L’immanquable débat du jour – car il en faut à peu près un par jour – est celui qui porte sur la Marianne publicitaire que le gouvernement a cru bon de prendre comme symbole pour lancer son “grand emprunt” dans tous les grands journaux.
C’est la Schtroumphette fille-mère de la République, visiblement moins sage que la vraie Sctroumphette,
quoiqu'elle soit plus sobrement vêtue. Maternité oblige.
La noble figure est accompagnée [à défaut d’autre chose – certains évoquent le passage d’un Schtroumph, mais
lequel ?] d’un slogan : « La France investit dans son avenir. » Je prends soin de respecter l’intégralité du message solennel : le mot “avenir” est bloqué par un point
final [les mauvais esprits diraient que la phrase en son entier comporte trois
points]. Un avenir sans futur, en quelque sorte. Ce n'est pas forcément
prometteur.
Quoi qu’il en soit, l’image « fait débat », comme on dit en cuistrerie. Elle choque, scandalise, même ! Il y a des politiciens qui s'en étranglent. Vos journaux, si l’on peut dire, en sont gros. Mais le plus cocasse de l’affaire est que nos penseurs de pub, quel que soit l’esprit ambiant, n’ont pu imaginer d’autre représentation visuelle de “l’avenir” que par celle d’un enfant à naître. A naître, je dis bien, c'est-à-dire d’une de ces petites choses que la loi nous autorise massivement à tuer pour préserver nos aises, nos droits, ou nous protéger des conséquences de nos erreurs ou de nos peurs. Bref, de notre propre futur.
Avouez que l’image, au bout du compte, ne manque pas de paradoxe, et que le ridicule dépasse bien celui du bonnet.
Voici une Schtroumphette républicaine qui avorte quelque 250.000 enfants par an sur l’autel de la liberté, dont le moindre des soucis est de protéger les enfants de France et qui s’apprête à
accoucher, sans père connu, de… de quoi au fait ? D'une abstraction, comme de coutume.