(Mais que faisait-il ici? Pourquoi étions-nous chez moi? Ne devrions-nous pas être chez lui?)

- Et figure-toi que j'ai appelé Billie... qui m'a dit que tu avais disparu plus tôt dans l'après-midi en laissant un mot sur la porte disant que tu avais besoin de prendre l'air et d'être un peu seule... Alors là, tu vois, mon sang n'a fait qu'un tour... Je me suis imaginé un scénario pas possible... J'ai eu si peur...

(Billie? Il a appelé Billie? Une minute... Reprenons les faits dans l'ordre...)

(J'étais partie faire une balade sur l'East River et à mon retour, j'avais reçu un message de Jack me disant qu'il passerait me prendre à la maison vers 7.30PM. Jusque là, tout va bien.... J'avais branché mon Ipod et mis de la musique... Oui c'est ça... Du jazz!! J'avais envie de jazz... J'avais éteint les lumières, allumé une bougie au figuier... Oui... Et m'étais plongée dans un bain moussant. C'est bien ça.... J'étais allongée, la tête posée sur le rebord de la baignoire... Oui.... Et....? Oh mon Dieu!... Et je m'étais endormie...)

(JE M'ÉTAIS ENDORMIE! NON!!! C'EST PAS VRAI!.... Mais si... Mais si... Oh mon Dieu, je me suis endormie.... Quelle sotte!!!

Mais je n'ai même pas de sublime robe-manteau noire Ungaro, je n'ai pas non plus de Jaeger-Lecoultre. Grand-père porte toujours la sienne à son poignet!!! Mon Dieu!! Jack n'a pas de voiture.... Mais comment ai-je pu être si bête?.. Comment ai-je pu croire à tout ce conte de fée. Oh non... NON... Je vais pleurer...)

J'étais assise sur le rebord de la baignoire, grelottant de froid et pendant ce temps, Jack continuait à m'expliquer la peur que je lui avais causée...

(MAIS JE M'EN FOUS JACK! JE M'EN FOUS. Tu devrais être en train de m'embrasser, de me dire "Bird vole à moi".. Tu devrais...)

- Bon. Le principal est que tu ailles bien... conclua-t-il. Je t'avais ramené un bouquet alors j'en profite pour le mettre dans l'eau d'accord? Tes vases sont toujours sous l'évier?

(Attends une minute... Des fleurs...?)

- Bird? T'es toujours la? Tu t'es pas rendormie dis moi? Tout va bien? s'inquiéta-t-il à nouveau

- Hein? Euh... Oui oui j'suis là. J'suis là... Sous l'évier oui...

(Il m'a ramené des fleurs. Des fleurs... Tout n'est peut être pas perdu... Oh mon Dieu, et si c'était un rêve prémonitoire? Mais comment vais-je m'habiller? Je n'ai pas de robe Ungaro. Zut zut et rezut...)

- Qu'est-ce que tu fabriques? me demanda-t-il en rigolant, le nez collé à la porte de la salle de bain

- Oh. Je reprends mes esprits. Excuse-moi mais ça va faire deux bonnes heures que je m'étais endormie... Je suis un peu destabilisée... Laisse moi une minute, je vais repasser sous l'eau chaude rapidement pour me rincer et me réchauffer. Ok?

- Ok... Je vais appeler le restaurant en attendant pour leur dire que nous aurons du retard. J'avais réservé une table pour 8PM.

- Ah oui??? Où ça?

- Il Buco.

(Pince moi je rêve...)

- Le chauffeur doit se demander ce que je fabrique... Je vais aller le prévenir... Dépeche toi ok?

- Je serai en bas dans dix minutes maxi. J'arrive!

(Bon. Il faut faire vite. Alors... Je vais mettre mes bottines Edith Machinist. Au moins, celles-là, elles existent. Donc mes bottines. C'est sur. Ensuite, voyons voir... Je pourrais mettre ma jupe taille haute Alexander Wang*? Oui... C'est pas mal et elle me fait de belles jambes... Ok pour la jupe. Mon petit pull en cashemire noir et dentelle. Le collier en tourmalines de maman. Très important!! Et je n'ai malheureusement pas de redingote à col de fourrure... Grrrr. Je vais mettre mon imper' doublé de laine Burberry**. Ça fera très bien l'affaire et en plus, j'ai l'impression qu'il pleut... Donc c'est approprié...)

Dix minutes plus tard, je fermai la porte de mon appart', les jambes tremblantes, et remarquai le bouquet qui trônait sur la table de la cuisine... Des perce-neiges...

(Je rêve...)

L'ascenseur n'arrivait pas alors je descendis à pieds. En arrivant à la porte de l'immeuble, je pus constater qu'il pleuvait à torrent... Je n'avais évidemment pas pris de parapluie. Je penchai la tête à gauche et aperçus la Lincoln garée un peu plus loin. Jack devait m'attendre bien au chaud à l'intérieur...

(Bon, j'ai bien l'impression qu'il va falloir renoncer à mon rêve... Sniff... Pas de prince charmant...)

Je m'apprêtais à affronter la pluie, la tête rentrée dans le col de mon imperméable quand j'entendis...

- BIRD! Attends moi... J'étais parti acheter un parapluie au deli*** du coin pour que tu ne sois pas trempée.

(Jack...)

Et il m'enlaça bien fort au creux de son bras gauche, sa main droite tenant le parapluie. Nous nous élançâmes sous la pluie battante pour regagner le taxi.

- Brrr. Et il fait froid en plus... Quel temps pourri! s'exclama Jack en refermant sa portière.

- Hum. Je sais...

- Peu importe. Nous n'allons pas parler de la pluie et du beau temps.

- Non...

- C'est bon de te retrouver Bird. Tu as bonne mine. Ça a l'air d'aller?

- Oui. Ça va plutôt bien à vrai dire...

- J'ai tellement de choses à te raconter! dit-il. Je trépignais d'impatience dans l'avion. Le vol m'a paru comme une éternité.

- Vraiment?

Nous avons continué cette discussion sans intérêt tout le trajet. Puis, nous sommes arrivés au restaurant. Jack a fait le tour de la voiture pour m'ouvrir la portière et m'abriter sous le parapluie... A l'intérieur, le restaurant était bondé. Toutes les tables étaient prises et les gens parlaient fort. Je cherchais Dustin Hoffman des yeux, en vain. Pas de Natalie Portman non plus... Je commençais à desespérer...

- Votre table sera prête dans vingt-cinq minutes. Je suis désolée mais vous avez presque une heure de retard et, vu le monde ce soir, nous avons été obligés de donner votre table à un autre couple...

(Et voilà... C'est cette morue là-bas, assise à MA table, qui est peut être en train de vivre le rêve de MA vie... Je ne peux pas le croire...)

- On s'installe au bar? Qu'en penses-tu? me demanda Jack. J'ai tellement faim. Je ne pense pas pouvoir attendre pour une table...

- Oui oui... Très bien. Le bar. C'est parfait, acquiésai-je, dépitée

Installés à l'angle du bar, chacun d'un côté, nous pouvions au moins nous regarder quand nous nous parlions. C'était déjà ça. Jack commanda une bouteille de chianti (c'était bon signe) et porta un toast à nos retrouvailles.

- Tu m'as manqué Bird. C'est long trois semaines tu ne te rends pas compte. J'ai gardé l'habitude de les faire avec toi ces voyages tu sais... Tu me manques beaucoup pendant les grosses tournées comme ça, dit-il en me faisant un clin d'oeil.

Pendant longtemps, nous avions shooté ensemble, lui le photographe vedette et moi la mannequin star des podiums. Tout le monde nous prenait pour le couple le plus glamour de New York. Les journalistes nous traquaient aux soirées people et nous placardaient en photo dans leurs magazines. Nous avions beau leur expliquer durant les interviews que nous étions juste de très bons amis, le tout New York voulait que nous soyons amoureux... "Ah... Si seulement leur souhait pouvait se réaliser" pensais-je souvent... Mais c'était ainsi. Amy était là avant...

- Je n'ai plus ma muse... continua Jack. Je manque parfois d'inspiration... Et surtout, je n'ai plus personne pour me faire des blagues sur le set, ni pour s'assurer que j'ai une bouteille d'eau, des fruits secs et ma vitamine C dans ma chambre d'hotel avant d'aller me coucher...

- Oh Jack... Je sais... Ça me manque aussi... Mais...

- Justement, m'interrompit-il. Tu sais, j'ai beaucoup réfléchi et, il s'est passé quelque chose... Et c'est de ça dont je voulais te parler...

- Oh?

(C'est parti. Le moment de vérité)

- Vous avez choisi!?

(Grrr ce fichu serveur me polluait aussi bien dans mes rêves que dans la réalité...)

- Tu sais ce que tu veux Bird?

- Oui. Un Risotto. Le sashimi et les croquettes de choux-fleurs à partager, martelai-je à la vitesse de l'éclair

- Mais tu n'as même pas regardé le menu...?

- Oh... Oui mais... Enfin si. J'ai jeté un oeil...

- Bon... Ok... Parfait pour les entrées et je prendrai ensuite le canard servi avec la purée de fève et persil s'il vous plait.

- Très bien. Je vous remercie.

Le serveur était reparti...

- Où en étions-nous? Ah oui... Je disais que... J'aime beaucoup quand tu portes ce collier, s'interrompit-il. C'est celui que ta maman t'a offert pour tes dix-huit ans?

- Oui... bafouillai-je, destabilisée par tant de ressemblance avec mon rêve...

- Tu es splendide BIRD.

- ...

Il attrapa timidement ma main du bout des doigts... (Oh mon Dieu) Je tremblais...

- Bird. J'ai beaucoup réfléchi pendant ce voyage. A toi. A nous. Au futur. A ta carrière. A ton choix d'arrêter pour te concentrer sur des projets qui te tenaient davantage à coeur. J'ai repensé à cette discussion que nous avions eu où tu m'expliquais tes motivations, et aussi à quel point tu étais usée par ce milieu de "faux-semblants et paillettes", comme tu m'avais dit... Mais je ne peux m'empêcher de me dire que nous sommes en train de passer à côté de quelque chose de fabuleux... Que TU passes à côté de quelque chose de fabuleux... Nous pourrions être les rois du pétrol à l'heure qu'il est. Tu te rends compte?... Bref. Et puis Simon qui m'envoie un email lundi pour me dire que tu avais le blues... Alors forcément, ça n'a fait que renforcer ce que je me disais... "Elle ne s'épanouie même pas dans ses nouveaux projets" C'est pour ça que je t'ai envoyé cet email... Je voulais tester un peu la température... Bon. Je t'avoue que je suis un peu redescendu de mon nuage quand tu m'as dit que tu avais bel et bien tourné la page et souhaitais passer à autre chose. Et je suis ravi pour toi si ton projet d'écriture fonctionne. Sincèrement. Ça a l'air vraiment bien. Il faut d'ailleurs que tu m'en dises plus. J'ai hâte d'en apprendre davantage sur tes lecteurs et le reste... Mais je ne te cache pas que j'ai continué à penser à tout ça et surtout, j'ai reçu un appel déterminant il y a deux jours... C'était Sam (son agent)...

Je l'écoutais parler, presque anesthésiée par la tristesse et la déception... Il voulait que nous retravaillions ensemble... Voilà ce qu'il avait de si important à me dire... J'étais indispensable à sa carriere... Mais pas à sa vie... Et il continuait:

- Sam s'est vu proposer un contrat à six chiffres par Jolie Smith Vintage pour que nous re-shootions une campagne tous les deux. BIRD! Tu te rends compte!? Et je n'ose imaginer quel serait ton cachet! Sûrement une vraie mine d'or. BIRD! C'est fou non!?

J'étais sans voix... Evidemment que c'était une fantastique nouvelle... Nous, les deux petits européens venus aux Etats-Unis pour vivre le rêve américain, nous les deux petits paumés qui avions tenus pendant des années, dans la solitude parfois extrême de cette ville cosmopolite. On nous proposait à nous, Jack Hanks et Elinor Bird, un contrat en or pour une campagne mondiale. Pas encore trente ans et le succès frappait à la porte... Oui... C'était fantastique... Je pensais rapidement à ce que je pourrais faire avec cet argent... "Je pourrais plus facilement monter ma société et commencer à créer mes vêtements... Je pourrais surtout faire de beaux cadeaux à ma famille... Je pourrais peut être acheter un appartement..." Evidemment... Mais je savais combien il était dangereux pour mon équilibre de travailler avec Jack, d'être sa meilleure amie à qui il raconte tout sur le set, son amie à qui il donne des tapes dans le dos et des coups de coude à longueur de journée, son amie qu'il couvre de clins d'oeil complices... Oh... J'étais passée par là et j'avais souffert. Et c'est une des raisons pour lesquelles j'avais arrêté le métier...

Mais Jack n'avait apparemment pas fini son monologue...

- Et puis la vérité, c'est que je n'arrive pas à travailler sans toi. Tu me manques vraiment. Alors je ne dis pas que j'aimerais que tu sois sur tous les shoots avec moi... Je sais bien que ce n'est pas ce que tu veux. Mais si au moins tu acceptais de faire quelques campagnes et quelques projets d'édito avec moi, de temps en temps... Nous sommes un peu comme les Bonnie & Clyde de la mode Darling. Le tout New York n'attend qu'une chose, c'est que l'on retravaille ensemble... Sam me l'a encore redit au téléphone hier.... Et puis j'ai pris l'habitude de t'avoir dans ma vie... Et tu es un vrai soleil pour moi, une vraie lumière, une vraie inspiration.

(Ces mots me disent quelque chose... J'ai déjà entendu ça quelque part...)

- Tu es celle qui me donne des ailes, qui me donnent envie de me surpasser, d'être plus fort, d'aller plus loin, tu me fais croire en moi comme personne, tu es toujours là dans mes moments de doute et tu sais mieux que personne comment me remonter le moral et me faire voir le bon côté des choses en toute situation.

(Mon Dieu... Il a pris cette phrase dans mon rêve...)

- Alors, je ne sais pas ce que cela veut dire. Je n'ai même pas envie de me poser la question... Je sais juste que tu me fais du bien et que j'ai besoin de toi dans ma vie comme de personne...

Le sourire réapparut sur mes lèvres... "Besoin de toi dans ma vie comme de personne..."

- Dis donc. Tu souris? Mais je suis sincère... Je ne sais pas comment tu t'es débrouillée Bird mais en trois années, tu as pris une place essentielle dans mon coeur. Tu comptes tellement pour moi. J'espère que tu le sais. Je me rends compte que je ne le dis pas souvent alors je te le dis maintenant. Tu comptes beaucoup pour moi. Voilà.

(Voilà... Super... Ahlalala... Mais que répondre à ça... Il est quand même trop touchant...)

- Bref. J'ai fini ce que j'avais à dire. La balle est dans ton camp. Je sais ce que tu penses maintenant... Je te connais... Mais promets-moi d'y réfléchir sérieusement? Ok? On peut faire de grandes choses tous les deux! Je te le jure...

J'étais paralysée. Je ne savais que penser, que ressentir. Ce n'était pas exactement comme ça que je l'avais rêvé mais j'étais malgré tout profondément touchée par ses mots... N'ayant pas de réponse à lui apporter, je lui avais promis d'y réfléchir et de revenir vers lui dans la semaine... Et nous avions bien vite changé de sujet. Je lui avais raconté en détails notre merveilleux repas de Thanksgiving... La famille de Billie qui était venue chez Paige et Simon, Charlie qui s'était endormi devant la cheminée avec Georges à ses pieds, mes suspicions à un possible mariage entre Paige et Simon ou un bébé, le weekend à la mer, et surtout mon projet d'écriture... La chose la plus importante dans ma vie en ce moment, qui m'apportait tellement de bonheur chaque jour...

Il m'avait raccompagné à la maison, m'informant qu'il avait ramené plein de cadeaux pour Billie, Paige, Simon, Charlie et moi et qu'il ferai un diner chez lui bien vite pour nous les offrir... Il était si attentionné...

En m'endormant, je réalisais que je préférais finalement que les choses se soient passées ainsi. La perfection n'existe pas et mon rêve se serait forcément transformé en cauchemar un jour ou l'autre. Si l'on devait être ensemble un jour ça se ferait, mais ce n'était juste pas le moment... Pour l'instant, Amy était dans sa vie...

*Alexander Wang

**Burberry

***les délis new-yorkais sont des petits magasins de quartier où l'on trouve absolument tout. Ouvert 7j/7 24h/24


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazines