Vivian Lofiego/Elle portait une blessure au front

Publié le 04 février 2010 par Angèle Paoli
Printemps des poètes 2010 – « Couleur femme »
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I

LLEVABA UNA HERIDA EN LA FRENTE

Llevaba una herida en la frente, alhaja que sobrevivió
en la oscuridad del cielo austral,
broche engarzado de estrellas, único resistente a la ira de
las parcas

Tiempo en cuenta regresiva, tiempo que no desemboca
como si fuera el cause de un río detenido en su fuerza
ella esperaba firme como un soldadito de plomo
que la muerte viniera y la construcción que fue su memoria
le fuera barrida de un soplo

El mismo soplo que nos puso a todos lejanos de la tierra prístina

Entonces una mano se estiró en el viento, la distancia
del no abrazo cauchemard en la vigilia los rostros girando cual planetas
en el centro un sol negro empujándolos a la deriva de sí mismos

Caía un telón y como en Shakespeare lo trágico trasciende por causas ajenas a
la razón,
para Otelo un pañuelo
para Hamlet un fantasma
para Macbeth tres brujas
para Prospero un Elfo
He aquí el tejido del drama :
ella debe dejar su casa por desalojo
un ala negra se le dibujó en la que fue cama de los hijos
se espantó sabiendo que no llegaría a otra orilla

I

ELLE PORTAIT UNE BLESSURE AU FRONT

Elle portait une blessure au front, joyau qui avait survécu dans l’obscurité du
ciel austral, broche sertie d’étoiles, seule à résister à la colère
des Parques

Compte à rebours d’un temps qui ne va nulle part
où elle attendait la mort, ferme comme un petit soldat de plomb,
et qu’ainsi le délicat édifice qu’avait été sa mémoire
lui soit balayé par le souffle d’une haleine légère

celle-là même qui nous a tous rejetés loin de la terre originelle

Alors, une main s’avança au vent dans cette trop grande distance
de la non-étreinte cauchemar de nuit blanche ces visages en orbite comme des planètes
au centre un soleil noir les entraînant vers leur propre dérive

Un rideau tombe et comme dans Shakespeare le drame s’amplifie pour des raisons qui échappent à
la raison,
un mouchoir pour Othello,
un fantôme pour Hamlet
trois sorcières pour Macbeth,
un Elfe pour Prospero
et le tissu du drame bifurque :
le père redevient enfant et la fille tente de balayer l’aile noire restée dans le berceau

II

VIAJE SECRETO A LA CENIZA

Viaje secreto a la ceniza, a la primitiva aurora, los sentidos encendidos
al mínimo detalle, big bang, big crunch

II

VOYAGE SECRET VERS LA CENDRE

Voyage secret vers la cendre, l’aurore primitive, les sens exacerbés,
Par le moindre détail, big bang, big crunch

III

LAS DOS BISABUELAS

Eva y María, las dos bisabuelas,
raíces transplantadas a América del Sur
puestas bajo un mismo sino

Ambas desnudas de la lengua materna
ese jardín secreto vuelto flor silvestre
que forjó
y forjó el lazo del afecto
menguando en la tierra en un
tejido de evocaciones

Era el sur y era el norte, Capuletos, Montescos en la nueva tierra
ramas de aquel àrbol tramando vida

LLegó un día en que la hija de María – mi abuela –
se pusiera guantes de seda, sombrero de ala ancha
para asistir a la boda de la nieta de Eva – mi madre –
oracular y vengadora augureó una ruptura en plena ceremonia
bajo estas gracias comenzó la vida de casados de mis padres

Expulsados del paraiso
para siempre,
para siempre
conmigo a cuestas

III

LES DEUX BISAÏEULES

Les deux bisaïeules, Eva et María, femmes universelles tronc de l’arbre
racines transplantées
consolidées sous un même destin

Étrange vie, elles dépouillées de leur langue maternelle
jardin secret fleur de désarroi
qui avait forgé
encore et toujours le lien de l’affection
une racine qui avait ancré dans la terre et créé un perpétuel
tissu de nostalgies

C’était le Sud et c’était le Nord, Capulets et Montaigus, c’était la Pampa ouverte
les branches de cet arbre qui se multipliait, l’aïeule veuve, mère du fiancé
coiffé d’un chapeau à large bord et tout de satin vêtu, en gants de soie à la noce,

Sibylle augura la rupture,
Sous le sortilège commença
la vie mariée de mes parents

Vivian Lofiego

D.R. Poèmes inédits (2010) de Vivian Lofiego
pour Terres de femmes

D.R. Traduction inédite de l'espagnol (Argentine)
par Claude Bleton



VIVIAN LOFIEGO


Image, G.AdC

Voir aussi :

- (sur Terres de femmes) Vivian Lofiego/De l’autre côté du rituel (poème extrait d’Obsidiennes de la nuit + bio-bibliographie) ;
- (sur Terres de femmes) Vivian Lofiego/Les arbres multiplient leurs branches… ;
- (sur Terres de femmes) Vivian Lofiego/Un temps que les femmes filent ;
- (sur Terres de femmes) le portrait de Vivian Lofiego dans la galerie Visages de femmes ;
- (sur le site du Printemps des poètes) une fiche bio-bibliographique sur Vivian Lofiego dans la Poéthèque (+ un poème inédit : L'Heure Bleue », 2007) ;
- (sur le site de RFI) une interview de Vivian Lofiego (en espagnol) lors de la sortie de son ouvrage Pierre d'infini ;
- une courte anthologie sur le site Poésie d'hier et d'aujourd'hui.



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