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Je rentre demain

Publié le 07 octobre 2007 par Filippo Zanghi
Je leur dis que je m’en vais. Certains disent que j’ai raison. Que j’ai de la chance de ne pas vivre ici. D’autres me demandent si je me suis plu dans le village. Ça m’a plu, oui. J’aimerais bien vivre ici, n’est-ce pas? Euh...

Circonstances.

Tous ils savent que j’étais ici. Tous ils savent qui j’étais. Ils m’ont vu passer avec ma Ford ou à pied, le Nikon en bandoulière. Ils m’ont vu, le casque sur les oreilles, pendant les élections.

Ils m’ont laissé faire. La plupart, je crois, approuvaient en silence. Ceux qui m’ont interpellé voulaient seulement officialiser leur accord. Comme hier, le correspondant local de la Gazzetta del Sud. 45 ans de chroniques, et quelques-unes dans le Corriere della Sera. Il a dit que j’ai un bel appareil photo. (Il sous-entend peut-être que je ferais mieux de viser autre chose que la station-service.) Ensuite, il m’interroge. Est-ce que je sais où se trouvait le village, à l’origine? Est-ce que j’ai vu les tombes creusées dans la colline? Un peu. Il montre la colline. Il marque son territoire. Je crois qu’au fond, il me dit que j’étais un invité, un simple invité. Je n’aspire à rien de plus.

Il fera un papier sur mon bouquin. – C’est en français. – Ah bon? On s’arrangera.

L’ami de mon cousin, samedi soir, m’a dit qu’il veut faire plus. Il veut organiser une fête pour le livre. Je dis que c’est un roman, que ça ne porte pas à proprement parler sur le village. Il dit que ça ne fait rien, que c’est un livre et que je suis d’ici.

Certains me disent que mon dialecte est parfait. Certains me disent que je parle italien comme un étranger – un étranger qui parle parfaitement l’italien, mais dont on sait, dès la deuxième syllabe, que c’est un étranger.

Mon grand-père, c’était le petit qui venait au bar de la place, celui qui n’existe plus? Oui. Mon père, c’est celui qui porte la moustache? Oui.

L’été est là. J’endosse mes habits d’été, mes habits colorés. Ils me disent que c’est plein de couleurs. Je leur dis que c’est mon uniforme de touriste. Sourire.

Un uniforme, pas un déguisement. Je me suis déguisé en villageois. Juste pour le printemps. Je vais ranger le costume dans le roman. Cela, je ne le leur dis pas.

Ils me disent bon vent.


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