Magazine Humeur

A propos des déclarations de Mgr Le Gall et de l'islam : Réponse (partielle) à M. Boucart

Publié le 09 février 2010 par Hermas

Dans un long article publié sur son blogue, Totus Tuus, M. Matthieu Boucart - que nous remercions en passant de l'intérêt qu'il veut bien accorder au nôtre - critique l’article publié ici à propos des déclarations de Mgr Le Gall, ainsi que celui du Père Daniel-Ange, et défend l’idée d’une construction de la civilisation de l’Amour avec les musulmans.

L'idée nous était venue de proposer une réponse sur Hermas.info, mais d'autres réponses sont intervenues sur le blogue de M. Boucart, de sorte que nous avons préféré nous intégrer à cette discussion "sur place", pour simplifier les choses. M. Boucart paraissait tout d'abord s'étonner que l'on puisse contredire les propos d'un évêque. J'en profite donc pour indiquer ici que les propos tenus par ce dernier ne sont pas d'ordre doctrinal et qu'ils concernent un débat politique, qui est libre. Ce serait peut-être pousser un peu loin l'opinion favorable à l'islam que de transposer dans le catholicisme l'idée qu'un chef religieux puisse imposer, ès qualités, une vérité pratique en ce domaine.

La discussion n’est jamais chose facile en soi. Il faut distinguer, relativiser ceci, mettre en avant cela, proportionner, mesurer. Il faut surtout suivre un fil de discussion, ce qu’on appelle  en philosophie un “point de vue formel”, c’est-à-dire rester dans le champ défini de la discussion. Si l’on s’en écarte, non seulement on parle d’autre chose que ce dont il est discuté, mais on s’expose à imputer à autrui ce qu’il ne dit pas, ce qu’il n’a pas l’intention de dire ou d’aborder, et à lui faire grief de nier ce dont il est pourtant d’accord. L’expérience montre qu’il en est très souvent ainsi, de sorte que des dialogues prétendus tournent rapidement à la cacophonie, à l’irrationalité même, dans des propos qui partent dans tous les sens et qui, inéluctablement, n’apportent rien à personne. Ainsi si Jean affirme qu’il fait beau et que Pierre lui répond que non, au motif qu’il n’est pas sain de s’exposer durablement au soleil en plein midi, on comprend bien qu’ils pourront parler longtemps mais que ce sera tout à fait en vain.

Je ne dis pas que cela doive être le cas en l'occurrence, mais pour préciser qu'il y a bien des moyens de parler de ce sujet, comme sur d'autres, sans s'entendre sur ce sur quoi l'on parle. En l'occurrence, ce qui est en débat - en tout cas ce qui l'était pour le Père Daniel-Ange et moi-même - ce n'était pas la question du respect dû aux musulmans, qui va pour nous de soi, mais la question de l'islam lui-même, religion originale du fait de sa confusion entre le temporel et le spirituel et qui, de ce chef, pose des problèmes originaux que la seule perception des musulmans, pris en tant qu'individus, ne permet aucunement d'appréhender et moins encore de résoudre. C'est de rapport de l'islam à la politique que nous parlons. Les musulmans, avant que d’être tels d'ailleurs, sont des personnes, créées par Dieu, aimées de Dieu et appelées par lui à la même fin ultime que nous, parce qu’il n’y en a qu’une pour tout homme : la vision de Dieu face à face. Cette communauté de destin suffit déjà à faire de ces hommes nos frères. J’observe que, paradoxalement, les musulmans sont souvent présentés comme des frères plutôt par leur confession musulmane que par cette fraternité fondamentale, laquelle résulte pourtant non d’options humaines aléatoires mais de la volonté même de Dieu.

On nous objecte la possible évolution de cette religion, en particulier au contact du monde occidental moderne, ce qui nous paraît assez paradoxal, là encore, au regard d'une religion qui tient ce monde-là, en règle générale, pour une contre-valeur spirituelle par rapport au sien. Mais, après tout, pourquoi  pas ? Qui n'appelerait pas, de l'extérieur, une telle évolution ? Il est des voix, même musulmanes qui, quoique fort dissidentes, l'appelent également. Comment ne pas en prendre acte ? Reste que cette évolution ne ressortit pour l'heure que du domaine du possible, et d'un possible grevé d'interrogations fort sérieuses sur la possibilité même d'une telle évolution. L'actuel, le réel, l'universellement répandu, qu'on le veuille ou non, au regard des problèmes actuels d'ordre politique qui se posent à nous, est celui d'un monde où l'islam majoritaire ne s'accommode ni de la démocratie, ni de la reconnaissance des droits de chrétiens.  On ne peut dès lors éviter cette question : pourquoi en serait-il autrement chez nous si ce fait majoritaire s'y imposait ? Il n'y a pas de réponse cohérente, simplement des voeux qu'il en soit autrement, selon des arguments qui n'emportent pas notre adhésion.

On pourra se reporter à ce débat ICI.


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