La dernière trouvaille des pirates informatiques a été de détourner des crédits d'émission de carbone afin de les
revendre à d'autres sociétés pour une valeur de 4,4 millions de dollars. Rien que ça.
Le système de plafonnement et d'échange place une limite sur les émissions de CO² que les entreprises peuvent émettre. Celles-ci peuvent revendre leur "excédent" à d'autres entreprises qui
dépasseraient leurs quotas. Il y a donc un marché très lucratif sur le sujet, une sorte de place boursière secondaire.
Les pirates ont lancé une attaque dite de "phishing" (hameçonnage, filoutage en français) qui consiste à obtenir des renseignements personnels dans le but de perpétrer une usurpation d'identité,
ici pour pouvoir accéder aux comptes de gestions des crédits carbone.
Les mails étaient adressés aux employés de ces sociétés, leur demandant de ré-enregistrer leur compte avec la "German Emissions Trading Authority".
Les pirates ont ensuite utilisés les données soumises par les employés naïfs pour accéder aux comptes proprement dit sur les plateformes légales et transférer les crédits d'émission à
l'extérieur. De là, les crédits ont été vendus sur le marché libre.
Ce n'est malheureusement pas le premier incident de la sorte qui se produit. L'an dernier, des pirates avaient accédé aux bases de données des entreprises d'exploitation forestières du
gouvernement brésilien et ont volé des "permis de transport extra" qui visent à autoriser l'abatage d'arbres supplémentaires en forêt amazonienne.
Le résultat ? Quelque chose comme 1.7 millions de mètres cubes de bois ont été illégalement récoltés à cause de ce piratage.
Ce n'est pas une raison, bien sûr, pour prendre peur et craindre ces marchés annexes de plafonnement des échanges carbones, ou de régulation d'abatage des arbres en forêt amazonienne. Cela met
toutefois en évidence comment de "bonnes politiques" peuvent être perverties puisque là où il y a de l'argent, il y aura forcément des gens pour vouloir en tirer profit.
En 2009, le département américain de l'Agriculture avait examiné l'impact possible de la législation climatique sur les secteurs agricoles et forestiers. L'étude a révélé que le système de
plafonnement et d'échanges augmenterait les coûts énergétiques pour les agriculteurs, ce qui ferait baisser leurs revenus de 1% jusqu'en 2018.
Toutefois, les agriculteurs pourraient tout de même générer des profits grâce à un programme de compensation des émissions de carbone.
Principalement en plantant des arbres, réduisant ainsi les émissions de méthane et de protoxyde d'azote, ce qui leur permettrait même de revendre leur excédent de crédit carbone, tout comme les
grosses industries.
L'étude a démontré que cela pouvait générer entre 1 et 2 milliard de dollars en revenus entre 2012 et 2018.
En 2050, les USA pourraient même avoir un rendement net annuel de 20 milliards de dollars.
Il y a bien sur un certain nombre de questions en suspend autour de la question du programme de compensation, y compris sur les répercussions du prix sur les produits de base.
Cet "incident" de piratage pose la question de la sécurité, qui est permanente parce qu'il y a tout simplement trop d'argent à se faire.
Les 4 millions de dollars volés par l'intermédiaire de cette attaque informatique est une goutte d'eau dans la mer du marché des crédits d'émission de carbone.
Le marché mondial des crédits d'émission de carbone devrait atteindre les 170 milliards de dollars - soit 33% de plus qu'en 2009 selon un
rapport publié le mois dernier par une société d'analyse du "Point Carbone".
En 2009, plus de 8 milliards de tonne métriques de carbone ont été échangées pour une valeur de 136 milliards de dollars.
L'écologie et le business font très bon ménage, et ça, les pirates l'ont bien compris !