Réagissez à cet article

Publié le 10 février 2010 par Claudel
Depuis une dizaine de jours, j’essaie d’organiser ma pensée, mais d’une simple réaction, elle s’est dispersée dans toutes les directions et elle est devenue immaîtrisable. Comme si elle devait donner un cours sur le sujet et qu’elle n’arrive pas à s’ordonner. Justement, c’est le sujet que je ne parviens pas à cerner. Pourtant bien concret au départ, il s’est étendu à une abstraction du genre : qu’est-ce que le journalisme? qu’est-ce que l’information? De quoi sont faites les nouvelles? Où s'en va le monde des medias si les nouvelles sont faites de communiqués de presse, d'opinions de lecteurs? Allez donc écrire un simple petit billet sur une telle question.
Je vous livre le point de départ et quelques avenues. Vous irez dans la direction de votre choix.Point de départ : un article dans un journal local, épreuve papier. Je le lis, je réagis fortement, je commente, j’engueule l’article (oui, l’article, quoi d’autre? Pas le journaliste, je le connais, je sais qu’il fait pour le mieux, il n’a fait que relater quelques faits énoncés lors d’une conférence de presse ou résumer un communiqué de presse.). En fait, je sais très bien que j’en veux aux personnes concernées par l’article parce que j’ai vécu quelques problèmes avec elles et je traîne une petite blessure qui s’ouvre à l’occasion.
Encore un peu fâchée, je me plante devant mon ordi et vais voir l’article en question sur Internet. C’est écrit en bas « Réagissez à cet article ». Rien. Depuis, je n’ai plus écrit une phrase qui se tienne.
À partir de ce jour, il me semble que je n’ai vu que des « Réagissez à cet article », tous ces commentaires sur tout et sur rien, toute cette mer de courriels échangés, d’opinions, de réactions sur Facebook. Ces Vox populi qui deviennent la norme dans les médias comme si la voix du peuple était la nouvelle vision de la réalité. Quel média n’a pas sa liasse de courriels à brandir comme si l’opinion des gens valait autant que la réflexion fouillée et approfondie d’un journaliste chevronné? Qu’est-ce qu’on a à tant vouloir s’exprimer publiquement?
J’en suis même venue à penser que nous, blogueurs amateurs, nous ne devrions pas nous octroyer le même encadrement, le même mot de « blogue » que les médias. Comme usurper un titre. Me demander qui a été le premier blogueur ne m’a menée nulle part.
À voir tous les commentaires écrits dans les moindres interstices d’internet qui se retrouvent souvent dans les journaux, radio et télévisions, à fermer la radio et la télévision quand les lignes ouvertes me bombardent les oreilles, à comparer, sans en faire une analyse statistique rigoureuse, les divers sujets qui attirent le plus de réactions, j’en ai quand même tiré une conclusion : pas grand monde ose commenter une nouvelle locale ou parler de ce qui se passe dans sa cour. Je ne sais pas pour votre hebdo, mais dans le mien, plus d’éditorial depuis des lunes et très rarement d’opinions publiées. Les « réagissez à cet article » restent vides, ce qui est loin de m’encourager à noyer un commentaire parmi les autres, puisqu’il n’y en a pas. Moi, en tout cas je suis trop lâche. Peur des représailles, peur des jugements. Peur pour ma réputation? Non, ça, je m’en fous, je ne sais même pas si j’en ai une. D’autant que je sais que mes commentaires ne seraient pas objectifs, ils seraient eux-mêmes jugements.
Voilà pourquoi je me suis tue pendant les derniers jours.